Balises pour météo tempétueuse

Patricia Ferrara

paru dans lundimatin#423, le 19 avril 2024

ton cœur se soulève
allégresse
ou écœurement
égarement dans une forêt de signes apocalyptiques
garder la pause
ne pas se soumettre
posture imposture
posturer

pause

allé, allé
regarde
ça vacille
ça chavire
ça se met en branle
ça
déborde
indispose
pas par toi
doit pas passer
on fait la chaîne
main dans la main
pas avoir peur
aboyer
hurler au loup
fringante fringale
qui nous tient éveillée
fringale de vie bonne

pause

c’est par où,
allo, allo
c’est par où
regarde là
dans le présent
peut-être juste dans le creux du présent
y-pas-le-choix
entrer dans un mouvement d’incertitude
bras d’honneur
aux honneurs
dévastés
nous je
ne voulons pas
veux pas de ce désastre
dévastation
alors haut les cœurs
pas de pierre
tout tendre
tout tendre
les mains, les bras,
et étendre le pas
vers l’horizon juste là
dans un regard
oui cet horizon là

pause

pas baliser

pause

tout doux tout doux

pause

envisager le pire et surtout le meilleur
une voie qui s’ouvre vers un ailleurs dansant
nos imaginaires engourdis s’ébrouent
il y a cette transe qui nous parcours
allé, allé

pause

non d’un chien
que l’exaltation a du bon
c’est une absence
un grain de fantaisie
ou de folie
qui au jour le jour
nous aide à tenir
tenir ce n’est pas s’accrocher
non tenir de l’intérieur
aie, aie, aie

pause

il faudra remonter le cours des choses
loin très loin
plus loin que nos souvenirs
sous la voûte du temps
sous la terre ensevelie
couches enfouissements sédimentés
des histoires que plus personne ne connaît
et pourtant

inspire expire et pause ensemble

si tu es pris de vertige
c’est tout bon
en toi ça se dépolarise
plus d’assise de point d’ancrage
résolument ça flotte
le monde tangue
en quête d’un nouvel équilibre

pause

aller dans les bois
voir le cul blanc des chevreuils effarouchés
qui cèdent la place
pardon
de vous déloger
de vous éloigner
ce serait extraordinaire de bondir comme vous sans entrave
et là
dans ces bois
vestiges d’avant la prise de terre
des hommes
s’allonger
respirer l’humus
en croix
des bras de tout
opposer à l’emprise
un corps désarmé
face à tant de modeste beauté
merci
pour le tapis de feuilles mortes
pour la mousse les ronces
le parfum de terre humide
je me recompose des contours
sauvages ensauvagés
absurde pour qui ne veut pas faire connaissance
s’incliner
abdiquer
faire corps

pause

îlot, refuge pour eux
chevreuils sangliers et tant d’autres
et en cet instant
pour moi aussi
un abri
refaire surface
à la surface
la vie est là
tapis dans l’ombre
dans la verticalité des chênes
dans le pourrissement d’une souche
et les oiseaux donnent une voix à l’air

ne rien vouloir d’autre
que faire partie de ce mouvement
ça se fait se défait
apparaît
disparaît
sans autre mission que de prolonger la vie
halte aux attitudes mortifères
et vive le peuple des bois

s’ébrouer
pour se débarrasser de ces parasites
aboyer encore une fois au loup
c’est de lumière dont nous avons besoin
et gloire à tous les flacons

Patricia Ferrara
03/03/2023

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