live, comme on dit, ce mot, toutes langues confondues
ce son y règne en maître, sorte de bourdonnement d’abeilles continu
perçant tout commentaire, tout effroi, tout supplique, tout cri
seule l’intensité des bombardements le couvre, le temps de
disparaissant presque en cette trêve de quelques misérables jours
jeunes et moins jeunes têtes scrutant avec étonnement le ciel muet
il me suffisait aussi de rouler vers le sud Liban, au plus près de la frontière
territoire qui fut des années durant occupé, la Galilée de l’autre côté
ces villes, ces kibboutz bâtis sur d’anciens villages palestiniens
et ce son qui soudain s’impose, domine, drones de surveillance
(u)M K(amel), l’appelle-t-on familièrement, la mère de ou à Kamel
un jeu de mots et de noms impossible à traduire, et quand bien même
frontières de toutes sortes qui n’en finissent plus de se dresser
MK II plus précisément, le deuxième du genre, double instrument de terreur
nous pouvions également parfois les entendre au-dessus de nos têtes ici
ce même drone donc ou une variante, qui pousse sa tyrannie technologique
jusqu’au seuil d’une famille palestinienne en Cisjordanie, délivrant ce message :
« si vous pensez à faire quoi que ce soit, nous vous atteindrons et vous tuerons »
nouvelle forme de messagerie à domicile, en langue indigène de préférence
et alors que j’aligne ces quelques lignes,
un autre son, bruit sourd, long, envahit l’espace
deux avions de chasse de cette terrible armée nous survolent de nouveau
se dirigeant vers la Syrie voisine où ils lâcheront d’énièmes missiles
l’aéroport de Damas ou d’Alep ces dernières semaines
le bleu du ciel comme suspendu une fois de plus
mais les voilà déjà de retour, deux points indéfinis, sillages blancs
la bande de Gaza n’est qu’à 296,05 kilomètres
notre Méditerranée balafrée
à n’en plus finir
Ghassan Salhab