Appel à dons #8 – Métaphysique du meilleur don

Parce qu’il faut parfois sortir de l’économie, en l’excédant

paru dans lundimatin#413, le 30 janvier 2024

Alors que nous pensions notre calendrier 2024 épuisé par son succès, nous venons d’en redécouvrir 48 exemplaires dissimulés au fond d’un carton. Nous les remettons donc sur le marché en vous invitant à un jeu qui ne reconnaîtra que les gagnants.

Oyez, Oyez. Aux trois cent premièr•es donateur•ices, le calendrier a été distribué.
Acheminé dans vos villas, vos villes et vos villages, vos hameaux, vos lieux-dits, vos cités, vos pays les plus énigmatiques et les plus reculés. Franconville, Montreuil, Ixelles, Ouistreham, Ladinhac, Malakoff, Marseille, Fécamp, Toulouse, Lyon, Crest, Brest, Bordeaux, Saint-Etienne, Le Vésinet, Cormaranche, La Vieille Loye, Paris, Draguignan, et bien d’autres dont l’énumération exigerait la minutie et le talent d’un cartographe italien du XV° siècle à la Fra Mauro. D’autant que les donateur•ices ne se limitent pas aux vulgaires frontières nationales – notre réseau est planétaire : Hong Kong, Sao Paulo, Mexico, Oaxaca et le Chiapas, New York, New Delhi, et Singapour, comme la Suisse, la Belgique, l’Ukraine, la Martinique comptent au rang de nos quelques bases arrière. On n’ose pas avouer qu’on a même reçu des dons de Russie.

Seulement, il nous reste 48 calendriers. Ce sont les derniers de l’année. 48 calendriers collectors. 48 calendriers pour les unifier tous. 48 calendriers qui entreront dans vos maisons comme dans l’Histoire. Pour ces 48 derniers calendriers, nous proposons un dernier défi. Numérotés de 1 à 48, nous avons dissimulé, en chacun d’eux, une partie, un fragment original du mot de passe à rallonge de notre boite mail. Ces 48 derniers calendriers sont donc extrêmement précieux : qui parviendrait à les rassembler tous, obtiendrait la clé qui renferme le trésor de nos communications internes, et peut-être, le plan diabolique de notre stratégie secrète pour interrompre 2027. Mais ce dernier défi ne sera pas facile à relever : car le calendrier ne sera pas envoyé aux 48 prochains dons, mais aux 48 meilleurs prochains dons. Ce sont les 48 derniers dons de l’élite financière, du grand petit capital des mauvais bougres anarchisants, les 48 dons qui les plieront tous. Autrement dit : à la fin de cette semaine, il existera 48 anonymes très chanceu•ses qui recevront un calendrier dont seul l’avenir décèlera la véritable valeur.

Mais ne vous y trompez pas : nul ne sait quel est le « meilleur » don, le don le plus élevé, le don dit « maximal », et peut-être est-il à votre portée, vous dont les poches sont trouées, peut-être existe-t-il un moyen de le définir, ce don, peut-être serez-vous (mais comment ? où ? quand ?) l’auteur•ice de la limite supérieure maximale à laquelle il faudra bien consentir que nous sommes plafonnés. Nul ne possède le critère du « meilleur don », le critère de ce qui « vaut le plus ». Chaque don plus exalté, plus fou, plus enthousiaste vient, quel qu’il soit, percer, briser le plafond de verre, le mur de cristal, la baie vitrée sous laquelle la plante verte tropicale et révolutionnaire dégorge son soleil jaune insurgé devant les limites même du ciel. Il existe, dans le flux incontrôlé des circulations décisives de la masse monétaire, un contre-flux qui le traverse, un contre-flux plus abstrait encore que la valeur abstraite du dollar et de l’étalon-or, un flux furieux de forces éthiques récalcitrantes, un contre-flux de valeurs métaphysiques d’ordre supérieur, celles d’une vie radicalement autre, suspendant le verdict nécessaire du fric et son économie, d’une vie, quoi ?, qui se sait non-soumise à la pression coupable de la Dette, à la poursuite effrénée du Caviar des jours, à la conquête minable de ce Néant pris pour la proie du Profit dont il n’est même pas l’Ombre : il est une plus-value de vérité gargouillant à contre-courant du wasserfall blond de la fausse valeur – cette plus-value est notre résistance. Le meilleur don, le plus élevé, le plus coûteux, n’est peut-être pas celui qu’on croit.

Nous n’avons jamais dit clairement qu’un don devait être pécuniaire - parfois nous nous faisons des dons qu’aucun calcul ne fait pur et simple pécule. Plus les échanges de dons et contre-dons se distribuent selon des sphères vivantes, affectueuses, tendres ; plus c’est le monde qui croît et non plus le désert. Il s’étend non plus sur le plan des seules numérations, mais sur celui des lieux, des camions-bennes, des boites à pizza, des coups de force, des textes, des cambriolages, des cabrioles, des cabriolets, des grands hauts faits de manif, des derniers tips de courses à l’hippodrome, des bouquets de fleurs végétales composés, des meilleures chaux vives, des bouts d’albâtre, des outils et des armes, des parties de foot, des rigolades, des cinémas, des danses nocturnes, des carnavals, des zèles de bureau, des mille et une punchlines redoutables, des temps, des durées et des blagues - rencontres, bêtises orchestrées à plusieurs, assauts divers agricoles, explosions collectives de sympathies et de sarcasmes, critiques véhémentes et vérités véloces jetées à la tête des corps arraisonnés aux écrans, bouts de pain et bouts d’ongles, de poils, litrons de suées lors d’autres labeurs, éclats brefs de lumière quand la fenêtre est claquée par le vent, débris, bris, braises et pensées serties d’idées confuses.

Rendez-vous sur notre plateforme de financement helloasso : ici

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