(Novembre 2001, en écoutant France-Info)
Mon Nom est InfoX. Je suis la reine des ondes de choc. Je règne par-delà Vérité et Mensonge, dans un monde d’Images et de Folies. Je façonne Consciences et Inconscients. J’aime être chez toi, même en modeste bruit de fond. Ma Science du Ressassement est innée, chacun de mes coups de marteau cloue les épines de mon irrémédiable Actualité dans ton Rêve. Je suis une Schizophrène insoupçonnée. Je puise toute mon Energie dans l’Evènement que je propulse à la Lumière du jour. Je me sens partout chez moi, oui, je me sens partout chez moi, surtout chez toi. J’ignore tout de l’Enfance. Mon Nom est InfoX.
Aaaaah, enfin libre, ma chère petite vaisselle récurée, pas de rapport salarial en vue pour ce jour, si je regardais à travers la fenêtre ? Les Monades n’ont point de fenêtres, par lesquelles quelque chose y puisse entrer ou sortir. Fidèles au poste, les apprentis de la Charcuterie Poupinet, bras croisés sur le rebord de la fenêtre, les 3 apprentis-charcutiers dans leurs blouses sur lesquelles le sang sèche tètent chacun un gros joint, nourrissons avides, 1 enfant malien de 13 ans tué par l’explosion de l’obus avec lequel il jouait , les 3 apprentis-charcutiers isolent et traquent des yeux les jolies filles qui passent 2 étages plus bas, 5 pour moi, coup de filet policier, 5 fusils à pompe, 1 pitbull, 123 armes blanches, 7 interpellations , oh si j’allais sur le balcon, mon beau balcon, m’accouder à la balustrade rouillée, risquer la chute finale, et moi aussi regarder, regarder à en crever, jolies filles et jolis garçons, belles autos et affreux cabots, et surtout tenter de faire mien le sens du mouvement, le sens du mouvement du monde, le sens du mouvement du monde en lutte contre son autophagie, la Floride n’a toujours pas pansé ses plaies.
Mais, nous devons l’apprendre pour le savoir, une ville sans plaie est une ville morte.
Le couloir que je dois emprunter pour me rendre dans le salon ouvrant sur le balcon, le couloir est envahi par des milliers de sacs plastique vantant les plus grandes marques du monde, j’adore le bruissement qu’ils émettent quand je les foule de mes pieds nus, j’adore leurs caresses la nuit sur mon corps nu quand ravagé par l’insomnie je vais boire un verre d’eau dans la cuisine, le plus petit avion de tourisme s’écrasant dans la plus petite piscine de stockage de combustibles irradiés du centre de retraitement de la Hague égale 67 Tchernobyl , nous ignorons ce que cela signifie, passons outre cette terrible sensation de vivre dans un monde qui n’existe déjà plus, j’ai toujours l’impression d’être une aristocrate oisive quand j’ouvre la porte-fenêtre donnant sur le balcon, système Crotale de surveillance, j’ai toujours rêvé d’enfiler un préservatif fantaisie à un missile sol/air, ou même oh oui à un simple serpent à sonnette, mais je ne l’ai jamais fait, faute de posséder missile ou serpent, je ne connais rien de plus exaltant que de m’accoupler avec ces êtres et ces objets qui savent décocher la mort aussi simplement qu’un sourire commercial, oh ce cauchemar de boucan automobile, oh ces roquets aboyeurs, les 3 apprentis-charcutiers sourient, ils sont mal rasés, ils doivent être sales, je n’irai pas acheter mon pâté là-bas, non, je n’irai pas acheter du pâté là-bas, non, pour rien au monde, même pas pour la fin du monde, j’ai mal au ventre rien qu’à l’idée.
L’idée, c’est que je suis le personnage.
Oooooh, la vie abjecte !
Garé sur le parking immense entourant la dernière colline autorisée aux oiseaux, l’œil sur le rétroviseur où deux amants fugitifs forniquent dans une vieille coccinelle comme des sardines en boîte.
1400 immeubles mis à prix 3 milliards d’euros.
Il faut que j’aille me faire tester.
Et au cœur de ma rêverie je vis tout homme expulsé de tout rêve.
Aristote a écrit que l’homme est un animal politique,
Hobbes a écrit que l’homme est un loup pour l’homme,
Des milliers d’autres ont écrit que l’homme était ceci ou cela,
Et nombre de constitutions ont décrété que l’homme était un citoyen, (assujetti à des devoirs, jouissant de droits) :
Moi, mon heure a sonné d’écrire que l’homme est :
Un animal abject.
Et si ni vous ni moi ne savons pourquoi, ils vont tous bénéficier d’un plan d’épargne personnalisé , en arrachant notre cuirasse publicitaire, en torturant notre viande faisandée, en titillant nos nerfs à vif, en grattant nos os trafiqués, vous comme moi savons en quoi l’homme est un animal abject.
Otage de la mort détestant son existence,
Otage de l’existence détestant sa mort :
Et bicéphale à tout instant, et monstre en indétermination, pouah, enfin oui : l’homme est un animal abject et cette affirmation est le tas de fumier sur lequel repose désormais la vigueur de toute utopie.
Et l’utopie comme parasitage de l’ici maintenant, mutation de l’ici maintenant, ici, maintenant.
A Drouot, un boulet de canon provenant de la bataille de Waterloo mis à prix 305 euros.
Ne t’allonge pas sur n’importe quel divan si tu veux rimer avec vivant.
Les amants ont depuis longtemps déserté le rétroviseur.
C’est un exercice militaire multinational dans le désert égyptien et l’ennemi est en carton-pâte , ma télévision est en viande hachée pétrifiée et plastifiée, je ferme les yeux pour échapper à mon autoportrait : poète écrivant avec un scorpion trempé dans un flux d’ondes délétères.
Dans la bodega bourgeoise où bouillonne une soupe latino, trop de décibels, 2 jeunes filles relatent et commentent les comportements normalisés des figurants traversant le catalogue de leurs amours virtuelles, il fait encore très chaud à l’intérieur du tunnel du Gothard , elles lèchent à tour de rôle une cuillère de glace à la framboise , les pompiers ne sont pas encore arrivés au cœur du sinistre , moi non plus, habitue-toi à devenir un rescapé de toute catastrophe dont tu n’auras pas été la victime immédiate.
Elles s’amusent avec des illusions aux allures d’horizon clôturé, et ensuite ce sera le gros objectif .
Le seul rêve désormais que tout objet cesse de fonctionner et s’anéantisse dans la sueur des survivants et dans les larmes des condamnés.
Pas de réalité, pas de rationalité, pas de fiction : la survie dans le langage à travers un inachèvement ontologique absolu, contre toute fin élue dans l’hypermarché des fins imposées, avec pourtant une source, avec pourtant une perspective, moins 2,6% .
Une simple chute dans l’étonnante présence au monde ressuscitée, avec de plus en plus insistant le sentiment très léger que le monde n’existe déjà plus, que nous nous contentons simplement de faire semblant de nous agiter dans les panoramas comme dans les détails de ses images résiduelles, contracture de la cuisse, les lanières de calamars ressemblent à des pictogrammes, des flammes jaillissent de mes narines quand je m’essaie à penser.
Des squelettes s’agitant comme des hamsters dans la grande roue de la persistance rétinienne.
Une super-expérience professionnelle , la jeune métisse rose piaffe comme une jument que le prince monte pour la première fois.
Vis dans le brouhaha en guerre contre le silence qui étrangle ta voix, brou dans le ha ha.
L’enfant, trois ans, monologue en reconstruisant le monde en légos : le bulldozer va faire le boulot cosmique, oui.
Alors, l’Empereur des Fruits et Légumes de Shaman sourit, se plie à la tradition et offre à l’infidèle 50 kilos de grenades bien mûres en guise d’adieu…
Il y a une autre horreur cachée… , remarque l’enfant.
L’attraction terrestre !
Alors, sous l’averse de fraises mazoutées bombardant la piste de danse du night-club, l’artiste déclare : Pour bien se gérer dans sa vie comme dans sa production, il faut nécessairement un coaching gagnant et…
Alors je lui fous mon poing dans la gueule.
Et alors il dit en crachant ses dents :
Damned ! T’es pas cool !
Non, je ne suis vraiment pas cool.
Lutter contre les attroupements dans les halls d’immeubles.
Et alors je m’enfile la pinte de Strong du Punk de Cromagnon cul sec et rote une hyperputride.
Et alors le Punk de Cromagnon me fout un méga coup de boule et j’atterris dans une poubelle de cacahuètes moisies, pissant du sang par le nez.
Les gens qui rentrent du travail sont obligés d’enjamber les corps allongés et d’éviter leur regard.
Et je prends la poudre d’escampette, me frayant un passage à l’aide de mon douk-douk géant à travers une jungle de jambes.
Et à la sortie je me retrouve nez à nez avec un gros rat casqué qui me glisse dans l’oreille :
Les islamistes hongrois ont pendu et décapité un cultivateur d’opium roumain.
La peur me remet debout.
Et alors Soldo le Clodo m’alpague et m’expose sa théorie du toboggan post-monétariste piégé par les sorciers de toutes les tribus indiennes décimées par la variole durant la conquête de l’Amérique par les Européens avant de conclure à la nature boomerang de tout évènement fondateur.
Et soudain l’intense bonheur m’électrifie d’enfin vivre dans le futur immédiat plutôt que dans ce présent cacochyme et suranné.
J’enfile mes basketos magiques et je m’expédie illico aux temps bénis de la guerre froide, exactement au premier frémissement de l’aube tueuse de nuit, dans Berlin comme dans tous les confins du monde, dans les arrière-cours les plus reculées comme dans les bars les plus souterrains, dans les jardins les plus fleuris comme dans les squares les plus décharnés, partout où un crooner fantome accompagné de son orchestre surgit avec sa voix de machine exténuée pour me déchirer le dedans comme un chagrin d’amour.
Colis piégés : le FBI suspecte l’extrème-droite américaine.
Une fantastique odeur de pisse distillée aux petits oignons.
Des milliers de pakistanais armés se dirigent vers la frontière afghane pour accomplir le Jihad.
Plutôt la mort que cette vie d’injustice , la voix de miel d’un moudjahidine anonyme.
La rave-party s’est terminée ce matin sans incident.
Faute de pétrole, longues heures à décrire des cercles autour d’une pompe à essence perdue dans la campagne à l’affût d’un moment d’inattention de la pompiste resplendissante dans son costume traditionnel, mais en vain, mon auto dans tous les cas demain vrombira mue par une énergie imaginaire.
Fusillade dans une église chrétienne pakistanaise, 18 morts.
Partisan désormais de la ligne droite plutôt que de la fourbe orbite, je fonce le long de la plage d’Omaha Beach sous le vieux soleil épuisé, m’arrêtant un moment pour regarder les fantômes américains se livrant à une infinie partie de base-ball parfois interrompue par le rire sidérant de l’arbitre évangélique.
Les américains accumulent les erreurs de bombardement.
Reliefs de foie gras, cacahuètes, anchois frais.
Bombe dans un bus pakistanais, 3 morts.
Harengs marinés, salade de haricots noirs, châtaignes.
Fusillade dans un restaurant chinois de Paris, quelques blessés.
Sardines grillées, riz blanc, fromage de brebis, glace au caramel.
Des escadrons d’étourneaux dansent dans la brume du crépuscule, les hommes butent sur leur impossibilité de durer et tombent comme des mouches dans le piège de la terreur virtuelle, l’informaticien ressemble à un spectre dans l’étrange lumière d’automne.
Lumière brouillard limpide !
Figurines qui ne semblent pas avoir besoin du soleil pour s’animer et nous émouvoir.
Tous les moyens sont bons pour avoir des infos, c’est comme le sexe, c’est comme le fric, c’est comme la dope, le manque est atroce. Mais, mec, n’oublie jamais que ce n’est pas d’avoir la bonne info qui compte, c’est être à même d’inventer la bonne interprétation de n’importe quelle info, même une de treizième main et douteuse au possible, c’est ça qui te rend maître du monde, mec, la bonne interprétation.
Happy Halloween ! Explosez, citrouilles piégées ! Dansez, squelettes commerciaux ! Empoisonnez, sorcières fascistes ! Chatouillez, araignées atomiques ! Happy Halloween !
6 hommes en possession du plan d’une centrale nucléaire en Floride et de cutters arrêtés puis relâchés sont recherchés par le FBI , quelques péquenauds incultes jouent au vidéo-chamboule-tout Place de la République…
Jouir de se faire enculer par la propagande.
L’évènement comme trip, son ressassement comme plongée dans l’enfer de la dépendance.
Ce n’est pas par ignorance que nous errons mais par pure fainéantise.
A l’Hopital Américain de Dubai, un agent de la CIA aurait rencontré Ben Laden souffrant d’une infection rénale.
Ils vont et viennent sur la promenade du port miroitant servant de parking à des bateaux de plaisance où devisent un verre à la main des marins immobiles, ils vont et viennent, B 52 , élégants et légers sur leurs rollers, la vitesse dont ils jouissent déforme le son de leurs conversations frivoles, certains supporters anglais demandent à ce que leurs cendres soient répandues sur le terrain de leur équipe fétiche.
Les autres qui marchent semblent affligés de lenteur comme d’une tare, souvent se plaignent de maux de ventre, d’évanouissements, de migraines, de douleurs mystérieuses et éphémères, les américains bombardent un barrage , ils parlent aussi d’un ton gourmand et éclairé de la qualité de la viande à eux personnellement fournie par le boucher, ou de la bombe climatique, ou des clauses obscures de leur contrat d’assurance-vie, ou qu’il n’y a pas à être pour ou contre la guerre, le sentiment de l’inéluctable creuse son tunnel dans les consciences dociles, Ben Laden appelle ses frères musulman du Pakistan à se soulever contre le gouvernement félon et à rejoindre le djihad , tout seigneur appartient nécessairement au camp du bien : à chacun sa croisade.
Et il y aussi les chiens qui se mêlent avec une application toute canine à la réalité occidentale de cette Toussaint.
Et moi aussi parmi eux, je vais, luttant contre le bombardement optique et sonore, luttant comme un zombie pour nier ma défaite pourtant déjà consommée.
(Depuis ma naissance ?)
Ombre en aube totalitaire.
Sombre éternel blues dans la galerie commerciale où déjà dans les vitrines le rouge chasse l’orange et la barbe du Père Noël le rictus des squelettes d’Halloween, il pleut en abondance aux pays des vaches sacrées alors que la sécheresse sévit dans la Rhur rendant la navigation des péniches impossibles, comme si la métaphore du bourbier militaire fonçait vers son incarnation, simple station vers quelque-chose-de-pire-pour-demain, comme si il n’y avait plus que le pire pour nous tenir en haleine, les consommateurs ont mis toute expression en berne, leur foi en n’importe quoi désormais grabataire , et on n’a pas encore rempli notre mission de cyberespion , ce sont les zouzous qui le disent dans la télé de l’espace détente réservé aux bambins s’accrochant aux bipeurs qui les relient à des mères invisibles et à des pères fantômes, les consommateurs titubent sous le poids de leurs achats, ce serait comique si ce n’était pathétique, alerte au camion-suicide en Italie , la terreur est une drogue imposant la stupeur, chaque alerte sonne comme la promesse d’un trip morbide et magnétique, une souris américaine explique les lois du marché à une souris papoue dans un cartoon, les bambins regardent et incorporent hypnotisés, impossible de fermer le robinet, il faut s’abandonner, voir et entendre jusqu’à la lie, s’halluciner jusqu’à l’hallali final, jusqu’à 70 kilomètres de bouchon aux portes de Paris.
Ce matin, comme tous les matins , les bombardements se sont intensifiés sur l’Afghanistan , mes aisselles puent, je parle tout seul, je fracasse ma tasse de café contre le mur, je ris en hurlant pensant ainsi imposer silence à la parole du monde, rien jamais ne modifiera l’âme humaine tant qu’elle n’aura pas su échapper à ses propres modes de fonctionnement, ça dégouline partout sur les murs, l’existence ordinaire semble encore à peu près normale : mais ce n’est pas pour autant que je me laverai aujourd’hui, rêvant d’enfin atteindre à cette puanteur poétique.
Puanteur poétique ?
Ben Laden est un paranoïaque doublé d’un psychotique , affirme un expert.
Comme l’Amérique.
Encore des victimes innocentes à prévoir : comme si le simple statut de victime conférait à l’être humain l’innocence, comme si la voix de l’empire stipulait : te tuant, je t’offre la méga promo du salut.
Constipation occasionnelle ?
Ne t’exprime plus que par crottes narratives.
Et maintenant, léché par des langues de feu, à l’écart de l’affrontement réel qui là-bas s’opère au lance-flammes, et aussi avec la sensation d’être sodomisé par un inconnu lisant un gratuit, j’aimerais tant ne pas être.
Mais les circonstances en ont décidé autrement, et vous explosez tous de votre rire sardonique.
1 mort, 7 blessés sur je ne sais quelle autoroute, et les fameux grêlons gros comme des oeufs de pigeon sont de retour, fidèles au calendrier, et Paul Doré me téléphone pour me raconter qu’à midi il a mangé du pigeon farci, aux grêlons je demande, c’est un nouveau restaurant ou quoi les grêlons il demande, non non, j’ai juste mangé du pigeon farçi avec Chantal Leboeuf et voilà tu vois le topo, Chantal Leboeuf du département Recherche et Développement je demande, il raccroche, les policiers français font la grève du zèle , l’insécurité, le manque de moyens, on connait le refrain, et si on appelait les américains pour faire le ménage dans les quartiers sensibles, j’allume la télé, je coupe le son, 1, un tribunal américain, 2, un vieux couple avec les canapés rouges, les statuettes africaines, la croûte cubiste aux couleurs merdeuses et les verres d’alcool, l’interphone me sonne les cloches, oui je dis, Madame Lecouturier j’ai rendez-vous, avec la gynéco ou le dermato je demande en appuyant frénétiquement sur l’interrupteur commandant la porte de l’immeuble, 2, une main composant un numéro secret sur un clavier, je vais pisser, 3, encore un tribunal américain, et je retourne sur 1, et c’est toujours un tribunal américain, mais ce n’est pas le même tribunal sur 1 et sur 3, je zappe, pas le même mais par contre les figurants semblent les mêmes, voilà qui est troublant, le téléphone sonne, Jean Martin d’AGR, un sondage, pas le temps, il pleurniche, d’accord, Jean veut savoir si j’ai acheté une auto dans les trois dernières années, non, merde, 2, un flic allemand dans un fauteuil à motifs écossais, 4, rien, 5, un costume cravate au téléphone, 6, une malade à l’hôpital, aaaaaaaah j’éteins, je soupire à l’infini, une de mes activités métaphysiques favorites, et je souris en pensant à la cuite phénoménale que je vais prendre si cette putain de journée continue , les avions ont largué de l’avoine pour les chevaux des soldats de l’Alliance du Nord , dans l’air l’idée de lancer grimpés sur des chevaux ragaillardis par l’avoine américaine probablement enrichie en vitamines l’assaut contre les chars talibans. Et si moi aussi je me lançais à l’assaut de moi-même avec les moyens du bord afin de me sevrer de la salope Actualité ?
Il faut savoir mettre un point final à toutes ces histoires qui ne racontent rien.
Et même peut-être de les raconter.
(19 avril2025)
Rien n’a changé, rien, c’est toujours pareil, un peu autre et toujours pire, mais toujours pareil dans le fond. Il n’y a plus que l’étonnement d’être encore vivant qui parfois m’étonne.
Rien ? Mais quoi ?
Ça.
Combien de fois déjà ai-je fait le tour du monde avec les moyens de locomotion les plus divers ?
Cette fois, c’est avec un super aéroglisseur tout terrain électrique équipé de capteurs solaires qui me rendent autonome. Ah, l’autonomie, cette farce à mener par tous !
Je trottine, donc, je trottine sauf dans la boue où certains circuits s’encrassent. L’ennui, c’est que j’ai Trump dans mon dos depuis quelques jours. J’ignore comment il est arrivé là, que ce soit lui ou un de ses avatars ça reste Trump. Dans cette région tout en montagnes russes on limace dans les montées et on frôle le crash dans les descentes. Mais faut être philosophe, pas vrai ? Il pèse son poids, il est lourd. Je sens ses paluches moites autour de mes hanches et son haleine fétide dans mon cou, là où je suis le plus sensible. Je n’aime pas ça, ses mains, son haleine, sa lourdeur, ça me procure des frissons délétères. Au moins, il ferme sa sale gueule. Mais il est quand même là, et bien là, et ça me tend les nerfs. Pour le moment, rien à faire, mais je conserve l’espoir de le faire basculer dans une gorge profonde où coule un filet d’or noir, ou dans une faille tellurique, n’importe où en fait du moment que…
Quoi ? Quoi ? Quoi ?
Soudain, après un virage mal négocié alors que je m’assoupissais, l’aéroglisseur s’est encastré dans une vieille bicoque. On s’est relevés. Trump s’est alors transformé en chat roux, gros comme un dinosaure. Il a vomi de la bave sur le cœur décoloré du paillasson, s’est mis à donner des coups de griffe sur la bicoque, éventrant ses murs, arrachant son toit, l’atomisant, recouvrant de gravats un jardin tout à fait bucolique.
J’étais pour le moins interloqué.
Trump est redevenu lui-même et m’a parlé pour la première fois et m’a dit :
« Tu vois, c’est ça, l’essence du Deal, mission accomplie. »
Et il s’est volatilisé.
Même si je me suis senti seul, c’était une bonne chose.
Une bonne chose de savoir que les pires cauchemars constituent le terreau des rêves les plus doux.
Emmanuel Thomazo
Photo dansée : Michel S.