« Je connais bien cette frayeur,
j’ai identifié ce qui m’entrave : »
Dit quelque part un grand poète russe
« le ciel tombe sans s’effondrer »
Moi aussi, je connais bien cette frayeur :
Avant, j’espérais l’effondrement
Le Grand Bouleversement.
Aux meilleurs moments,
Je croyais même le précipiter !
Comme on obéit à une prophétie :
« Commune, égalité et dignité ».
Et quand je désespérais,
Je ne désespérais jamais du désespoir :
Je pariais sur l’œuvre d’un météore
Force pure et sans haine
Capable de mettre fin au monde :
L’œuvre anonyme, sans Sauveur – la vraie révolution –
Tout ensemble contingente et nécessaire
(le contraire d’une bombe nucléaire)
L’œuvre parfaite, l’œuvre de Personne…
Qui n’est plus une œuvre.
Vous comprenez ?
Mais rien de tout cela n’arrive
Nous chutons sans peur
À jamais séparés de l’horizon des événements
— Et pourtant captifs de son attraction.
C’est Lucrèce qui avait raison
Et qui a peut-être porté le coup le plus dur
À la théorie révolutionnaire :
Tout se dérobe et se désagrège
— lentement et nécessairement
Tout se délite, morceau par morceau
— sans grand bouleversement
Qu’est-ce qu’un mandat d’arrêt de la Cour Pénale Internationale ?
Je vous pose sincèrement la question :
qu’est-ce qu’un mandat d’arrêt
de la Cour Pénale Internationale ?
Qu’est-ce qu’un deal sur les minerais,
sinon un accord de paix ?
Et pourtant qu’est-ce que la guerre,
sinon l’industrie du deal sur des morts ?
Guerre et paix, dans ce monde,
quelle différence ?
Si j’étais Dieu – ce qu’au monde ne plaise –
j’abolirai la géopolitique
Et tous ses prétendants avec
J’abolirai aussi France emploi
Mais je m’égare…
Je reprends :
qu’est-ce qu’un putain de mandat d’arrêt
de la Cour Pénale Internationale ?
…
Et nous, nous allons à demi-ivres,
débiles et contents,
En tout cas pas assez tristes,
Car nous continuons d’aller,
Sans être hostile à ce fait :
Que tout continue d’aller…
Comme un mandat d’arrêt
de la Cour Pénale Internationale !
Nous allons errant, chutant,
Heureux d’être en vie quelque part,
Et d’atteindre parfois même
Quelque objectif satisfaisant pour soi,
Qui nous rend fier et gonfle un peu notre poitrine,
Ou d’au moins trouver
quelque repos à notre fatigue,
Pour nous rendre capables d’aimer,
Autre chose que soi.
Alors que nous ne sommes tous
(Machines muskiennes comprises)
Que des expulsés de la matière
À la recherche d’un refuge
Qui n’existe pas.
Vous croirez peut-être,
Parce que vous saisissez la psychologie,
Pouvoir me diagnostiquer,
Comme un symptôme de cette société de malades,
Et je ne suis pas le premier,
Suicidé de cette société,
Nous sommes des milliers
Que vous autres,
Dans votre langage élaboré,
De la clinique sociale,
Appelez : « symptôme… insurrectionnel » !
Cela ne nous plaît qu’à moitié.
Nous sommes parfaitement désespérés
Trop parfaitement pour y prêter foi
Car Lucrèce… a encore raison
(peut-être le plus grand
de la lignée de tous nos prophètes)
Qui un jour a dit
– comme tous les prophètes :
il l’a dit sur commande !
Que la matière devait
de toutes parts être infinie
– ce qui laisse encore possibles
quelques noces barbares imprévues, non ?!
Et que l’espace toujours fuguant
Toujours s’ouvre à la fugue.
Vous comprenez ?
L’espace toujours fuguant
Toujours s’ouvre à la fugue.
Et, cela, souverainement,
Indépendamment
De ce que n’est pas
Un mandat de la Cour Pénale internationale !
Vous comprenez ?
L’espace toujours fuguant
Toujours s’ouvre souverainement à la fugue.
Vous comprenez ?
Atelier Oncléo