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#187 | 15 avril
 
 
 
Chères lectrices, chers lecteurs,
 

lundimatin a besoin d’argent



Nous ne savons jamais trop comment vous en demander, notamment parce que nous imaginons que la grande majorité d’entre vous n’en jette pas tous les matins par les fenêtres. C’est aussi lié à notre ligne éditoriale un peu atypique et que vous commencez à connaître. Ce que nous cherchons à produire c’est de l’intelligence collective, une perception partagée du monde qui nous entoure ; nous parions donc sur le contenu des articles que nous publions, la façon de les agencer, la manière de les signer ou non, plutôt que sur l’identité réelle ou supposée de notre petite équipe. Lorsque des confrères d’autres médias nous sollicitent pour parler de « nous », nous refusons systématiquement, non pas par fausse pudeur ou goût du secret mais parce que notre fonctionnement comme nos biographies nous paraissent sans intérêt. La meilleur manière de savoir ce qu’est lundimatin reste de nous lire.

 
 
 
 
 
Les Furtifs - Alain Damasio
 

[Bonnes feuilles]



Travailler dans la rédaction de lundimatin comporte certains avantages (salaire mirobolant, reconnaissance de la profession et tickets restaurant) mais aussi de véritables privilèges comme celui de se voir offrir en exclusivité un grand nombre de livres que nous n’avons pas toujours le temps de lire.

Cependant, nous savons que tout régime de faveur appelle irrémédiablement ses nuits du 4 août. Cette semaine, nous avons reçu le nouveau livre d’Alain Damasio - Les Furtifs-, qui paraît le 18 avril aux Éditions La Volte, cadeau empoisonné s’il en est. Il a d’abord fallu argumenter sans fin à propos de qui, dans la rédaction, serait le plus légitime à le lire en priorité. Puis il y eut les amis qui proposaient aimablement qu’on oublie notre exemplaire quelques jours chez eux avant de sombrer dans l’aigreur face à notre refus tout professionnel. S’ensuivirent les tweets pleins de ressentiment d’inconnus, les regards méprisant mais envieux de cette dame assise à côté de nous dans le bus et enfin les messages d’insultes sur telegram de proches qui nous traitaient d’aristocrates. Avouons-le, nous avons manqué de clairvoyance : alors que la suite de La Horde du Contrevent est attendue depuis 15 ans, il n’était pas envisageable d’être les premiers à lire le nouveau Damasio sans déclencher une vague de haine farouche.
Heureusement, Alain Damasio est non seulement un contributeur de lundimatin mais surtout un ami. Informé des tumultes provoqués par ce service presse et afin que nous puissions continuer de travailler dans un environnement apaisé et serein, il nous a gentiment proposé de publier les bonnes feuilles de son dernier livre. N’ayant lu que les 300 premières pages, nous nous contenterons de dire que parfois, ça vaut le coup d’attendre 15 ans.

 
 
 
 
 
Les profanateurs de secrets d’états
 

Éloge et défense de Julian Assange



Jeudi 11 avril 2019, Julian Assange est arrêté au matin par la police Britannique à l’ambassade d’Équateur à Londres pendant que le monde a le dos tourné, emporté par un fourgon. Cheers ! à la Chambre des Communes, alors qu’en préambule de son allocution sur le Brexit, Theresa May se félicite de l’opération. Elle remercie tout le monde pour leur professionnalisme et leur coopération-coup-monté, et conclut « Cela montre que personne n’est au dessus des lois au Royaume-Uni ».

Il est donc arrivé. Le jour que nous redoutions, où nous allions trembler, où nous savions que, forcément, nous ne serions pas là pour crier ou nous enchaîner au fourgon avec lui. C’était le plan, évidemment, que nous ayons le dos tourné. Que nous soyons absents de la scène, ou fatigués.

 
 
 
 
 
D’abord, ils sont venus pour Assange…
 

« Jeter Assange en prison vise à décourager quiconque de suivre son inspiration pour publier sans compromis ce qui expose les crimes et mensonges des puissants. »



L’arrestation le 11 avril 2019 de Julian Assange dans l’ambassade d’Équateur par la police métropolitaine de Londres est un coup de poignard pour une liberté de la presse déjà fort mal en point. Elle met aussi en lumière des rapports géopolitiques souterrains que WikiLeaks n’a eu de cesse d’exposer depuis sa création. Enfin, elle est le produit d’un travail de sape, au long cours, de l’image d’Assange, révélant la puissance d’un tourbillon médiatique dans lequel beaucoup se seront laissé emporter. Retour sur quelques éléments clé et remise de pendules à l’heure...

 
 
 
 
 
Des « casseurs » vont-ils prendre d’assaut le lycée Charlemagne ?
 

Des élèves réagissent à l’annonce de cet étonnant PPMS



Mardi 16 avril, la direction du lycée Charlemagne de Paris organise un Plan particulier de mise en sûreté dont le thème est aussi novateur que préoccupant. Dans une lettre au parents d’élèves, le proviseur expose ce "risque majeur" auquel il entend préparer collégiens et lycéens :

« Nous ferons l’hypothèse de manifestations bloquant le quartier et dégénérant avec des casseurs dans la rue Charlemagne et la rue Saint-Antoine. Des personnes présentes dans la rue commencent à dégrader les vitrines voisines et jettent des projectiles sur les fenêtres de l’établissement. »

Des élèves ont décidé de répondre à la direction de leur établissement en développant quelques brillantes considérations philosophiques sur l’imprévu. [1]

« Le confinement ne protège pas d’une éventuelle intrusion mais figure un fait moins avouable : il faut fermer les portes pour nous empêcher de prendre part à l’émeute. »

 
 
 
 
 
Gilets jaunes, écolos : qui a peur de ne pas être gouverné ?
 

« Il est urgent de créer des alliances contre le désastre dont Macron porte provisoirement le nom. »



Depuis plus de cinq mois des centaines de milliers de gens se battent aux quatre coins de l’Hexagone contre le rouleau compresseur néolibéral représenté avec une singulière brutalité par le régime macroniste. Cette révolte, partie des ronds-points, autant de lieux de convivialité et d’auto-organisation, prenant à certains moments des allures quasi insurrectionnelles, s’inscrit dans la continuité d’autres soulèvements révolutionnaires qui ont interrompu le cours de l’ordre prescrit.

 
 
 
 
 
Contre la Justice infinie - Serge Quadruppani
 

A propos des arrestations d’Assange et Battisti



Tout le monde sait que la Justice et la justice, ce n’est pas la même chose. La Justice est une institution sociale qui applique le droit d’un espace et d’un temps donnés, comme cristallisation provisoire de rapports de force. La justice est une exigence qui finit toujours par remettre en cause cette cristallisation et ces rapports. Justice Infinie (Infinite Justice) est le premier nom de code des opérations militaires étatsunienne entamées en 2001 avec l’invasion militaire de l’Afghanistan puis étendues, sous un autre nom mais dans une même continuité conceptuelle aux Philippines, dans la Corne de l’Afrique, le Sahara, les Caraïbes, l’Amérique latine et le Kirghizistan. Si les actions de guerre dans ces différentes zones n’ont plus porté le nom d’Infinite Justice, elles en ont gardé l’esprit. Enduring Freedom, Liberté Immuable : suivant un procédé d’inversion de la réalité propre aux propagandes, l’invocation de la liberté a couvert des entreprises guerrières où l’on a emprisonné sans jugement ni limite de durée. Si l’appellation faisant référence à la justice a été vite abandonnée parce qu’elle évoquait trop, aux yeux du monde musulman, des idées de revanche et de punition, ces idées-là continuent d’imprégner les guerres antiterroristes de l’Amérique et de ses satellites.

 
 
 
 
 
Une perversion de la raison : les Gilets Jaunes comme cause du Mal !
 

« Les GJ sont-ils aussi responsables de la forte consommation d’anxiolytiques en France, de l’arrestation de Julian Assange ou encore du trou dans la couche d’ozone ? »



Un incompréhensible masochisme me pousse encore à lire et regarder les médias à la solde du pouvoir et ce que l’on peut entendre est inadmissible ! Mais peut-être ce masochisme n’est-il pas la seule raison, peut-être s’agit-il aussi de m’informer sur la position de mes ennemis, de me renseigner sur la ligne de front ?

 
 
 
 
 
Les yeux perdus de l’île Bourbon
 

À la Réunion, trois éborgnés par des LBD 40 racontent la vie après...



Cédric, Jacky et Ritchie ne se connaissent pas.
Fin novembre 2018, sur l’Île de la Réunion, de violents affrontements opposent Gilets Jaunes et forces de l’ordre. Cédric, Jacky et Ritchie perdent l’œil gauche.
LES YEUX PERDUS DE L’ÎLE BOURBON - Teaser
Dir. NiKO
avec Cédric, Jacky & Ritchie
(2019) - 8 min

 
 
 
 
 
J pour Jaune
 

Aéropage de porcs Privatisant par paquets Péage et aéroport À coups de latte et parquet Mais perquiz sans coffre fort Pour les pourris benallées Achille appelant Hector Aux remparts de la cité
On vient te chercher implore Pathétique épave échouée Planqué dans ton château fort Plein de tes rires forcés Plein de tes mots creux et morts Phrases d’un mépris classé Boursouflée fragile amphore Don Quichotte vient te briser Pourquoi jouer au matador Triste figure enivrée Viens rends l’ISF d’abord Petit bourgeois (...)



Aéropage de porcs
Privatisant par paquets
Péage et aéroport
À coups de latte et parquet
Mais perquiz sans coffre fort
Pour les pourris benallées
Achille appelant Hector
Aux remparts de la cité

 
 
 
 
 
Demandons pardon à nos étudiants pour notre complicité dans la destruction de leur avenir
 

« Nous devons regarder en scientifiques lucides et non en autruches notre avenir et l’effondrement certain. »



Nous sommes enseignants dans l’enseignement supérieur ou chercheurs dans des organismes publics.
Nous devons regarder en scientifiques lucides et non en autruches notre avenir et l’effondrement certain. Plus ou moins rapide, plus ou moins violent. Mais certain.

 
 
 
 
 
« On est là... »
 

« ne rêvons pas qu’il faut rêver : rêve-action même désir même combat ».



Boîte postale : gilets-jaunes rond-point…

Elle est bien là, on ne l’a pas entendue venir, toute électrique et bien jaune qu’elle est. Qui çà ?... La voiture du postier... Il est là le facteur qui descend de sa voiture une carte postale à la main... Ils sont bien là les 20 gilets jaunes à côté du rond-point d’Aubenas (Ardèche). Ils la réceptionnent la carte qui vient de...

 
 
 
 
 
COMMUNE GLU
 

Quand le métro s’arrête...



J’arrive sur le quai à 9h10, la rame est pleine, pleine à craquer, portes grandes ouvertes. Je n’entre pas, je reste sur le quai. Plus personne n’entre, car plus personne peut entrer. Il flotte dans l’air une latence lourde et presque absurde, il semble que tous ces voyageurs et voyageuses attendent là depuis longtemps. Nous sommes quelques individus à être, dehors du train, droits sur le quai — vulgaires témoins impatientés, on se regarde, presque affolés, on cherche l’heure, on ne comprend pas : pourquoi le métro ne part-il pas ?

 
 
 
 
 
Polémique autour d’une représentation des Suppliantes d’Eschyle
 

« L’indignation étant souvent valorisée indépendamment de son contenu, les polémiques sont de plus en plus rapides, sans que les œuvres soient traitées en tant que telles. »



Ces dernières semaines, les scandales à propos de différentes œuvres d’art se sont multipliés. À la Sorbonne, une représentation des Suppliantes d’Eschyle a été empêchée, Philippe Brunet, le metteur en scène, étant accusé de pratiquer le « blackface » pour s’être inspiré des mises en scènes antiques et avoir représenté les Danaïdes grâce à de la peinture foncée sur le corps des acteurs, qui portaient par ailleurs des masques à la couleur cuivrée. Hervé Di Rosa, peintre contemporain, est quant à lui la cible d’une pétition l’accusant de verser dans une « imagerie hésitant entre Banania et ’Tintin au Congo’ » pour avoir, sur une toile consacrée à l’abolition de l’esclavage, représenté un homme noir avec une grande bouche. L’artiste a beau faire remarquer que tous les personnages de l’exposition sont représentés avec cette même bouche, quel que soit leur couleur de peau, et qu’il s’agit d’un style, d’une marque de fabrique, rien n’y fait.

 
 
 
 
 
Toutes les CCTV
 

(poème de Palmyre)



Toutes les CCTV m’attendent au tournant de la rue
comme un œil d’araignée sur un corps à distance

 
 
 
 
 
Gilets jaunes : un assaut contre la société
 

lundimatinpapier #4 en librairie le 4 avril



Nous sommes heureux d’annoncer la publication du 5e volume de lundimatinpapier [2].
Sans surprise, c’est un numéro thématique qui revient sur les quatre premiers mois du mouvement des gilets jaunes. Nous avons sélectionné et condensé en 224 pages la trentaine d’articles qui nous semblaient le plus à même de restituer et de comprendre ce soulèvement inédit. Beaucoup de textes d’analyses donc, mais aussi des témoignages, des entretiens, des photographies et de la poésie.
Comme toujours, les plumes connues se mélangent à autant de pseudonymes ou d’anonymes, et les angles d’appréhension du sujet sont aussi divers que possibles : des appels au soulèvement, des gloses sur Hanouka, le détournement d’une chanson célèbre de Sabine Paturel, un hommage à Christophe Dettinger, une critique brutale de la violence médiatique, une discussion sur la guerre et la langue avec Eric Vuillard, etc.

 
 
 
 
 
 
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