Chasse à la chasse : récentes mises en acte de la souveraineté anishinabée

« Image simultanée d’un présent catastrophique et d’un avenir décolonial »

paru dans lundimatin#258, le 12 octobre 2020

En février 2020, les principales lignes de chemin de fer entre Toronto et l’océan Atlantique ont été bloquées pendant plusieurs semaines en soutien à la lutte des Wet’suewet’en de la côte ouest contre le pipeline de Coastal Gaslink. Par -30 degrés Celsius, des Mohawks de Tyendinaga et Kahnawake, des Mi’kmaqs de Listiguj et tant d’autres traditionalistes autochtones à travers le continent ont paralysé la quasi entièreté du trafic ferroviaire dans le pays.

À Montréal, on pouvait voir les containers s’accumuler dans le port sur des kilomètres. On annonçait des pénuries de propane et de moulée pour le bétail. Suivant l’appel des autochtones à paralyser les infrastructures qui traversent systématiquement leur territoire, des alliés allochtones ont érigé un blocage de quatre chemins de fer majeurs au sud de Montréal, qui restera en place pendant trois jours. On a ainsi appris qu’en plaçant des objets, de la neige ou nos corps sur les rails, une inspection était requise pour que les trains reprennent leur trajet.

Nous vivons toujours de l’énergie insufflée par ce moment d’occupation coupé en plein vol par la pandémie qui a montré le potentiel que portent les mouvements autochtones. Comme l’écrit l’auteure anishinabée Leanne Betasamosake Simpson, un blocage est toujours à la fois une négation de la destruction et une affirmation de la vie. Comme un barrage de castor, on peut le considérer depuis le point de vue de l’eau qu’il empêche de couler, ou bien de tout ce qui en émerge comme possibilité de vie : un grand bassin pour les poissons, des espaces pour que les orignaux puissent se rafraîchir, de l’eau tiède pour les amphibiens et les insectes. Les blocages font partie d’une tradition de réinvention de la vie en commun, de la réémergence de mondes vivables.

Cet automne, juste avant l’annonce d’un reconfinement en force du Québec et de l’Ontario, de nombreuses luttes pour l’autonomie des peuples autochtones sont réapparues, chacune enracinée dans sa propre histoire d’affirmation face à l’extractivisme, au colonialisme et à l’État.

Depuis le 19 juillet, un campement bloque un projet de développement immobilier près de Six Nations of the Grand River, la plus grande réserve autochtone au Canada, qui regroupe principalement les nations de la confédération Haudenosaunee. Le territoire, désormais appelé 1492 Landback Lane revient à la communauté selon un traité datant de 1784, ignoré par les promoteurs. Une parcelle de terre réoccupée de la même manière en 2006, Kanonhstaton (« Le lieu protégé/The protected place »), sert aujourd’hui de poste de surveillance des activités de la police. La réserve se densifie de plus en plus sur son territoire fermé et dévasté alors que la métropole de Toronto continue d’étendre sa banlieue à plus de 100 km. Étant donné que les terres de la réserve de Six Nations sont les plus polluées de la région, les luttes pour l’autonomie des Haudenosaunee cherchent plutôt à reprendre des territoires traditionnels au-delà du territoire où ils sont confinés. Dans la foulée de leur geste de réhabitation de la terre, un campement a été érigé au centre-ville de Toronto, alors qu’une autre réoccupation débutait dans la réserve mohawk d’Akwesasne.

Le 15 septembre, des pêcheurs mi’kmaqs de la Nouvelle-Écosse ont lancé leur première flotte indépendante pour la pêche au homard. Le jour même, des pêcheurs acadiens ont rappliqué sur le quai de Digby pour voler leur matériel et couper leurs lignes de pêche, tentant de provoquer des accidents de bateau ou de percer les pneus des voitures des pêcheurs autochtones. Les Mi’kmaqs demandent le respect des traités, entérinés par un jugement de la Cour Suprême du Canada en 1999, qui leur donnent le droit de s’assurer une « subsistance convenable » par la pêche hors saison. Le respect des traités, comme dans le cas de la lutte à Six Nations, est alors envisagé, non seulement comme revendication face à l’État, mais aussi comme appel aux peuples en présence à réapprendre à habiter le territoire.

Le texte qui suit porte sur un autre chapitre de cette mise en acte de la souveraineté autochtone. Dans la forêt anishinabée du Parc de la Vérendrye, nous avons été témoins et acteurs d’alliances et de prophéties qui se tissent au-delà même du monde humain. Comme le dit Shiri Pasternak dans son livre sur les Anishinabés du Lac Barrière :

« Une prophétie au lac Barrière prédit ka-dish-pog-washni, ’Dans le futur, nous sauterons haut.’ Ils ont connaissance d’un temps à venir sur terre où les tempêtes feront rage, où les tornades se déchaîneront violemment, où les inondations se répandront et où le vent secouera le monde jusqu’à ses fondations. Lorsque ce temps arrivera, des gens d’autres nations viendront aux Anishinabés et chercheront leur savoir. »

Le temps d’un mois, le temps de la saison de chasse à l’orignal, les routes - l’infrastructure coloniale qui a ouvert le territoire aux colons – ont été destituées, fermées et rendues utilisables aux seules fins de prendre soin du monde. Image simultanée d’un présent catastrophique et d’un avenir décolonial.

 


À l’automne 2019, quelques familles anishinabées du Lac Barrière et de Kitigan Zibi s’étaient installées à l’entrée des routes qui mènent aux zones de chasse à l’orignal. À l’époque, elles avaient décidé de montrer symboliquement leur désaccord et de convaincre les chasseurs de rebrousser chemin sans pour autant leur barrer la route. L’année suivante, face à l’inaction des différentes instances gouvernementales, les grands-mères décidèrent que toutes les routes devaient êtres bloquées. Certaines d’entre elles avaient vu en rêve des orignaux paniqués demander de l’aide. Bientôt, leurs enfants rouleront à des vitesses folles dans les forêts où ils ont grandi et élevé leurs propres enfants, pour débusquer et expulser les chasseurs « sportifs » que le gouvernement a élus au hasard pour abuser de la forêt anishinabée.

Après cette décision, un premier camp a été monté, puis un deuxième. Le mouvement est vite devenu viral, surtout chez les jeunes Anishinabés, qui ont commencé à déferler sur la route 117 pour monter de nouveaux camps, jusqu’à en former huit. Des membres des communautés de Lac Barrière, de Kitigan Zibi, de Kitcisakik et de Lac Simon ont participé à cet effort : toute une ceinture de communautés algonquines s’est unie avec la force d’avoir subi et de subir encore une violence génocidaire.

Dans ce mouvement de protection de l’orignal, la souveraineté anishinabée a repris ses quartiers dans son propre territoire, sans égard aux divisions arbitrairement superposées entre la Réserve faunique de La Vérendrye (gérée par la SÉPAQ), les ZECs et les pourvoiries, alors qu’il n’y a toujours eu là qu’une immense forêt anishinabée, enchevêtrée de lacs infinis. Dans la portion de la Réserve faunique à mi-chemin entre Montréal et l’Abitibi, le territoire des Anishinabés du Bassin-Versant de la Rivière des Outaouais est certainement vaste. Du nord au sud, il s’étend sur près de 300 km : de Val d’Or, capitale des minières abitibiennes, défrichées il n’y a même pas un siècle à Mont-Laurier, limite nordique des Laurentides colonisées par l’intégrisme catholique. Des deux côtés de la route 117, l’hinterland anishinabé atteint le Témiscamingue 300 km à l’ouest, tandis qu’il se départage graduellement avec le Nitaskinan attikamekw sur une distance encore supérieure vers le Saguenay à l’ouest. 

 

Lorsque l’environnementalisme détruit l’écologie

Autour du feu, des aînés expliquent plus en détail les causes récentes de la baisse du nombre d’orignaux. Il y a une trentaine d’années, pour assurer leur financement, différents groupes environnementalistes (Greenpeace et autres) avaient mené de grandes campagnes pour interdire la vente de fourrures issues de la trappe. Plus qu’un enjeu réel de protection de l’écosystème, la guerre aux fourrures cherchait surtout à provoquer l’indignation des Blancs afin d’assurer à ces organisations un flot constant de nouveaux membres et de dons. Plus ces groupes accumulaient des victoires légales contre la trappe, plus la chasse, la pêche et la trappe étaient interprétées comme des activités « sportives », et non des exigences de la vie sur le territoire. 

Lorsque le Parc de la Vérendrye est devenu une Réserve faunique en 1979, la trappe commerciale y a été interdite. Comme résultat, le nombre de castors a augmenté - et avec eux, leurs prédateurs (loups, lynx et coyotes). Cette recrudescence d’espèces carnivores a exercé une pression sur les faons (orignaux juvéniles), dont plusieurs étaient tués dans leur jeune âge, provoquant une baisse majeure de la population d’originaux à long terme. Ironie du sort pour les chantres de la « Nature sauvage », incapables de concevoir que les humains - même comme prédateurs - sont aussi partie prenante de l’équilibre d’un écosystème. Si la SÉPAQ, organe provincial qui gère la Réserve faunique, fait mine de s’intéresser au développement durable, c’est toujours pour faire durer son exploitation - ainsi pour les mines, les exorbitantes coupes à blanc et aussi les animaux tels les orignaux, « ressource naturelle » gratuite et renouvelable, à « récolter » chaque année. 

Pour protéger son extractivisme vert contre les blocages autochtones, la SÉPAQ doit parfois laisser tomber son masque de parc naturel et de camping familial. Lorsqu’il aidait les chasseurs à contourner les blocages en frayant de nouveaux chemins praticables, un agent de la SÉPAQ s’est caché dans les buissons pour filmer des autochtones qui pourraient y abattre des arbres le soir tombé et barrer la route, captant au passage les images d’une fillette anishinabée de 5 ans en train d’uriner. Le scandale a traversé les communautés, ravivant les souvenirs de sévices sexuels commis par les prêtres Canadiens-français contre les autochtones de la région, sans oublier les meurtres et attouchements commis par police provinciale plus récemment. Après une semaine de blocage, les agents de la SEPAQ ont fini par sortir les chiens pour menacer les Anishinabés, tout en orchestrant le transport d’armes pour les chasseurs, qui pouvaient ainsi prétexter vouloir entrer pour rénover leur chalet.

Après quelques semaines à menacer de renverser les Anishinabés avec leurs pick-ups pour accéder à leurs proies, les chasseurs ont organisé leur propre manifestation le 18 septembre 2020, au nom du « droit à la chasse ». Alors que des centaines de personnes étaient attendues, seuls une dizaine de chasseurs sont venus, bloquant pourtant la route 117, que les Anishinabés n’auraient pas osé obstruer vu la répression féroce que ce geste leur avait attiré en 2008, quand la SQ avait gazé leurs familles. Visiblement confus, l’un des bloqueurs anti-bloqueurs expliquait ainsi sa volonté de tuer des proies : « C’est eux, les Indiens, qui nous ont donné la tradition de la chasse, c’est à cause d’eux si on fait ça maintenant ! ». Dans les jours qui ont suivi, certains chasseurs ayant contourné les barricades ont lancé des pattes d’originaux sur les autochtones depuis la fenêtre de leur camion.

C’est qu’ils bénéficiaient d’appuis en haut lieu : le gouvernement et ses relais dans les médias n’ont jamais cessé de plaquer le « droit fondamental de tous les Québécois d’aller à la chasse ». Pour l’État, la baisse de 30% de permis de chasse émis était une concession suffisante. Maintenant c’était au tour des « Algonquins de faire leur part », le ministre de la Forêt, de la Faune et des Parcs Pierre Dufour allant jusqu’à rappeler aux « Amérindiens » qu’on « est en 2020 » et qu’il faut agir « de manière civilisée » et non pas « comme il y a 200 ans ». (Ok boomer, ta gueule.)

La protection des orignaux sur le territoire anishinabé passe par le refus de ce chantage au progrès et par l’affirmation d’une souveraineté ancestrale. Le passé revient pour défaire le futur. Afin d’empêcher que les chasseurs éteignent cette souveraineté à petit feu, les défenseurs des orignaux patrouillent les limites de leurs territoires familiaux, à plusieurs heures dans les routes de terre, pour débusquer les braconneurs. On dit que les castors, alliés de la lutte, y font aussi tomber des arbres parfois, tandis que les ours et les loups creusent des tranchées autour des postes de la SÉPAQ, les forçant à faire des détours de plusieurs heures.

Chasse à la chasse

Les Anishinabés qui vivent dans le parc de La Vérendrye ne voient pas seulement l’orignal comme une source de subsistance alimentaire, mais comme animé par une conscience à part entière. La traduction qui nous a été donnée du mot anishinabé pour orignal, kacabagonégabwec (le plus long mot de toute la langue algonquienne du Lac Barrière) le décrit comme un animal fort et majestueux dont le comportement est propre à nous enseigner comment vivre, en nous indiquant par exemple certaines plantes médicinales. Ce sont les orignaux qui ont montré aux Anishinabés comment utiliser le sapin baumier pour désinfecter leurs plaies et l’épinette noire pour accompagner les grossesses. Mais autant que les anishinabés ont toujours su que leur existence sur le territoire dépend des autres espèces qui y vivent, les colons ont toujours su que l’assimilation passe largement par l’éradication des espèces animales qui leur sont alliées.

Au XVIIe siècle, certains Anishinabés déploraient que l’avidité des premiers européens vis-à-vis des belles pelleteries avait provoqué une « guerre » entre eux et le peuple des castors, qui formait une nation distincte, tenant aussi bien des conseils intérieurs que des relations diplomatiques avec les autres animaux humains et non-humains. Autrefois, la réciprocité avec les animaux était une nécessité impérieuse et quotidienne - de laquelle dépendait leur abondance inouïe sur l’Île de la Tortue, et la survie de l’animal humain, marqué davantage par sa précarité que sa suprématie. Cette vision du monde concrètement entretenue et rendue possible par une vie où la chasse, plus qu’une subsistance, est l’enjeu suprême, - ce qu’on appelle le point de vue cynégétique, de ce qui se rapporte à la chasse - reste encore vivante sur toute la planète autochtone, de l’Amazonie jusqu’en Inde - la vraie. Elle demeure, et pourtant partout et sans cesse soumise au génocide, elle se fait rare. D’autant plus depuis qu’on mène une guerre mondiale totale contre les animaux sauvages - dont on dit que 50% auraient disparu depuis les 50 dernières années.

Le mode de vie traditionnel des Anishinabés du Bassin-Versant de la Rivière des Outaouais est basé sur les rapports propres à la chasse de subsistance. Sans bons rapports - dont certains sont personnels - avec les animaux, dont ils connaissent les familles et les repères, les penchants et les habitudes, ces derniers ne donneraient pas autant de pistes, de repères qui indiquent comment faire pour les cueillir tout en les laissant se perpétuer. Les animaux aussi se concertent et traitent avec les humains d’égal à égal. Ils nous parlent le plus souvent en rêve – rêve qui ont pratiquement force de loi chez les chasseurs et les mères anishinabés. En Amazonie, Viveiros de Castro a montré comment la pensée cynégétique distribue la culture à tous les êtres vivants, qui agissent entre eux comme nous agissons entre nous ; seule leur apparence - la nature qu’est leur corps - diffère. Entre ces différences, il est possible de traduire, de tenir des dialogues, des assemblées, mais parfois les rapports se délitent et il faut des pourparlers, pour rétablir le dialogue. En réalité, il ne faut pas se leurrer : les rapports propres à la chasse sont a priori hostiles. Ils se situent du point de vue de l’ennemi, dit de Castro. Mais ils exigent d’autant plus de tenir conseil ; ils appellent à diplomatie.

Néanmoins lorsque ce point de vue cynégétique s’applique sur lui-même comme lorsque les warriors Anishinabés chassent les chasseurs de la forêt - cette fois avec pour seule arme un picks-up et leur flair pour les traces des braconniers, dont certains sont venus en hydravion - il y a comme une boucle qui se referme. Il y a la remise en œuvre d’une vieille alliance avec les peuples animaliers, plus vieille que la guerre que les colons leur ont déclarée à tous deux. Ce qui se ravive, c’est cette alliance ancestrale entre les Anishinabés et les orignaux, ces Bisons du Nord-Est, qui leur fournissent viande, peaux et tendons ; dont tant est fait et dont toute partie doit être honorée. Une mère du clan du loup disait que si l’original venait à disparaître, ils seraient « seuls dans la forêt ». Mais on comprend aussi pourquoi le mouvement ne pouvait être que victorieux : les Anishinabés sont bons chasseurs. 

De même que leur souveraineté ancestrale se réalise à travers ces feux, ces ronds-points, où les Anishinabés se réunissent avec une mission commune, de même leurs revendications sont immédiatement remplies. Du seul fait qu’immensément moins d’orignaux auront été tués cette année, la demande d’un moratoire – refusée par le gouvernement – est mise en acte par le blocage. En cela, on peut déjà déclarer le mouvement vainqueur. Sur les barricades, personne n’est dupe de la bonne foi des dirigeants. Le moratoire de 5 ans aura lieu. Sans égard au gouvernement.

Et le territoire qui réémergera à travers le blocage sera plein de vie. Des faons auront survécu pour devenir des adultes qui en feront d’autres. Combien de colons n’ont jamais vu un original, dans un monde qu’ils ont construit contre lui ? Sur ces vastes territoires encore épargnés par les infrastructures coloniales, malgré les mines et les coupes à blanc, qu’en sera-t-il lorsque ce sera l’eau - les Anishinabés du lac Barrière se disent aussi le « peuple de l’eau » - qu’on voudra s’accaparer en métropole ? Qu’en sera-t-il quand les colons se presseront aux portes d’un des seuls endroits encore vivables, justement du fait de la durabilité de son mode de vie traditionnel ? Notre rôle pour ces temps-là commence ici et maintenant. La forêt peut enseigner ce qu’il faut pour la défendre. À nous de l’entendre.

Le septième feu

L’écrivaine anishinabée Leanne Betasamosake Simpson rapporte qu’il y a plusieurs siècles, lorsque le monde était encore florissant, sept prophètes sont venus annoncer aux Anishinabés ce que leur réservaient les siècles à venir. C’est ce qu’on a appelé la Prophétie du septième feu, chaque feu correspondant à une période historique. En premier lieu, ils sont venus avertir les habitants de l’Île de la Tortue qu’il faudrait se méfier de la violence des hommes qui viendraient d’autres continent. Si cette prophétie annoncait avec précision les horreurs et les violences que la modernisation allait faire subir aux peuples premiers, elle signalait aussi que l’effondrement du monde colonial était inévitable. Le septième feu était compris comme celui de la renaissance. Orienté par les principes autochtones de paix, de justice et de droiture que porte la mino bimaadiziwin (le « bien vivre » anishinabé), cette résurgence est appelée à transfigurer le monde colonial.

S’il nous faut être à la hauteur du rôle que nous attribuent de telles prophéties, les apprentissages qu’ils supposent se situent sur un autre plan que « la compréhension des réalités autochtones », seul objectif que le discours libéral peut arriver à imaginer. Ils nous obligent à réviser de fond en comble nos manières de vivre. Ce serait une illusion confinant à l’impuissance de penser que nous ne saurions être et paraître autrement que comme des colons illégitimes, indépendamment de « comment » nous entendons habiter ce qui reste du monde. La fragmentation en cours du territoire « canadien » en une pluralité de souverainetés ancestrales disqualifie précisément l’homogénéité d’un tel interdit. Tout un chacun est libre de fragmenter la nation depuis son propre point-de-vie - ne serait-ce qu’en défendant un bout de boisé près de chez soi -, et à partir de ces fragments de monde souhaitables, de se lier aux autres de manière à faire monde commun.


Liaisons Montréal et Comités de défense et de
décolonisation des territoires

lundimatin c'est tous les lundi matin, et si vous le voulez,
Vous avez aimé? Ces articles pourraient vous plaire :