Accrochage décoratif, muséal, où les foules font la queue
pour ramener une preuve de leur passage.
L’art comme toile de fond. Papier-peint d’intérieurs :
la vie réduite à une mode et les livres
à des données sur des étagères vides.
Qui choisit encore ses mots ? Question de terrain.
Qu’attendre d’une culture qui distribue des garanties, des prix
des titres – autorisation à la différence annulable…
dès que ça gène, on ampute !
Jeu de dupes que chacun accepte
pour un instant d’éternité pipée.
Par où passe la vie ? Qui la choisit ?
Question politique.
Le paysage se dépose sur la toile comme une ombre.
L’agent orange poursuit ses ravages au cœur des forêts.
Nous sommes en train de perdre la terre.
Je me désaxe du vide pour revenir au monde sensible.
Désir de me débarrasser du pur et de l’impur,
ce découpage vicieux qui vire toujours au totalitarisme.
Je tiens sur le pavé humide du matin. Je reviens aux mots,
je n’ai pas d’autres lieux pour comprendre l’agitation dehors.
Je reprends pied dans le langage, reprise
individuelle, incessante, inclassable, insensée.
Je touche le temps et les visages, j’y mets les mains
comme on dit « y mettre son âme ».
Incarner est ma voie d’accès à naître, à connaître,
c’est l’endroit où Cassandre continue à dire le monde
tel qu’il est.
Je pars de là. J’avance à tâtons.
La colonne d’air qui me traverse m’ouvre le champ.
Oui, j’entends des voix ! Chants d’oiseaux
mêlés d’histoires. Voix perçantes dans la nuit du temps –
brèche ouverte par laquelle je ressens
sans avoir besoin de croire.
Extrême-contemporain – corps-sensible
dans l’orage qui éclate au cœur de l’été, neige rougit
jusqu’aux pétales de soif.
Ce n’est pas une conclusion, c’est une décision.
Vivante !
Natanaële Chatelain
mai 2025