Qui est fasciste ?

Macron ou son supposé adversaire désigné comme fasciste ?

Jacques Fradin - paru dans lundimatin#215, le 4 novembre 2019

« Depuis quelque temps, et sur le thème du retour aux années 30, se développe un débat sur le fascisme. Précisément, posant les questions : qu’est-ce que le fascisme ? Ou, qui est fasciste ? » Jacques Fradin nous fait part de son analyse sur le sujet en rejetant les approches qui traitent le fascisme comme une possibilité à venir ou événement du passé. Selon lui : « Le fascisme est toujours présent, non pas comme possibilité dystopique et à venir, mais comme état toujours présent toujours agissant. » De Macron à l’économiste Pierre Cahuc en pasant par Guillaume Pepy, il s’agit alors de comprendre « qui est fasciste ? » et comment le fascisme opère, ici et maintenant.

Très récemment Médiapart a consacré une série d’articles à ce sujet :
Les signaux faibles du fascisme, Joseph Confavreux, 18 octobre 2019 ;
Et un Entretien avec Robert Paxton, Mathieu Magnaudeix, 30 octobre 2019.
Inutile de présenter Robert Paxton, qui a beaucoup apporté pour que l’on comprenne le fascisme à la française (voire La France patrie du fascisme), ce fascisme qui a fini par être agrégé, dans l’État Français, mais qui dépasse de loin cet épisode, comme le montre l’Affaire Papon.
L’ouvrage de Paxton, Le Fascisme en Action, Typologie des mouvements fascistes, est, pour nous, aussi important que sa participation à l’ouvrage collectif sous la direction de Michel Dobry, Le Mythe de l’Allergie française au fascisme.
Deux ouvrages récents relancent un débat plus ancien :
Enzo Traverso, Les Nouveaux Visages du Fascisme ;
Et, très récent : Ugo Palheta, La Possibilité du Fascisme.

Nous allons ici tenter de faire comprendre, ou simplement entrevoir, que le fascisme n’est pas une simple possibilité à venir, mais qu’il est déjà là, et, sans doute, depuis un long temps déjà ; non pas une possibilité, mais une dimension souterraine de ce qui s’auto-désigne « démocratie ».
Mais pour ne pas avoir à rivaliser avec des ouvrages savants et longs, nous n’examinerons qu’une question explosive : Macron est-il fasciste ?
Ou, pourquoi peut-on affirmer que Macron est fasciste ?
« Macron le fasciste » sera l’hypothèse que nous testerons.
Et, pour effectuer ce test, nous allons devoir transformer l’analyse du fascisme.

D’abord en passant de l’historiographie, la notion de fascisme étant la propriété des historiens, à la théorie.
Ceci n’étant pas une nouveauté (pas du tout), puisque les émigrés allemands aux États-Unis, les émigrés juifs allemands, mais pas seulement, après 1935-1940, émigrés qui se sont donné pour mission, pour vocation, de comprendre le fascisme (et sa forme extrême, le nazisme), ces émigrés intellectuels (philosophes ou écrivains) ont eu la (mauvaise) surprise de découvrir que les traits analytiques qu’ils posaient comme étant caractéristiques du fascisme (violence institutionnelle ou légale, idéologie matraquée par une propagande quotidienne, racisme ou xénophobie, respect formel de l’État de droit, démultiplication de la surveillance voire des services secrets de police ou autre, etc.), ces traits idéaux étaient, le moins qu’on puisse dire, pertinents pour décrire ces États-Unis, qui se proclamaient (propagande) la meilleure des « démocraties ».
Analyse structurale : pas question de dire que tel ou tel chef (style Trump) était populiste, démagogue, menteur, etc., mais nécessité de dire que la structure politique (dont nous venons de résumer les traits caractéristiques) des dites « démocraties » était analogue à celle des pays dits fascistes.

On doit se souvenir des combats idéologiques des années 60 : on devrait savoir que la critique de la société des États-Unis (avec ses Républicains), de l’Allemagne Fédérale (d’Adenauer) et de la France colonialiste (de Mollet à De Gaulle), après 1945 et jusqu’à 1968, était une reprise de l’ancienne analyse du fascisme produite par les émigrés allemands aux États-Unis.
Et disons le fortement : si l’analyse actuelle du fascisme est si limitée (à une historiographie rigoriste) c’est parce que nous nous situons dans un moment contre révolutionnaire (au moins proto-fasciste, le fascisme ayant toujours partie liée à la révolution comme son négatif) où tout est essayé pour effacer « le communisme », de la Libération à 68.
Car si le fascisme est un anti-communisme, il n’est qu’un petit élément de cet anti-communisme.

Pour quelqu’un de la génération de 68 et de la critique de l’Allemagne d’Adenauer ou de la France de De Gaulle, ceci, que le fascisme est un descriptif adéquat de « la démocratie », ceci était une évidence partagée par tous les groupes communistes combattants ; évidence qui sera théorisée par le couple discipline / contrôle et par l’idée de société de contrôle.
Il faut absolument lier le fascisme au contrôle ; même si le fascisme historique expérimental ne disposait pas des moyens techniques de surveillance dont dispose désormais la plus banale des « démocraties ».
Et pour réveiller les mémoires atrophiées par 40 années de contre révolution, ne renvoyons qu’aux études essentielles sur « la personnalité fasciste », ne renvoyons qu’à Reich ou à Marcuse ; plutôt qu’à Hannah Arendt, plus à la mode en notre sombre époque réactionnaire (au moins proto-fasciste).
Que signifie ce passage de l’historiographie étriquée, descriptive, typologique, atteinte par le fétichisme du passé (à ne surtout pas déplacer) – l’historiographie est un socle indispensable, mais combien insuffisant – que signifie ce passage de l’historiographie à la théorie politique ?
En partant des traits principaux qui décrivent le fascisme historique, en posant que les modèles idéal typiques de ce fascisme sont la France, l’Espagne et le Portugal, en déflatant l’Italie, à l’origine du nom, et surtout l’Allemagne nazie, nous découvrons vite que ces traits n’ont rien d’exceptionnels et qu’ils décrivent un ensemble de réalisations, ensemble qui s’est prolongé bien après guerre, après la défaite supposée (et surtout proclamée) du fascisme. Parlons de l’Espagne ! Mais parlons aussi de l’Allemagne Fédérale, de la France (de l’amnistie des « collaborateurs » et de l’amnésie d’État, toujours Papon) et des États-Unis protégeant le « sudisme », la forme locale du fascisme.
Nous renvoyons toujours à ce qui était sens commun vers 1965 et la guerre du Viet Nam.
Ces traits caractéristiques (violence institutionnelle ou légale, idéologie matraquée par une propagande quotidienne, racisme ou xénophobie, respect formel de l’État de droit, démultiplication de la surveillance voire des services secrets de police ou autre, etc.) permettent de décrire une histoire longue contre-révolutionnaire ou anti-communiste.

Si la société se caractérise par la guerre civile permanente, non pas la guerre de tous contre tous, mais ce qui était, autrefois, justement vers 1965, nommé guerre de classe, si l’État se maintient par la guerre civile et, donc, maintient la guerre civile, la maintient, la tient, la contient, l’agite comme menace, comme opération coloniale (dragonnades et carnages) qu’il peut à tout moment déclencher sans déclaration, pouvoir d’exception, alors l’éther politique est celui du conflit civil violent et l’histoire politique suit les méandres de cette guerre permanente, plus ou moins froide ou chaude.
La violence est à la base de l’ordre, de la mise en ordre.
Et ceux qui réclament l’ordre d’abord, l’obéissance avant, justifient les violences.
Violences modulables depuis la menace, jusqu’à l’intervention policière et judiciaire et jusqu’au déferlement, état de siège, état d’urgence, couvre-feu, etc.
La violence, donc, qui semble un trait caractéristique du fascisme est bien partagée ; ne citons que les grandes dates de l’histoire française : 1848, 1871, 2018.
L’écrasement de la Commune de Paris lors d’une opération militaire de style colonial (sous le regard des occupants allemands) n’est-ce pas déjà du fascisme ? Et qui permet la république !
Comme l’Espagne est un royaume restauré par la grâce de Franco !
La violence légitime de l’institution (qui cherche à se maintenir), voilà le socle du fascisme, voilà ce qui rend le fascisme insubmersible.
Glissons alors vers le milicien qui prétend réprimer au nom du droit, au nom de l’État de droit.

Évidemment toute répression est légale (par construction auto-justifiée : circularité de la violence étatique). Mais cette légalité n’a aucun autre sens que celui d’une domination sans cesse à réassurer ; et la constitution des faisceaux fascistes de miliciens n’est qu’une réassurance parmi d’autres, sans doute de dernière instance (au sens psychanalytique mobilisé par Althusser – l’inconscient « démocratique » ou républicain).
L’amour de l’ordre et de la discipline ; l’idée qu’il est impossible de vivre sans ordre, impossible de vivre sans ! Le légitimisme foncier d’anciennes cibles des missions religieuses : voilà le terreau de l’autorité, de l’autoritarisme, de l’ordre républicain et de toute dictature.
C’est l’esprit foncièrement anti-démocrate ou a-démocrate, à la fois des oligarchies ploutocrates et de leurs obligés (les citoyens obéissants), qui est à la source du fascisme ; l’esprit militarisé des personnalités grégaires (en mal d’agrégation).

Deuxième trait caractéristique du fascisme, mais bien partagé par tous les régimes d’ordre, de droite ou de gauche : la légitimation et la propagande, la légitimation par la propagande.
Le gouvernement autoritaire, ou à tendance autocratique monarchiste ou technocratique, énonce toujours que son action, discipline, répression, contrôle, est légitime. Et cette légitimité s’appuie sur un immense appareil de propagande ; appareillage dont l’objectif est de faire croire que l’ordre établi est le seul possible (TINA crie l’appareil).
Le pouvoir est d’essence religieuse : il repose sur la croyance, sur des rituels, des défilés, des habitudes – cela vaut pour n’importe quel pouvoir, républicain ou fasciste.
Nous savons que le Second Empire de Napoléon le Petit, une des sources vives du fascisme, avait théorisé l’usage de la propagande, l’usage de « la presse libre ».
Propagande qui pouvait marteler que l’Empereur, ou n’importe quel roi républicain, était ÉLU, était l’élu ! Était le représentant légitime désigné par l’élection et confirmé, si besoin, par référendums.
En camouflant la technique électorale, charcutage, choix biaisés, et toujours le matraquage publicitaire (qui peut dépenser le plus gagne !) : les slogans !
Penser par slogans, par mots d’ordre (sous le titre : tout le monde doit comprendre !), empêcher toute réflexion, pratiquer l’enfumage, le mensonge désinhibé, contrôler la pensée, ne voilà pas un trait bien commun dont le fascisme n’est qu’un révélateur, le révélateur du mode commun de gouvernement par l’interdiction de penser (autrement que ne le décide le gouvernement, l’économie obligatoire par exemple), mode commun hérité des théocraties ; la haine de la pensée qui soutient la haine de la démocratie.

Arrive alors un troisième trait partagé : le mensonge, le bagout publicitaire (à la Trump), le secret, le bidonnage ; regardons l’empilement des « lois » (scélérates) pour protéger le secret : n’est-ce pas une échelle pour accéder au fascisme ?
Et qui dit secret dit services secrets ! Quelle république se passe d’une surveillance style RG : de l’information nécessaire, dit-on !
Ou se passe d’un empilement de services (tous plus secrets les uns que les autres) de surveillance ?
Un signe indubitable de la pénétration générale de l’esprit fasciste est bien l’accoutumance à la surveillance ; n’importe quel vigile peut exiger une fouille complète ; ne parlons même pas des aéroports et de la paranoïa qui y règne.
La paranoïa ! Trait de personnalité fasciste (qui dicte la xénophobie ou le racisme à la Sarkozy) ; trait caractéristique de la société américaine.
Qui s’inquiète de la surveillance électronique universelle (style NSA) ? Ou s’interroge sur le développement des logiciels d’espionnage et des startups dédiées ? Ou des caméras à reconnaissance faciale ? N’est-ce pas du fascisme technicisé ? Surveillance totalitaire, Stasi, aurait-on dit !
Et pourquoi ce qui est visiblement un héritage, que l’on a fait fructifier, un héritage direct des régimes expérimentaux de surveillance globale – le fascisme historique doit être considéré comme un régime expérimental, comme une expérience qu’il a fallu corriger mais jamais rejeter, les gouvernements dits démocratiques héritant d’un savoir-faire inoubliable – pourquoi cet héritage n’est-il jamais considéré pour ce qu’il est : violence, peur, terrorisme d’État ?
Parce qu’un voile de mensonge (et d’ignorance et de propagande) transforme notre vision brute des actes de violence, de surveillance ou de mensonges éhontés, en regard Disney, nous devenons des « somnambules » guidés par des voix enjôleuses.
La prétention démocratique !
Nous sommes en démocratie !
Et ce mensonge martelé agit comme une drogue hallucinante.
Mais quel « conducteur » n’est pas élu ? Voire est l’élu !
Quelle dictature ne résulte pas d’élections ou ne s’appuie pas sur des élections ?
Y a-t-il des États sans droit ? Sans État de droit ?
Même l’intervention la plus arbitraire se légitime d’un droit !
Qu’est-ce qu’une justice indépendante ? Les juges nazis n’ont-ils pas été reconduits ? Comme les policiers français lors de la grande amnistie (qui conduisit les maquisards résistants, terroristes, en prison, après « la libération » !)
Existe-t-il des actions policières illégales ? Ou hors la loi ? Et de quel droit parle-t-on ?
Il faut un vaste régime néo-religieux, réactivant les plus infantiles soumissions (à une religion de tradition familiale), pour permettre ce somnambulisme : toute république (qui se prétend démocratique) comme tout régime d’ordre (plus ou moins durci) exigent des légions de somnambules (des zombies !) – le légitimisme sans pensée, voilà une clé du fascisme et de tout gouvernement ; l’interdiction de penser, le dressage intellectuel, la lutte contre la culture critique, voilà une autre clé commune.

Résumons : dans une série de textes estivaux, pour agrémenter le pastis à la plage, nous avons introduit le concept de DESPOTISME [1].
Le Despotisme recouvre des formes variables et diverses de gouvernement :
De ce qui se prétend démocratie ou république, etc., république monarchique autoritaire ou technocratique et glissant vers le policier sécuritaire ;
Puis la quasi dictature, avec l’État d’Urgence permanent, jusqu’au fameux fascisme des historiens.
Il faut donc parler en termes de despotisme incluant le fascisme comme un état de ce despotisme ; mais il faut parler de la république de la même manière, comme un état du despotisme.
Ce qui permet de dire : le fascisme n’est pas une possibilité à venir, c’est une actualité permanente, un état du despotisme, despotisme qui est le régime évolutif et variable dans lequel nous sommes jetés.
Les formes variables du despotisme ne sont pas exclusives ; toujours la discipline soutient le contrôle, avec des mélanges opportunistes : un gouvernement dit démocratique d’extrême centre peut soudainement se transporter à la droite extrême en ressuscitant les techniques fascistes, les milices par exemple.
Les états du despotisme, république parlementaire, technocratie, état de police, peuvent se convertir les uns dans les autres, les uns avec les autres, selon l’opportunité et les circonstances ; une soi-disant démocratie peut devenir du jour au lendemain un état policier, et ce, par la grâce d’un gouvernement « de gauche », d’un gouvernement « socialiste », mollétisme appliqué ! Ou blairisme d’opportunité !
Et de telles mutations internes, plus ou moins accélérées, peuvent se produire sans que personne n’y voit goutte ou n’y trouve à redire. La prégnance du fascisme est telle que tout esprit démocratique (ou de résistance) est pulvérisé. Le mouvement récent, dit de dé-démocratisation, vers l’autoritarisme sécuritaire est à la fois bien documenté (lire Wendy Brown) et, en même temps, ignoré, dénié.

Disons alors, pour insister :
Entre la soi-disant démocratie ou la république ploutocrate avec ses technocrates corrompus, et le dit fascisme historique, il n’y a pas de différence de nature, il n’y a qu’une différence de degrés dans le chemin vers l’autoritarisme.
Ce ne sont pas les fascistes désignés par le pouvoir, en un geste fasciste, qui menacent (dans l’à venir), ce sont les technocrates armés (et enfermés dans leur idéologie) qui non seulement menacent mais exécutent (aujourd’hui).
Il n’a jamais existé, sauf moment révolutionnaire, de démocratie véritable.
Et c’est l’insurrection de ces moments démocratiques, car il n’y a de démocratie que par l’insurrection [2], qui explique la réaction contre-révolutionnaire, l’amplification des moments révolutionnaires « communistes » conduisant au durcissement de la répression, des ratonades coloniales à l’extermination militaire et au fascisme.
Au fascisme comme état interne du despotisme, non pas comme possibilité externe.
Le noyau du fascisme est à trouver dans l’anti-communisme ; mais cet anti-communisme caractérise toutes les formes possibles du despotisme et, donc, n’est pas spécifique au fascisme. Ce noyau fasciste est bien commun aux dites démocraties parlementaires autant qu’aux régimes militaires de redressement moral.
Comme ce qui caractérise le despotisme est le rejet dégoûté de toute démocratie (ou de toute forme insurrectionnelle) il est normal que l’on retrouve partout, dans tous les états du despotisme, la lutte contre la démocratie ; qui se confond avec la lutte contre le communisme.

Alors Macron est-il notre nouveau Franz von Papen ? Ou notre nouveau Thiers ? Qui n’a pas besoin du fascisme (au sens ordinaire), qui peut même prétendre le combattre, tout en adoptant une posture autoritaire technocrate racialiste, parce qu’il est habité par la foi révolutionnaire (de la révolution conservatrice), parce qu’il est porteur d’une idéologie générant la violence.
Macron est donc un fasciste, disons un pétainiste. Seulement déguisé !

Si le terme fascisme est peut-être adapté à un point de vue descriptif historiographique, c’est la désignation du mouvement révolutionnaire (conservateur) par lui-même, mais le cas espagnol devrait servir de modèle plutôt que le cas italien, il n’est plus pertinent d’un point de vue analytique.
Il faut alors parler du despotisme économique, du capitalisme comme régime de domination politique, avec l’ordre de l’entreprise au centre, on peut parler de ploutocratie.
Et le fascisme n’est pas une possibilité à venir de ce despotisme ; il en est une dimension intégrale, dimension enfouie qui se révèle opportunément lorsque ce despotisme quitte les eaux tranquilles de la servitude sans résistance, lorsque le despotisme (« de droit divin ») se sent menacé.
État de siège, État d’urgence, État d’exception, article 16 de notre constitution chérie, qui sont autant de dimensions dictatoriales, fascistes, mais cachées, cependant bien présentes, activables à la commande.
Pour le dire autrement : si un groupe désigné comme fasciste par des adversaires (aussi fascistes que ceux qu’ils dénoncent) arrivait légalement (par les méthodes électorales ordinaires – ce qui impliquerait un contrôle de l’information, ce contrôle que détient le gouvernement en guise de clause de no entry), arrivait légalement au pouvoir, il n’aurait rien de spécial à faire, que de mettre en œuvre les ressorts autoritaires du despotisme, rien de spécial à faire que de copier ce qui se pratique communément, de la désignation des préfets à la désignation des juges.
Et, peut-être, au lieu de trouver un contrôle serré de l’éducation et de l’information d’abord dans un sens favorable à l’entreprise (culture économique d’entreprise) nous pourrions trouver un contrôle de l’éducation dans un sens plus conservateur religieux, plus évangélique ou baptiste – mais c’est plutôt un mélange de culture d’entreprise (néolibéralisme) et de culture conservatrice (républicaine) que nous devrions trouver, Blanquer pouvant parfaitement servir de pont.

Si l’on veut, et pour simplifier à l’extrême, posons que le despotisme est notre « matière », ce dans quoi nous sommes incarcérés : le régime politique de l’économie dominante avec ses règles irréfragables de compétition, d’individualisation, de division (politique du travail), d’efficacité, le réalisme capitaliste [3].

Cette « matière » présente des états : les états de la matière : le parlementarisme croupion, la dite « démocratie » (encadrée, surveillée, enfermée, humiliée), la technocratie (le gouvernement de « la caste »), l’autoritarisme (lorsque Noske se réveille en Castaner (ou castagneur), après un long sommeil dogmatique), la dictature d’un état d’urgence, le fascisme (avec milices, vigiles et bandes de « gros bras »).
Les états de la matière ont tous pour fonction de protéger & défendre les règles économiques (ou la propriété, comme on disait autrefois – l’épargne placée et qui doit rapporter).
Ces états ne sont pas exclusifs les uns des autres ; au contraire, ils peuvent se superposer en couches : la matière est feuilletée ; et les feuilletages ou les couches peuvent s’interpénétrer ; on parlerait d’une métaphore géologique.
Les couches sont toujours présentes et en mouvement permanent : elles peuvent se mélanger, ou l’une, passagèrement (opportunément), peut supplanter les autres et les renvoyer au fond (effet d’un article 16).
Ainsi le fascisme est-il toujours présent, non pas comme possibilité dystopique et à venir, mais comme état toujours présent toujours agissant.
Macron se présente comme un rempart face au fascisme (attribué aux concurrents qu’il veut disqualifier). Il tente ainsi de verrouiller l’avenir : n’est-ce pas une bonne méthode fasciste (moi ou le chaos, moi ou la terreur, moi ou la ruine, etc.) ?
Et cela, de plus, est une « opération de com » ! De la bonne propagande à l’ancienne, relayée par des réseaux contrôlés ! Nouveau trait fasciste : le contrôle de l’information, le mensonge !
La censure à l’ancienne qui réapparaît brutalement, à mesure que l’atmosphère se charge. Posons alors la question :

Qu’est-ce qui distingue un gouvernement bourgeois (des patrons, des propriétaires ou des financiers) répressif, autoritaire puis militarisé, style Monarchie de Juillet et sa descendance républicaine, toujours Thiers, gouvernement dont le credo est : ordre & obéissance (aux lois de l’économie), dont ce credo est l’expression d’une idéologie, d’une croyance (relire Stiglitz, cité en note 3), celle du « développement économique libéré » (enrichissez-vous), idéologie armée qui peut se dire « révolutionnaire » [4] : tout le pouvoir aux entrepreneurs pour la croissance illimitée et pour le bien de tous (de nouveau, lire la critique exhaustive de cette idéologie, de ce mensonge religieux, de l’hypocrisie ploutocrate, par Stiglitz), qu’est-ce qui distingue un gouvernement autoritaire des capitalistes (gouvernement allumé à l’idéologie), qu’est-ce qui distingue une ploutocratie offensive et un gouvernement fasciste (converti au néolibéralisme, style brésilien [5]) ?

Qu’est-ce qui distingue une monarchie républicaine, avec ses tics de courtisanerie, avec un monarque intouchable (déifié comme guide suprême), avec une censure autocratique, et des milices armées, monarchie comprenant l’impossibilité de mettre en cause la définition économique de l’ordre (où l’ordre est supposé être égal à la démocratie), qu’est-ce qui distingue cette monarchie d’un régime à idéologie obligatoire (toujours celui de l’économie) ?
Qu’est-ce qui distingue le directeur Blanquer d’un quelconque agent des services ?
Qu’est-ce qui distingue le plus ancien « diviser pour régner » (à la base de la présente république) de toutes les stigmatisations spécifiques (comme le racisme et le racisme anti-pauvres – les sans dents !) et de la criminalisation permanente de tous les stigmatisés ?
Là où apparaît toujours un bouc émissaire !
Là où chacun peut se dire : ce n’est pas moi qui suis visé, je ne suis pas concerné, ni pauvre, ni chômeur (assisté ou welfare queen), ni cheminot, ni gilet jaune, ni indigène, ni musulman, ni femme indigène pauvre (et voilée), etc. Le trait caractéristique des régimes fascistes : la fracturation sociale, l’indifférence de protection. LA PEUR.
On retrouve, en plein république, la plus vieille méthode de la stratification sociale, avec des épargnés indifférents (les épargnants, les bobos des villes impériales), des ploutocrates heureux qui impulsent la ségrégation (comme outil économique de l’efficacité), et les ennemis à abattre.
Indifférence, repli, individualisation, atomisation, guerre à la pensée critique, nouvelle censure (par l’argent), reconfiguration de l’enseignement en dressage économique.
L’observation de la révolution contre-révolutionnaire, du redressement économique par la violence (se rappeler l’affaire des lois travaille – nous arriverons au dogmaticien Pierre Cahuc un peu plus loin), l’instauration du « risque partagé », l’arbitraire, l’incertitude légale pour les classes inférieurs, tout ce qui soulève l’ahurissement des esprits sains, tout cela désigne une guerre sauvage menée par des revanchards (sarkozystes – Macron et la commission Attali).
Alors qu’est-ce qui distingue cette guerre sociale, cette guerre civile CONDUITE par des technocrates à l’idéologie armée et RÉALISÉE par des milices brutales aux ordres (les forces de l’ordre), qu’est-ce qui distingue cette guerre de classe (contre les nouveaux Canuts ubérisés) CONDUITE par des prophètes hallucinés, reprenant le plus vieux chant du « don de soi », de la certitude et de la vérité, qu’est-ce qui distingue cette destruction systématique de la violence fasciste ?
Limitation du droit de grève, limitation du droit syndical, limitation du droit de manifester, dictature de « la représentation » (disqualification de toute autre voix), puis (don de dieu) guerre contre le terrorisme, ébauche d’un pouvoir militaire dictatorial menant la guerre (conte le terrorisme) à l’infini, etc.
Où trouver la spécificité du fascisme ?
Il y a déjà, maintenant (et pas dans l’à venir), une extrémalisation de tous les traits autoritaires que recèle tout régime dit démocratique mais à ordre économique obligatoire ou imposé. Encore une fois, pour parler du fascisme supposé extraordinaire, limite ou tendance cependant irrépressible, il faut d’abord parler du despotisme commun.
Macron est peut-être libéral, au sens économique, certainement pas au sens politique – c’est un technocrate narcissique – il n’est certainement pas « démocrate » : son libéralisme est anti-démocratique (comme tout libéralisme économique).
Macron n’est pas un bouclier qui protégerait du fascisme, c’est un versaillais autoritaire qui joue de la PEUR, manipule la PEUR, comme la peur du fascisme fantasmé (puisqu’il est déjà là !) pour mieux cacher la pulsion autoritaire (et infantile) qui mène le gouvernement Macron à droite toute et vers la droite la plus extrême (toujours le conseil sarkozyste de « braconner » dans les terriers les plus glauques du racisme).
S’il y a donc une « possibilité du fascisme », elle se tient, armée, devant nous, dans la bande des technocrates allumés.
Rappelons que dans le monde pétainiste français (notre modèle du fascisme) – en 1940 comme en 2015, il y a deux groupes pour faire fonctionner ou tourner ce fascisme à la française (de tradition très ancienne, thermidorienne anti-communiste, toujours 1848 et 1871), l’extrême centre thermidorien de la technocratie économique acoquinée au monde patronal (patrons, patronages, guides, conducteurs, entrepreneurs, etc.) et la droite extrême milicienne de la lutte armée (contre l’ennemi intérieur, aujourd’hui l’indigène, le musulman, etc.).
Et pour tenir ces deux forces énergétiques (de la dynamo pétainiste) il faut un bouc émissaire, un ennemi désigné par l’autorité (religieuse) supérieure.
Républicains (marcheurs au pas) et Nationaux (de la chasse au bouc), loin de s’opposer, constituent une unique machine, d’abord une machine à produire du mirage : celui de l’opposition entre démocrates et fascistes !
Républicains et Nationaux profitent à part égale de cette gigantesque illusion.

Le style de « choix électoral » (cuvée 2017 à renouveler) entre un technocrate pétainiste et un milicien agité par la revanche coloniale, tous deux également néolibéraux mais avançant masqués pour un carnaval raciste (démagogique), le « choix » entre deux engrenages d’une unique machine de destruction, ce « choix » (évidemment truqué) doit être refusé : DÉSERTION, partir au maquis, recours aux forêts, rejet de la fonction « citoyenne ».

La lutte contre le fascisme implique donc le rejet de l’économie, la sortie de l’économie.
Autant que l’économie est la puissance agissante (matérielle, idéologique, dogmatique), est l’infrastructure du despotisme (dont le technocratisme et le fascisme milicien ne sont que deux états imbriqués).
Le nouveau pétainisme (à deux pôles, technocrate + milicien) exige la fuite en avant productiviste et repose sur cette fuite (il vend du bonheur consumériste). Mais il manipule, en arrière-plan, la peur, l’angoisse, l’épouvante, le cauchemar dystopique du MANQUE, des restrictions, du contingentement, du retour au rationnement.

L’économie ne tient, malgré les inégalités fantastiques (qu’il faut dénier : voilà un objet pour le racisme, la dénégation offensive), que par le mirage de la consommation croissante, le mirage de la croissance retrouvée (que Stiglitz chérit encore).
Mais comme ce dilemme : croissance nécessaire (pour maintenir l’ordre) croissance impossible (pour raisons écologiques), comme ce dilemme est « disruptif » ou est lourd d’insurrections, le capitalisme doit se militariser, passer à l’état fasciste, n’accepter aucune contestation (surtout aucune contestation de l’ordre économique) [6].

Et, en particulier, mobiliser ses idéologues, comme l’économiste de cour Pierre Cahuc, le père sous X de la loi travaille. Bien sûr les courtisans (ou conseillers occultes) constituent des bandes ; à Pierre Cahuc il faudrait rajouter Philippe Aghion et, plus, peut-être, un proche de Macron, Marc Ferraci, préposé à la surveillance de la DRH Muriel Pénicaud. Néanmoins nous résumerons cette bande sous le nom CAHUC.
L’économiste Pierre Cahuc, en tant qu’économiste « scientifique », est un idéologue du retour au servage [7], le travail ubérisé, comme « solution » au problème du chômage ; après tout, il n’y a pas de chômeurs dans un système esclavagiste de STO ! Et voilà la grande découverte : il n’y a plus de chômeurs lorsque le droit de protection du travail (et des travailleurs) a été aboli, lorsque tout chômeur DOIT travailler sous peine de mort, par suppression de toute allocation, rémunération, etc. Il n’y a plus de chômage lorsqu’il n’est plus possible d’établir une différence entre chômage et misère mortelle.
Le STO, n’est-ce pas une invention fasciste ?
Le retour aux Misérables et (encore = modernisation) à la Monarchie de Juillet, le cadre des Canuts et des Misérables, n’est-ce pas l’objectif grandiose de l’économiste de cour, qui ne jure que par « le travail sans qualité », les livreurs fliqués et exploités, qui ne jure que par le travail abstrait concrétisé !
Si la bourgeoisie à l’ancienne moralisait en clamant : tout travail mérite salaire, la nouvelle bourgeoisie fasciste crie : tout salaire exige n’importe quel boulot merdique (même les bagnards sont nourris, quel désastre !).
Bien sûr, nous pouvons dire que l’économiste Cahuc (et en tant qu’économiste « scientifique ») est un fieffé réactionnaire (qui vise le retour à la grande époque bourgeoise du 19e siècle !). Mais l’économiste Cahuc n’est-il pas plutôt fasciste ? Autant que le fascisme reposait sur la soumission totale, sur « les contrats de mission » comme forme de soumission, sous missions pour sous hommes ?
STO mon amour !
Posons alors au chevalier de la science (nobélisable après le prophète Jean ?) un problème un peu plus compliqué que celui qu’il a l’habitude de traiter (Cahuc ne traitant que des problèmes réduits idéologiquement : les salariés ne sont pas des êtres humains mais de lignes de compte).
Supposons que le travail ait deux dimensions et pas seulement une seule : la quantité, l’emploi, et la qualité, la démocratie au travail et le travail comme producteur de démocratie. Supposons que nous n’acceptions pas le réductionnisme quantitatif (le nombre et le compte) qui oblitère tous les raisonnements économiques, et ceux de Cahuc en particulier : combien d’emplois de livreurs ubérisés ?, et que nous placions la qualité du travail au-dessus de la quantité (renvoyons à Stiglitz, ouvrage cité en note 3, pour plus de détails).
Qualité du travail : travailler dans un collectif démocratique d’auto-organisation ou, au moins, de participation aux décisions – conseils d’administration qui ne seraient plus réservés aux « propriétaires ».
Qualité du travail : le rejet du despotisme d’entreprise, fondé sur le pouvoir des « actionnaires », comme élément décisif de la démocratie (politique) et du refus du despotisme global – qui commence toujours au travail.
Alors, Monsieur le Chevalier Cahuc, quelles « règles » préconiseriez-vous pour assurer « le plein emploi », plein emploi consistant en travail démocratiquement organisé ou en travail d’impulsion de la démocratie (sortie du despotisme) ?
Voilà un problème plus difficile que celui qui consiste à gérer un état lamentable, en considérant (implicitement ou pas) cet état comme indépassable (toujours TINA, toujours la structure hiérarchique considérée comme « naturelle »).
Le problème que se pose à lui-même le Chevalier Cahuc, sous l’ordre de ses maîtres despotes, celui de la simple quantité d’emploi, à état hiérarchique donné, quelle que soit la qualité, ou même avec une qualité dégradée (cette dégradation supposée nécessaire pour assurer « le plein emploi ») et faisant tendre le travail vers le servage (toujours les Canuts) en maintenant l’ordre despotique, avec la peur & l’obéissance, ce problème réduit est une caricature.
Il est désolant que des personnages « instruits », formés dans les écoles et les universités ouvertes, se soient transformés en idéologues esclavagistes (« sudistes ») !
Dira-t-on que Macron est « intelligent » ? Certainement pas, lui qui a utilisé « sa formation » pour devenir une sorte de réincarnation tardive (et démodée) de ce que le néolibéralisme propose de pire – aucune invention, aucune imagination, aucun travail d’innovation – la « révolution » proposée n’étant qu’une copie sans âme, rédigée par une intelligence dévoyée ou corrompue. Macron est la caricature du « bon élève » (et peut-être pas le gendre parfait !).
Et la corruption des oligarques (de la caste) s’étend à leurs employés, aux chevaliers de la science – pour résoudre des problèmes simplistes, quelle « intelligence » faut-il ?
Le Chevalier Cahuc « cherche » l’emploi qui conforte l’ordre despotique, avec la PEUR comme aiguillon.
Allez, donnez-vous de la peine, auto-entrepreneurs, investissez dans des camions, des food trucks !
C’est pourquoi nous pouvons dire : comme son patron, Cahuc est un fasciste, pétri de méchanceté, incapable d’invention. Il ne pense qu’en termes d’obéissance par la peur, en termes d’ordre par la violence.
Au lieu de se perdre dans des débats historiographiques (pour faire plaisir aux maîtres), la question du fascisme aurait dû être très simple : c’est la question de l’ordre, de la hiérarchie et de l’obéissance, de l’ordre à réaliser par tous les moyens, essentiellement violents, du licenciement facilité au jeu des milices et à la justice expéditive (pour les plus pauvres ! – le cas Sarkozy pouvant servir de contre-exemple !), moyens dont l’objectif est de susciter la PEUR, fermer les esprits (y compris, par contagion, ceux des chevaliers et de leurs maîtres), empêcher toute pensée, ne parlons même pas de pensée critique !
Revenons aux pensées sûres des années 1960 !
Pourquoi l’ordre et l’obéissance, son ombre, devraient-ils venir avant tout ?
Regardons l’opportuniste Guillaume Pepy, le plus médiocre, qui cherche à imposer la casse violente, décidée au château, qui cherche à anéantir toutes les structures de défense des salariés pour transformer ces salariés en travail abstrait , comptable, évaluable, négociable (sur un futur marché avec des esclaves en vitrine).
Comme tout bon fasciste ne doit-il pas mettre en scène la fable du « bouc émissaire », du « protégé », du « planqué », qui devrait être ramené au pas commun de la servitude commune et envoyé au front (de la privatisation) dans des bataillons disciplinaires ?
Quelle est la différence entre « un gros bras » milicien qui tabasse à mort des manifestants ou des émigrés, tous les nouveaux ennemis désignés, et Guillaume Pepy « la petite frappe », le casseur institutionnel qui met à mort, par opportunisme, pour la carrière, et avec indifférence, et en toute sûreté ?
Le premier représente une violence individuelle (mais qui est toujours incorporée, constituée en corps de violence) qu’il est, peut-être, facile de combattre corps à corps ; mais le second, dans toute sa faiblesse physique voire maladive, représente la violence institutionnelle, la criminalité en col blanc, l’espace mafieux des gouvernements, violence diffuse qui ne peut être combattue qu’en se démultipliant aux différents niveaux qui organisent les institutions : combattre le pouvoir exorbitant des entreprises et de leurs chefs, combattre le pacte mafieux enregistré dans l’idéologie technocratique, ne pas hésiter à mettre en cause les capacités personnelles [8].
Si Cahuc est un faux scientifique mais un vrai dogmaticien, c’est parce que son esprit a été mal éduqué ; si Guillaume Pepy est un personnage sartrien, un salaud, un pur agent criminel d’une bande mafieuse, c’est parce que l’impunité, la sûreté de pouvoir faire n’importe quoi, lui a « donné une grosse tête », si grosse qu’il ne peut plus la porter.

Voilà ainsi une phénoménologie limitée du gouvernement « démocratique » qui mène à l’incapacité de distinguer entre la répression républicaine et la répression fasciste. Différence de degré seulement (et parfois).
Contrairement à ce qui a pu être écrit, il n’y a pas « possibilité du fascisme », il y a présence constante du fascisme comme ombre, support, compagnon indéfectible de la dite démocratie du parlementarisme ploutocrate.
Si donc le fascisme est un adversaire, plus, un ennemi (dans la guerre civile permanente), il n’est ennemi qu’autant qu’il est un état mobilisable du despotisme économique.

[1Qu’est-ce que le Despotisme économique ?

LM 203, 6 août 2019, LM 204, 16 août 2019, LM 205, 23 août 2019, LM 206, 9 septembre 2019.

[2Renvoyons à notre texte, L’Insurrection des Gilets Jaunes, LM 192, 21 mai 2019.

[3En compléments de notre série, citée à la note 1, renvoyons à :
Mark Fisher, Le Réalisme Capitaliste, qui peut se lire comme une reprise actualisée des thèses de l’École Critique (les Allemands émigrés), un descriptif des nouveaux systèmes de contrôle, en insistant sur le contrôle de la pensée et de l’éducation – point n’est besoin d’un fascisme à l’ancienne pour exécuter le projet fasciste de la surveillance (néo-théologique ou néo-théocratique), un gouvernement néolibéral technocrate y suffit bien, enfermé dans ses dogmes idéologiques.
Et sur l’assaut contre « la classe ouvrière » ou contre les travailleurs, sur la volonté de briser toute résistance et de pousser à l’adaptation forcée (à l’économie) :
Gérard Filoche, Macron ou la Casse Sociale ;
Romaric Godin, La Guerre Sociale en France ;
Enfin le nouvel ouvrage de Joseph Stiglitz, Peuple, Pouvoir et Profits, peut se lire comme une analyse détaillée, sur le cas des États-Unis, de la guerre sociale et de ses objectifs économiques ; guerre civile qui met en œuvre les trois piliers du fascisme : la violence, souvent armée, la destruction systématique de l’éducation ou l’assaut contre la culture, la « révolution » (conservatrice) ou l’action impulsée par l’idéologie, la croyance.

Le livre de Stiglitz parle de Trump le démagogue ; mais les analyses peuvent s’appliquer sans difficulté à notre guide national.

De plus, il convient d’étudier la critique, que mène Stiglitz, grand économiste keynésien, social-démocrate à l’ancienne, la critique de la dogmatique néolibérale (de l’économie de l’offre) ; la pensée économique néolibérale (Reagan, Thatcher), adoptée par les nouveaux sociaux-libéraux (Mitterrand, Blair, Hollande), est déconstruite comme simple idéologie, mythologie ; la mythologie directrice (de la révolution conservatrice) étant, peut-être, le trait fasciste par excellence de cette « révolution » contre révolutionnaire.

[4Renvoyons au célèbre ouvrage de Macron, Révolution, qui reprend (sans le savoir ?) le thème archi-usé de toutes les droites (« révolutionnaires »), de toutes les droites fascistes ; car « la révolution » de Macron (« la modernisation » des élites pétainistes) est évidemment une révolution conservatrice, une rétrovolution.

[5Notre article, Fascisme ou économisme ultra : nous voulons les deux, LM 164, 8 novembre 2018.

[6Nous avons traité cette question extensivement in La Voie Pauvre, LM 186, 9 avril 2019.

[7Pierre Cahuc est un idéologue du retour au servage, comme tous les économistes « scientifiques » (libéraux, néolibéraux, ultra-libéraux), comme son collègue, plus prestigieux, Jean Tirole ; lire Le Prophète de la Soumission, LM 114, 24 septembre 2017.

[8Pour aller plus loin sur cette question de la violence, sur cet engrenage qui lie « démocratie » et fascisme, voir notre article, Violence légitime ou légitime défense, LM 168, 7 décembre 2018.

Jacques Fradin Économiste anti-économique, mathématicien en guerre contre l'évaluation, Jacques Fradin mène depuis 40 ans un minutieux travail de généalogie du capitalisme.
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