Ne les crois pas : le champ d’honneur est une rumeur
Je suis mort fusillé, traité de « déserteur »
Personne ne le sait, mais j’étais marocain
J’ai fait la Marne, j’ai combattu à Verdun
La division marocaine a pris les Corbeaux
Puis j’en eus assez d’écouter les généraux
Non, je ne suis pas mort pour la mère patrie
Mais d’avoir voulu fuir la grande boucherie
Français ou indigènes, alboches, doryphores
Ne peut-on être frères ailleurs que dans la mort ?
En ces temps si prodigues du sang des misérables
Mourir au peloton m’a paru plus honorable
Et quand les casseurs de vies en ont eu besoin
Ils ont choisi un cadavre au hasard - le mien
Je n’avais, hélas, les moyens de protester
Mais c’est ce qui m’a permis de te rencontrer
Ne crois pas ceux qui crient à la profanation
Car c’est toujours les ânes qui mènent des lions
Qui veulent t’enlever ta carte de séjour
Pour ton geste d’amitié qui me restera toujours
Je suis bien content que ma flamme t’ait servi
Fumes-en une pour moi – ils m’ont volé ma vie
Et s’ils te volent la tienne, scandons en chœur :
Mort à la guerre, mort à ses profiteurs !
Soraya Qahwaji}}