Trump Catch Machine

Dork Zabunyan

paru dans lundimatin#260, le 25 octobre 2020

Dans Fictions de Trump - Puissances des images et exercices du pouvoir (paru aux éditions du Point du Jour), le professeur d’études cinématographiques Dork Zabunyan tente d’imaginer les conditions qui pourraient présider à l’élaboration d’un film sur le 45e président états-unien. Pour ce faire, il explore certaine oeuvres cinématographiques antérieures réalisées autour d’autres figures majeures du pouvoir telles que Silvio Berlusconi ou Nicolae Ceaușescu, mais après avoir analysé le rapport boulimique de Trump aux médias, l’auteur démontre en quoi une certaine dénonciation de la vulgarité du président milliardaire relève de la paresse critique et ne permet pas de comprendre la puissance de l’image qu’il incarne. Coup de la corde à linge et saut de la 3e corde.


Exemplaire nous paraît le discours prononcé par l’actrice Meryl Streep recevant le prix Cecil B. DeMille lors des Golden Globes en janvier 2017. Nous sommes alors dans l’après-coup de l’élection de Trump, et le pays peine à mesurer les effets d’un résultat qui était encore insoupçonnable quelques semaines plus tôt. Meryl Streep profite de ce contexte pour proposer devant ses pairs une défense sans voile de la diversité ethnique de la nation américaine, selon elle dangereusement menacée, et que le cinéma hollywoodien incarnerait de mieux en mieux, surtout si l’on considère les origines de ses stars actuelles. Ainsi s’affirmerait « l’art » fondamental de Hollywood : mettre en valeur cette diversité et incarner la substance du rêve américain – l’unité de la nation dans la pluralité de ses composantes et sa résistance face à toutes les adversités. Pour l’actrice, nous serions au seuil d’une véritable bataille culturelle dont dépend, ni plus ni moins, la survie de cet alliage entre le grand art cinématographique et la persistance d’une civilisation comme agrégat de communautés hétéroclites.

Spectacle et justice immanente

Que deviendrait l’Amérique si cette bataille devait être perdue ? C’est là où la réponse de Meryl Streep devient embarrassante, même si elle n’illustre finalement qu’une condamnation du trumpisme amplement partagée, et sans effet aucun sur les partisans d’un leader à propos duquel on nous exhorte à ouvrir les yeux. L’entreprise de démystification auquel elle se livre repose elle-même sur une mystification qui pose sans le savoir une hiérarchie des goûts et des intelligences. Pour l’actrice américaine, en effet, si le Hollywood qu’elle défend venait à disparaître, il ne nous resterait plus qu’à regarder « du football et des arts martiaux mixtes [mélange de lutte gréco-romaine et de boxe], lesquels ne sont pas de l’art ! » La référence à ces sports ne doit rien au hasard, car elle renvoie à une culture populaire qui mobilise un public probablement composé en bonne partie d’électeurs de Donald Trump, une culture vile ou basse dans l’esprit de ses contempteurs, qui ne saurait en conséquence se mesurer à la noblesse du grand cinéma hollywoodien. On l’a brièvement mentionné plus haut, Trump s’est d’ailleurs illustré sur une scène qui se rapproche des « arts martiaux mixtes », la fantaisie de l’imitation extravagante en plus : le ring de catch. En 2007, il participe en effet au « match des milliardaires » à Detroit, où s’affrontent par procuration son catcheur favori et celui d’un autre milliardaire, Vince McMahon, qui a établi sa fortune grâce à l’organisation des matchs de catch. Au début du spectacle, les deux hommes se retrouvent près du ring, comme s’ils étaient deux entraîneurs en train de « briefer » leurs équipes respectives. Très vite, Trump se rue sur McMahon, le jette à terre et, en bon apprenti catcheur, fait semblant de lui donner des coups au sol. Puis il se relève, le visage grimaçant, un poing rageur fendant l’air en un geste de victoire tandis que le public se manifeste bruyamment comme il est d’usage lors des matchs de catch.

On pourrait repérer la transposition de certains gestes de Trump d’une situation spectaculaire à une autre, et en l’occurrence de ce mouvement du poing, exprimant la détermination du catcheur, repris et amplifié lors d’un meeting électoral où il servait à rythmer, comme un signe présumé d’abnégation politique, un discours fleuve assez incohérent. Le problème nous paraît surtout se situer au niveau d’un malentendu coupable, qui manque précisément ce qui fait la force de l’imagerie de Trump, quel que soit notre mépris éventuel pour le catch ou les arts martiaux mixtes. Négativement, la prise de position de Meryl Streep consolide une hiérarchie de valeurs entre une culture supposée « basse » et une autre qui serait forcément « haute », hiérarchie qui proroge finalement une distinction socioculturelle en la naturalisant : d’un côté, une humanité éclairée, celle du meilleur de Hollywood que représente Streep ; de l’autre, une soushumanité, gavée aux sports de combat (ou au football, au jeu vidéo, etc.). Soit le haut du panier hollywoodien opposé à ce « panier de gens lamentables » (« basket of deplorables ») selon l’expression employée par Hillary Clinton pour qualifier les partisans de Trump, et qui lui a considérablement nui, à juste titre, durant la campagne présidentielle de 2016. Il est possible d’éprouver à titre personnel la supériorité d’un film produit par Hollywood (par exemple Sur la route de Madison, de Clint Eastwood, où Meryl Streep a joué en 1995) sur un match de catch des années 2000. Le mal consiste simplement à le dire de façon ostentatoire, en reconduisant un mépris culturel envers les goûts présumés d’une partie de la population, dans la satisfaction d’un constat sans appel qui rend d’autant plus inaudibles les soixantesix millions d’électeurs de Trump en 2016, déjà perçus comme une « majorité silencieuse » dont l’actuel président américain prétend être le portevoix.

Là réside le malentendu fatal, la mésentente coupable. Pourtant, positivement cette fois, le « match des milliardaires » peut offrir d’abondantes prises pour un cinéaste qui voudrait faire un film sur Trump en vue d’en retourner l’image. Ce match de catch représente en effet un matériau visuel inestimable, neuf ans avant son élection, pour tenter de comprendre sa manière insaisissable de gouverner. D’où la nécessité d’aller y voir de plus près, d’enquêter sur le corps de Trump en train de s’adonner au catch devant des millions de téléspectateurs, et d’essayer de mettre au jour la continuité qui ajointe ensemble l’homme de spectacle qu’il a toujours été et l’homme politique qu’il est devenu. D’une certaine manière, nous reconnaissons ici la « morale modeste » entrevue par Daney chez Fellini : à la fois une forme de réserve à l’égard d’images hautement suggestives, même si elles nous dégoûtent, et une certaine bienveillance envers une production pour beaucoup repoussoir [1]. Il ne s’agit pas d’une complaisance qui ne dirait pas son nom. L’approche dite « modeste » fonctionne plutôt ici comme un masque : le masque de la modestie qui offre au geste critique une condition de possibilité en vue d’affronter une imagerie dont la vulgarité est potentiellement désarmante pour celles et ceux voulant la dénoncer. Le discours de Meryl Streep, aussi bien intentionné soitil, reste trop prévisible en raison de son immodestie presque insouciante. Le catch n’est peutêtre pas un art mais il constitue un réservoir inappréciable de gestes et d’attitudes pour comprendre la figure de Trump et tenter de la défaire avec les moyens du cinéma.

Dans cette optique, un crochet par les Mythologies de Roland Barthes peut s’avérer nécessaire. Le premier texte de ce volume, publié en 1957, est justement consacré au catch. Intitulé « Le monde où l’on catche », il s’agit d’une investigation attentive, non dénuée d’empathie, sur les affects qu’un tel spectacle suscite chez ses spectateurs. Plusieurs passages permettent, par ricochet, de mettre en valeur quelques traits décisifs de la personnalité de Donald Trump au pouvoir, et nous autorisent à tracer des liens à peine souterrains entre le catcheur amateur de l’année 2007 et le candidat qui se lance dans la course à l’investiture suprême en 2015. Le premier point a trait à la dimension fondamentalement spectaculaire du catch qui, comme le note Barthes avec une fascination sensible pour son objet, n’est pas un sport au même titre que la boxe ou le judo. Ici, le spectacle est celui d’un excès de tous les instants, mais d’un excès raisonné, qui mime ce que l’écrivain appelle une « amplification rhétorique ». Ainsi, « l’emphase des passions » ou « l’exaspération des répliques » font du catch un spectacle authentique, voire même le spectacle des spectacles, au sens où il conquiert le spectaculaire dans une forme brute, sans circonvolution ni narration en surplomb : une sorte de « pantomime immédiate, infiniment plus efficace que la pantomime théâtrale, car le geste du catcheur n’a besoin d’aucune fabulation, d’aucun décor, en un mot d’aucun transfert pour paraître vrai [2]. » Exagération et maîtrise dans un même mouvement : voilà bien deux caractéristiques du catch que l’on retrouve dans les façons de gouverner de Trump qui, en professionnel aguerri de l’information de masse, calcule les effets de ses propos souvent empreints de fureur et, par ce calcul, transforme la moindre de ses interventions publiques en spectacle. Ainsi, renommer la maladie du nouveau coronavirus avec l’expression « kung flu » (« flu » désignant la grippe en anglais) est une aberration sémantique destinée à satisfaire son électorat extrémiste – avec Trump, même le racisme devient un spectacle.

Un autre trait saillant du texte de Barthes permet d’approfondir le spectaculaire trumpien ainsi entendu. C’est que l’enivrement suscité par le catch auprès du public ne provient pas seulement du fait qu’il est un spectacle où coexistent le contrôle et ce qui paraît lui échapper, ce qui excède tout contrôle ; il relève pour ses fans d’une intelligibilité sans faille. Barthes est sans équivoque sur ce point : le catch nous propose des corps qui se battent, s’écharpent, parfois au seuil d’une expérience qui se rapproche de la torture. Cependant, ces corps grimaçants, suppliciés, sont perçus avant tout comme des images : « Frotter rudement le museau de l’adversaire impuissant ou racler sa colonne vertébrale d’un poing profond et régulier, accomplir du moins la surface visuelle de ces gestes, le catch est le seul sport à donner une image aussi extérieure de la torture. Mais ici encore, seule l’image est dans le champ du jeu, et le spectateur ne souhaite pas la souffrance réelle du combattant, il goûte seulement la perfection d’une iconographie. Ce n’est pas vrai que le catch soit un spectacle sadique : c’est seulement un spectacle intelligible [3]. » Là encore, tout est affaire d’équilibre entre des contraires manifestes, car cette intelligibilité des émotions que délivre le catch est elle-même à saisir dans une sorte d’excès, puisque « tout signe doit [y] être excessivement clair, mais ne doit pas laisser transparaître son intention de clarté ». Nous retrouvons là l’une des composantes des énoncés de Trump, dont l’efficacité réside dans une simplicité radicale du discours, un excès d’intelligibilité qui conforte sa base dans le ressentiment qu’elle éprouve envers les manières de parler fatalement compliquées des « élites » du pays (intellectuels reconnus, dirigeants du parti démocrate, responsables institutionnels…). La pauvreté volontaire des phrases écrites ou prononcées par Trump entre ainsi en résonance avec le « spectacle intelligible » du catch qu’apprécie probablement une bonne partie de ses électeurs. Mépriser les images du catch, comme le fait Meryl Streep dans son discours maladroit des Golden Globes, c’est manquer ce qui fait la force de l’action d’un Trump sur son public, que celuici soit téléspectateur, suiveur et fan du président sur Twitter, ou encore supporter d’arts martiaux mixtes.

Cette action trouve dans le spectacle du catch une troisième caractéristique, qui découle directement des deux premières. Elle concerne, cette fois, l’expérience d’une justice immanente que ce spectacle donne à voir, et qui rencontre aussi bien la dialectique du Bien et du Mal que la relation toujours tourmentée, à la limite de la légalité, que Trump entretient avec la loi. Barthes propose à ce sujet des analyses dont les usages aujourd’hui peuvent être d’une grande sagacité. D’après lui, le catch est la mise en scène d’un destin irrémédiable qui affecte ses combattants de l’extrême. Dans le prolongement direct du premier trait énoncé plus haut, celui d’une exagération des gestes toujours contrôlée, et suivant une comparaison avec l’activité théâtrale, Barthes soutient que « cette fonction d’emphase est bien la même que celle du théâtre antique, dont le ressort, la langue et les accessoires (masques et cothurnes) concouraient à l’explication exagérément visible d’une Nécessité ». Cette « Nécessité » a essentiellement à voir avec l’expression des passions les plus intenses (déloyauté, trahison, etc.), ainsi qu’avec la façon dont elles placent le catcheur au seuil du cadre de la Loi : de fait, ces passions peuvent le faire basculer hors de ce cadre et former un puissant vecteur de son non-respect. Comme l’écrit Barthes, dans un passage inspiré où l’amour du catch rencontre le plaisir du texte : « Pour un amateur de catch, rien n’est plus beau que la fureur vengeresse d’un combattant trahi qui se jette avec passion, non sur un adversaire heureux mais sur l’image cinglante de la déloyauté. » Avant de rappeler le type de justice qui en découle, son « mouvement » inexorable vers la loi du talion : « Naturellement, c’est le mouvement de la Justice qui importe beaucoup plus que son contenu : le catch est avant tout une série quantitative de compensations (œil pour œil, dent pour dent). » C’est pourquoi, aussi, cette « Justice » est toujours « le corps d’une transgression possible ; c’est parce qu’il y a une Loi que le spectacle des passions qui la débordent a tout son prix [4] ».

Là encore, c’est un aspect décisif des arts martiaux mixtes en général, et du catch plus particulièrement, que le discours condescendant de Meryl Streep manque sur au moins deux fronts : le rapport à la justice que Trump y puise, même malgré lui, comme l’adoration de ses électeurs disposés à soutenir un homme qui a presque toujours un pied dans l’illégalité. « La perfection d’une iconographie » produite ainsi par le catch, sur le terrain de la représentation d’une justice toujours sur le point d’être transgressée, nous paraît correspondre éminemment à l’image « antisystème » que Trump entend véhiculer de lui-même. À l’entendre, il se trouverait encerclé par les médias mainstream où la pensée « libérale » de gauche, elle aussi dominante ; un homme qui reçoit tous les coups, mais est déterminé à les rendre un à un. En résulte une mise en scène de soi où la gestuelle d’une pugnacité débridée côtoie la victimisation surlignée d’un homme qui se fera justice lui-même, au risque de paraître hors-la-loi. Barthes le dit très bien quand il parle du public d’un combat de catch : ce que les spectateurs condamnent à tout prix, « c’est le défaut de vengeance, c’est le défaut de pénalité ». Il en est de même des adorateurs de Trump, dont l’excitation frénétique devant leur héros est semblable à celle palpable autour d’un ring : « Rien de plus excitant pour la foule que le coup de pied empathique donné à un salaud vaincu. » Le « salaud vaincu », ou à abattre ; dans le cas de Trump : la presse, un intellectuel, un artiste, un procureur, un opposant quel qu’il soit. Surtout, cette justice au premier degré achève de transformer le catcheur comme l’autocrate en une sorte de divinité, figure incontestée et incontestable qui préside dans les esprits à la séparation du Bien et du Mal. Moment où le spectaculaire et le transcendant se rejoignent dans un agencement d’autant plus redoutable que son verdict s’impose de façon limpide : « Nul ne peut douter que le catch détient le pouvoir de transmutation qui est propre au Spectacle et au Culte. Sur le Ring et au fond même de leur ignominie volontaire, les catcheurs restent des dieux, parce qu’ils sont, pour quelques instants, la clef qui ouvre la Nature, le geste pur qui sépare le Bien du Mal et dévoile la figure d’une Justice enfin intelligible [5]. »

Passage admirable, qui devrait nous prémunir contre toute posture de mépris à l’égard de cette culture populaire qu’est le « monde du catch » aux États-Unis. Un film sur Trump pourrait y récolter des détails corporels ou spirituels significatifs pour tenter de façonner à l’écran le personnage d’un individu aussi insaisissable. Dire qu’il reste le maître des cérémonies médiatiques, que nul ne lui résiste sur un plateau de télévision, ne suffit pas à l’élaboration d’un synopsis cinématographique. Il faut persévérer dans l’exploration iconographique de cet inimaginable en politique, dont Trump est l’un des symptômes majeurs, comme Berlusconi l’a été avant lui, et d’autres le seront après lui, dans le contexte actuel d’expansion de gouvernements autoritaires prétendument « antisystème ». Le texte de Barthes consacré au catch nous oblige, d’une certaine manière, à affiner notre investigation visuelle et sonore d’un être qui peut relever, en outre, de ce que Michel Foucault appelle un « monstre politique ». C’est un point que nous avons simplement évoqué dans la partie consacrée aux mécanismes d’érotisation du pouvoir, quand mention a été faite de la nécessité de brancher la science politique sur un examen tératologique des gouvernants qu’elle prend pour objet. Il ne s’agit plus maintenant de se situer au niveau d’un amour pour le pouvoir, mais de donner un aperçu de cette science des monstres en politique, en gardant en tête que cette exploration a pour but d’esquisser des possibles cinématographiques susceptibles de renverser l’image de Trump en nous.

La pornographie trumpienne, on l’a vu, rencontre l’une des énigmes suivantes : comment une action politique faisant appel à l’une des formes les plus aiguës de la cruauté issue de la logique néolibérale (le fameux « You’re fired ! » de Trump) peut-elle malgré tout recevoir le soutien d’une majorité de gens qui la subissent au quotidien ? Il serait possible de redoubler ce questionnement par un autre, qui se situe cette fois sur le terrain de la « justice immanente » que nous venons de signaler dans le texte des Mythologies. Car un leader politique comme Trump combine en vérité deux figures antagonistes que Barthes dissocie dans sa description du « monde où l’on catche ». Si Trump peut être perçu par ses défenseurs comme le justicier qui pointe les « défauts de loyauté » et organise le « coup de pied empathique donné à un salaud », son mode de gouvernement correspond tout autant à celui de ce « salaud » que les spectateurs de catch feignent d’avoir en détestation. Mais qui est ce « salaud » exactement ? « C’est un homme imprévisible, donc asocial. Il se réfugie derrière la Loi quand il juge qu’elle lui est propice et la trahit quand cela lui est utile. » En ce sens, il s’agit d’un être « essentiellement instable [6] ». Peut‐on trouver meilleure définition d’un dirigeant comme Donald Trump ? Voilà un président hiératique qui met le plus souvent son intérêt personnel avant l’intérêt du pays qu’il est censé servir, et qui s’arrange avec la loi voire s’en affranchit clairement, que ce soit pour attaquer ses opposants ou pour défendre ses amis politiques. Ce qui a fait, en quelque sorte, du conflit d’intérêts un mode de vie : les fils Trump ont poursuivi la gestion de l’entreprise familiale sous la bénédiction du père « commanderinchief », comme les héritiers de Berlusconi avaient repris son empire alors qu’il était président du Conseil. L’attrait du catch pour Trump se loge certainement dans cette instabilité de comportement qui joue et se joue de la loi, dans l’optique, toujours, de ne pas perdre la face, de sortir vainqueur d’un combat contre un ennemi réel ou fabulé.

Le monstre politique aujourd’hui

Si l’on reprend les éléments de la démonstration de Barthes, il est possible de soutenir l’idée selon laquelle Trump réunit en une seule personne les deux combattants qui s’affrontent sur un ring de catch : celui qui est présumé défaire le « défaut de pénalité » et celui supposé recevoir de plein fouet cette dernière ; le maître des « compensations » et le réceptacle de la vengeance souveraine ; le « justicier » et le « salaud » ; en définitive, l’image sublimée de Trump d’un côté, sa réalité effective de l’autre. Cet individu « imprévisible », « instable », « asocial » bien qu’au sommet de l’État, c’est ce que Michel Foucault nomme un « monstre politique ».

[1Voir Serge Daney, à propos de Ginger et Fred, dans CinéJournal, Paris, Cahiers du cinéma, 1986, p. 312.

[2Roland Barthes, Mythologies (1957), Paris, Le Seuil, 1970, respectivement p. 21 et 17.

[3Roland Barthes, Mythologies (1957), Paris, Le Seuil, 1970, respectivement p. 21 et 17.

[4Ibid., respectivement p. 14 et p. 20.

[5Ibid., p. 22-23.

[6Ibid., p. 22.

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