Courrier des lecteurs

Lettre de menaces « à l’ancienne génération »

paru dans lundimatin#54, le 30 mars 2016

Un lecteur de lundimatin nous a communiqué ses impressions sur les journées qui viennent.

Tolbiac, 17 mars. L’assemblée qui devait se tenir après la manif est interdite. 150 personnes pénètrent par la ruse dans un amphi. La présidence fait son travail. Les flics rentrent casqués dans l’amphi pour virer les gens, résistance, tabassage, flaque de sang devant l’université.

Tolbiac, 21 mars, la même assemblée réunit 400 personnes, et décide de se prolonger dans l’action. Un cortège sauvage de 200 personnes s’en prend à un local du PS (« Fin du PS, naissance de notre force »), manque de renverser une voiture de la RATP, attaque toute banque à portée de pavé.

Lycée Bergson, 24 mars. Sur le blocage, un lycéen de 15 ans lance un œuf sur la police. Mis à terre, un flic le relève, le tient, et froidement le met chaos. Mâchoire brisée. La vidéo tourne à fond.

Lycée Bergson, 25 mars. Beaucoup de monde devant. Sans prévenir : manif, au pas de course. « Au commico ! » Les deux commissariats les plus proches sont attaqués avec les moyens du bord. Devant le second, il y a un chantier. Pierres, pelle, carrelage, étai utilisé comme bélier, bouts de ferraille, poubelles, barrières : la liste est longue de tout ce qui vient lui fracasser les vitres. Et ça continue. À midi pile, deux Franprix sont envahis et délestés de quantités de friandises. À ceux qui ne sont pas d’accord, quelqu’un répond : « Pour partir à la guerre, faut prendre des forces ». À ceux qui ne voient là que rapacité condamnable, il faut raconter qu’un certain clochard de Stalingrad a cru rêver en s’éveillant au milieu des victuailles que le cortège a déposées pour lui. « On est des Robins des bois ! »

Place des Invalides, le 24 mars. Au point de dispersion d’une manifestation morne, syndicale et fliquée, un cortège sauvage de quelques centaines de personnes parvient à s’ébranler en plein quartier des ministères, prenant le trajet officiel à contre-courant, en gueulant « Tous à l’Assemblée ! » Des syndiqués nous regardent passer et nous lancent : « On est avec vous ! » On leur répond : « Alors venez, c’est maintenant ! » Ils continuent à regarder.

Partout en France, des gares sont envahies, des lycées bloqués, des amphis occupés. On en oublie. À Rennes, c’est la deuxième manif hebdomadaire qui vire à l’émeute. À Nantes, la troisième.

So what ?

Une certaine jeunesse démontre qu’elle est prête à se battre dans la rue, et ça va continuer.

Le 31 mars est annoncé comme un moment-clé, avec une bonne foi variable. On sait qu’il faudra plus et mieux qu’une affluence record pour faire plier le gouvernement.

Vous choisirez de faire quoi, ce jour-là et ceux qui suivront ?

De venir défendre, soutenir, ou même grossir les rangs des combattants de rue ? Ou de rejoindre le Service d’Ordre de la CGT, et tous ceux qui ne pensent qu’à corriger façon Bergson les jeunes qui ont la rage ? Vous allez faire la grève jusqu’au bout, « jusqu’au 32 mars », ou vous borner à faire les guignols, une fois de plus, comme tant d’après-midi tristes, avec des fanions et des tracts ?

Se contenter de revendiquer quand on peut prendre et obtenir, c’est un choix politique. Celui de la conciliation conservatrice, rien de nouveau. La différence étant qu’aujourd’hui, ceux qui le feront devront être traités en ennemis. Les organisations de gauche sont attendues au tournant. Si le 31 s’avère, comme c’est prévisible, une vaste foutaise sans lendemain, chacun en tirera les conséquences qui s’imposent. Un mouvement amorcé aux côtés des organisations devra alors ajouter aux objectifs qu’il se donne de les anéantir, purement et simplement, comme des obstacles sur le chemin de ce qui a commencé et que nous ne pouvons pas trahir.

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