Si consommer est devenu le calmant,
c’est que le mal est dans le remède.
Le produit paraît inoffensif, mais il s’accumule,
pénètre chaque cellule du paysage et le paysage s’atrophie…
Ça pique aux yeux, ça pique à la gorge –
pendant que la haine arrose ses plates-bandes,
les abeilles passent à l’acide.
Pouls faible des bêtes dans nos imaginaires limités aux écrans.
Qui parle ? À qui ? Dans quelle langue ?
La bétonisation tue, le goudron colle aux plaies.
Canicule durable… Destruction durable…
Le péage de l’adaptation s’affiche en lettres capitales :
PDV, Pas De Vague. A bon entendeur, salut !
Chacun surjoue la normalité et ça bouffe les forces.
Tu te retrouves à tendre les mains vers le vide qu’on te tend.
Ta vie devient un poids, alors si quelqu’un gère ça pour toi…
Tu ne sais pas quoi faire de ta vie – la dictature s’installe.
Nous voilà pris au piège de nos renoncements.
La lâcheté est une lucarne familière –
on voit mourir de loin. Miséricorde !
La gestion s’occupe du reste…
Ça brûle aux poumons, ça brûle aux paupières –
les balles perdues visent les enfants.
Qui sent l’humiliation ? Qui a honte ?
Je dis
la nature n’est pas une ressource,
la nature n’est pas un moyen pour arriver à ses fins.
Je dis fugue
ce langage farouche du corps.
Je dis aggraver nos différences,
choisir l’autre comme interlocuteur
sans jamais le réduire à un objet du discours.
Être des passants inassignables.
Je dis,
le pire c’est de s’apercevoir trop tard
que tous nos désirs sont identiques, qu’en eux
la multiplicité s’est tue – monocultures à perte de vue.
c’est ta langue qu’on discrédite – poème exacerbé,
chemin lucide irrécupérable – c’est toi qu’on assassine.
Tu perçois le temps comme micro-événements,
non comme linéarité. C’est ton courage !
Tu tentes une autre lecture des choses et des visages.
Tu décloisonnes le sensible, tu décloisonnes la souffrance.
Tu te jettes au cou du vivant et tu restes là, inséparable,
bigarré – c’est ta revendication insolente, juste et insolente.
C’est précisément ça qui dérange, que vise la répression,
c’est ce désir de se débarrasser du dogme de la pureté
et de l’impureté… de toute la morale qui en découle
avec, la sophistication des camps derrière,
la domestication des corps...
Je ne me résigne pas.
Je dis
position de la chair [1].
Juillet 2025
Natanaële Chatelain