Trois chemises
M’Bae, « né à Madagascar mais 100% comorien » a 75 ans. Né d’un père français, il a vécu aux Comores avant de venir à Mayotte. Sa carte d’identité n’a jamais été refaite, il a un certificat de naissance et de vieux documents non mis à jour. Il avait une petite ferme près de Mamoudzou (capitale de Mayotte), des canards, poules, chèvres, plantations diverses. Des délinquants sont venus se servir plusieurs années de suite jusqu’à ce qu’ils pillent tout et brûlent la ferme, menacent M’Bae et son voisin ; c’était il y a deux ans. Les forces de l’ordre ne sont pas intervenues. Après Chido, il me dit s’être présenté à la Police aux frontières - PAF - pour un retour volontaire aux Comores, mais il aurait été, chose curieuse, refusé à l’embarquement. Alors nous sommes allés un samedi matin à la police nationale pour faire en sorte que la PAF le ramène à Anjouan où il souhaite se recueillir sur la tombe de sa mère et de sa sœur. « Vous nous donnez votre adresse et la PAF vient vous chercher », propose l’agent de police. Et là, M’Bae, pris de panique, quitte précipitamment le commissariat. Je n’ai pas compris sur le moment ; peut-être préférait-t-il à un retour seul sur ses terres la compagnie de cette famille qui l’a recueilli, peut-être a-t-il voulu éviter la venue de la PAF dans le quartier ? Mais bon, les drones survolent souvent la zone, rien n’échappe à la caméra. Je lui ai offert une chemise à carreaux orange et marron que mon père n’a pas eu l’occasion de porter ; elle lui va très bien. Le soir, je le retrouve sur le banc en compagnie de l’enfant lourdement handicapé ; ils sont là comme deux compagnons d’infortune. L’enfant qui s’exprime beaucoup par des cris, fredonne parfois quelques mots audibles que nous reprenons en choeur : « bon comme un bonbon, doux comme du sucre ». Il m’attrape les bras, se cramponne à me pincer la peau et se redresse, me montre qu’il peut faire un pas ou deux, les pieds de travers en extension, en appui sur ses orteils.

J’ai apporté une chemise plus sportive à manches courtes, bleu gris, pour M’Barak, un de « mes » élèves qui va bientôt passer l’épreuve orale du brevet des collèges. Il est mahorais, français. En 3e, il apprend tout juste à lire et à écrire, a le courage de prendre la parole pour s’exprimer. Il lui manquait une jolie tenue pour l’examen ; pour tous ces jeunes la tenue vestimentaire est importante. Il s’est présenté dans ma classe un jour : « Madame, je voudrais venir avec toi en cours, je sais pas lire et pas écrire ». Quelques ajustements administratifs grâce à un personnel de direction très favorable à ces souplesses dans l’intérêt des jeunes, et M’Barak vient maintenant trois heures par semaine dans mes cours réservés aux élèves allophones nouvellement arrivés à Mayotte - arrivés en kwassa-kwassa des Comores, de Madagascar ou d’ailleurs. Les récits des traversées sont rudes, certains glaçants, des « balancés par-dessus bord », ça arrive.
La 3e chemise vert d’eau est pour Houssam. Enfant comorien, sa mère est arrivée avec ses quatre enfants à Mayotte, a déposé Houssam quand il était petit avant de partir pour l’hexagone avec les trois autres. Houssam a grandi sur l’île, ballotté de-ci de-là. Quand nous nous sommes rencontrés pour la première fois, il ne pouvait me dire son âge. Il pensait avoir 18 ans, mais après avoir regardé sa carte de séjour, j’ai compris qu’il en avait 23. Il a passé un bac professionnel en cuisine, a réussi les épreuves de pratique avec succès, mais comme il parle très peu français, ne sait pas lire et pas écrire, il a échoué dans toutes les autres matières ; il est donc sans diplôme. Houssam est un chouette gars, serviable, gentil, mais désoeuvré. Sa carte de séjour expire le mois prochain. Alors comme beaucoup ici, il va bientôt se cacher dans la journée. Il a de la famille aux Comores, s’il est attrapé et renvoyé là-bas, il ne devrait pas être à la rue. Pour le reste...
« Je veux être pompier ! »
Hakim est un petit bonhomme de 12 ans, né aux Comores. Il habite assez loin du collège, dans un des derniers bangas construits sur la pente de la colline, tout là haut. Malin, curieux et débrouillard, il a vite appris à lire et commence à écrire des phrases. A la reprise des cours après Chido, il était inquiet : sa mère souffrait d’une blessure à la main survenue pendant le cyclone. N’ayant pas de papiers, elle n’allait pas s’aventurer sur les routes pour aller à l’hôpital, risquant la PAF et le renvoi aux Comores sans ses enfants. Je n’avais pas de solution et de toute façon elle ne prendrait aucun risque. Les semaines sont passées. A la rentrée des vacances de février, Hakim était émacié. Il m’a dit qu’il ne mangeait plus beaucoup, lui, sa petite sœur et son frère jumeau qui n’est pas scolarisé mais s’occupe de la vache. Sa mère a été conduite en urgence à l’hôpital pour une amputation - les amputations ont été nombreuses pour tous ceux qui n’ont pu recevoir de soins pendant des semaines -, ils étaient donc seuls dans le banga, sans l’aide de voisins. Alors avec un collègue nous avons pris le relais : s’assurer jusqu’au retour de la maman que les trois enfants aient à manger tous les jours, et puis organiser un coup de fil entre Hakim et sa mère, avec l’appui d’une infirmière conciliante, pour qu’ils puissent se parler quelques minutes. L’histoire se poursuit bien, la maman est de retour. Le quatrième enfant, de 14 ans, qui était aux Comores, est arrivé en kwassa il y a un mois et Hakim s’est fait une joie de me confier cette nouvelle. Mais ce frère s’est fait attraper par la PAF peu de temps après en allant à l’école coranique un matin tôt. Comme personne ne pouvait se présenter pour le ramener au village, il a décidé de repartir, sans doute pour préserver toute discrétion autour de sa famille.
Hakim veut être pompier. Assis tous les deux dans la bibliothèque du collège, il me montre longuement un ouvrage documenté sur ce métier. Mais Hakim n’a pas la nationalité française ; alors c’est quoi la suite pour ces jeunes sans papiers ou mineurs isolés qui font tout pour s’en sortir ? Ils sont des milliers dans cette situation. Majeurs ou non, ils peuvent être attrapés par la PAF et expulsés s’ils ne sont pas inscrits à l’école ou en formation. Et même s’ils sont diplômés, trouver un emploi est difficile, et trouver un emploi qui rémunère décemment est une gageure.
Naël est peut-être âgé de 13 ans. Lui a réussi à infiltrer une classe « ni vu ni connu » alors qu’il n’avait pas de dossier d’inscription. Il s’est faufilé comme ça le matin pendant un trimestre, jusqu’à ce que ces méfaits de délinquant dans le village et alentour le rendent définitivement visible. Pris en charge et épaulé, le gosse vient dans mes cours et tente de se donner une autre voie que celle de la rue, de ses violences et « business » en tous genres.
Du Congo ou du Burundi
Claude, présenté dans un précédent texte, a hâte de quitter Mayotte. Même s’il est réfugié politique, sur fond de conflits entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda avec le M23 – insurrection armée (des enjeux autour des minerais, dont le coltan à l’Est du Congo, de leurs exploitations et commerces entre autres avec l’Europe via le Rwanda), il est pour l’instant coincé sur l’île, son dossier bloqué en Préfecture puisque le service pour les étrangers est fermé depuis octobre dernier par un collectif de citoyens hostiles à l’immigration. En petite communauté, les réfugiés politiques réussissent à organiser un quotidien vivable, mais l’usure s’installe doucement. Ils s’en sortent sans voler, sans porter atteinte aux biens et aux vies. C’est la débrouille respectueuse de l’autre mais ils deviennent de fait hors-la-loi sans l’avoir choisi.
Jérémie est Burundais, Tutsi, le seul survivant de sa famille : c’était un gamin à l’époque du génocide au Rwanda et au Burundi en 1994. Jérémie a pu continuer à vivre là-bas, mais il y a quelques mois, il a dû fuir définitivement, les tensions ethniques entre Tutsis et Hutus s’étant à nouveau accentuées (le Burundi possède de nombreuses ressources en terres rares, potentiels hydroélectriques, terres fertiles pour la culture). Arrivé en novembre dernier, il est aussi chauffeur de taxi. « Il fait trop trop chaud », me dit-il. « Chez nous on a au moins des périodes plus tempérées, mais ici c’est tous les jours la forte chaleur, jamais de pause, même pas la nuit » - et moi d’actionner à contrecœur tous les soirs le climatiseur pour un peu de repos... « s’adapter au réchauffement climatique » grâce à la technologie, c’est désormais le discours entériné, mais tellement insupportable et dénué de bon sens.
Simplement s’intéresser à la vie de ces hommes, l’espace du trajet en voiture, leur fait plaisir, ils parlent ainsi en toute confiance, à voix basse, pour rester discrets ; nombreux sont les passagers qui ne disent ni « bonjour » ni « merci ». Les taximen me connaissent et quand ils ne m’ont pas vue plusieurs jours de suite sur le parking ils s’inquiètent. Alors bien sûr les questions « tu es mariée ? tu as des enfants ? », et leur étonnement à mes réponses : une femme sans enfant venue seule sans son compagnon à Mayotte, cela surprend. Alors ils me proposent leur compagnie affective que je refuse, ils comprennent et n’insistent pas. Nos poignées de main sont amicales et sincères. Leur force intérieure est surprenante.
Je ne suis pas coincée à Mayotte, j’ai des revenus, alors je prends un avion pour rentrer me ressourcer en métropole. Je fais pour le mieux sur cette île, mais le « à quoi bon ? » n’est jamais loin. Alors on s’accroche à chaque intention, à chaque geste, à chaque sourire, à chaque parole qui fait du bien. Ça, c’est pour le présent, pour soulager un peu le passé, pour très modestement ouvrir l’horizon. Il faut faire confiance.
On aimerait apporter davantage à tous ces êtres mais c’est l’instant partagé qui prime. Laisser un contact pour ceux qui pourront atteindre l’hexagone, aider à leur arrivée si besoin, espérer se prendre dans les bras un jour là-bas, et célébrer la vie qui a tenu et qui va encore ; juste se retrouver quelque part, parce que vivants.
Nassibia
Nassibia vit dans un des bangas qui jouxtent ma chambre. J’ai eu des soucis de voisinage, à cause du bruit permanent jusqu’à plus de 23h... cela c’est un peu arrangé. Si je râlais épuisée des discussions et cris nocturnes, musiques bruyantes via les smartphones, je me tais quand il pleut abondamment la nuit et que les gamins sortent illico avec des bassines pour prendre une douche sous la pluie et chantent à deux pas de ma chambre, je souris même de ce moment joyeux. Nassibia aime discuter, elle me raconte sa vie, parce qu’elle ne peut se confier à son voisinage, « il y a trop d’hypocrisie, je n’ai pas confiance ». Elle a deux filles, sa cadette de 10 ans, née à Mayotte est française, l’aînée de 15 ans née aux Comores n’a pas de papiers. Nassibia a une carte de séjour toujours valide. C’est une jeune femme intelligente, courageuse, douce. Elle a arrêté ses études parce qu’elle voulait être mère, contre l’avis de ses parents. Aujourd’hui mère célibataire après des histoires de couples invraisemblables, elle accepte tous les boulots, restauration, ménages. Elle travaille dur pour que ses filles n’aient pas à vivre ce qu’elle a traversé. Elle s’épuise à la tâche et sa santé est fragile. Quant aux salaires, avec des retards de paiements importants, ils sont irréguliers dans les montants malgré une même quantité de travail, « est-ce que j’ai le choix ? », me rétorque-t-elle. Elle pourrait rentrer en métropole avec sa cadette mais se refuse à confier sa grande à quelqu’un, elle sait très bien que c’est risqué, que la gamine peut très vite se retrouver à se débrouiller toute seule ou subir des contraintes diverses. Nassibia est secrétaire d’une association de quartier, et l’autre soir une fête y était organisée. Je l’ai vue partir joliment apprêtée, méconnaissable avec sa robe style années 30, ses talons et sa coiffure. Elle tenait à ce que je la voie ainsi, et nous nous sommes embrassées complices. Je lui ai spontanément offert un bracelet de quartz rose qui ne quitte pas son poignet.
Pêle-mêle
L’autre jour j’étais sous une charpente en partie arrachée à clouer des planches. Mon petit gabarit m’a permis de déambuler et ramper sur des poutres. A un moment, j’ai fait une pause, adossée et retenue entre deux pièces de bois, recroquevillée mais confortable et en sécurité. Là, je me suis sentie comme le maki qui fait sa pause entre deux branches pour sa digestion, trouvant les appuis nécessaires pour l’équilibre adéquat. Depuis Chido, nombreux sont les habitants qui n’ont toujours pas de toit ou des parties de toit. Alors quand il pleut, on s’abrite dans un recoin, on attend la fin de la pluie et pour la énième fois on passe la raclette, on relave le linge, on nettoie les meubles non déplaçables, bref, on s’organise depuis cinq mois parce que les livraisons pour refaire les toitures sont rares et réservées à la reconstruction des bâtiments publics. Cependant, de nombreux établissements scolaires, dont les écoles primaires, n’ont toujours pas rouverts faute de salles couvertes ; les enfants, accueillis dans d’autres structures ont quelques heures de cours dans la semaine,
Les premières bananes de l’île seront peut-être sur les étalages en août prochain, un petit bonheur à venir. Une salade importée et défraîchie vendue dans une grande surface, c’est 7 euros. En septembre dernier, quelques messages radios conseillaient à la population de ne pas consommer les « tomates cancérigènes » cultivées sur l’île ou importées clandestinement des îles voisines et vendues sur les bords de route – c’était déjà le cas en 2018. Aux dernières analyses, ces tomates auraient un taux de toxicité 7000 fois supérieur aux normes européennes autorisées. Des cultures avec des pesticides illicites importés de Chine entre autres, et des migrants qui travaillent dans les champs sans gants ou masques. « Au moins les gens mangent », voilà ce qui se dit. Des produits « extrêmement toxiques pour la santé humaine et l’environnement », et des eaux de pluie qui ravinent et vont directement dans le lagon...
« Madame, le chat, il va se faire tabasser ». Deux collégiens entrent dans la classe avec un chaton tricolore, apparemment une petite femelle. Et comme tous les chats de son âge, elle est maigre, affaiblie et semble malade. « Elle nous a suivis depuis le village », je ne crois pas trop à cette version mais peu importe. Elle prend place dans la classe, mais au bout d’une heure elle demande à sortir ; je la laisse aller et reste aux aguets. A peine dehors elle se prend des coups de sandales. Bon, je préviens les gamins de la laisser tranquille, en vain. Quelques minutes après j’entends des cris : un jeune a attrapé la petite et la balance comme un caillou sur un camarade. Je la récupère au sol, paniquée. J’empoigne par là-même le gamin mais arrive à contenir ma colère, l’autre à déjà contourné le bâtiment. Elle ne demande plus à sortir et passe la journée sur mon sac à dos, épuisée, se requinque avec un pot de yaourt et surtout de l’eau qu’elle boit goulûment. En fin de journée il me faudra nettoyer ses besoins posés dans un coin de la classe. J’aménage un grand sac de transport où elle reste sans bouger, un collègue nous emmène toutes les deux en scooter dans un quartier sans gamins. Je dépose la petite près de poubelles, le lieu de nourrissage quotidien des chats, pour ceux qui s’en sortent. Il m’est impossible de la ramener dans ma chambre, la propriétaire de la maison n’aime pas les chats porteurs de maladies, et les matous du quartier risquent fort de la massacrer eux aussi. Des chatons comme elles, il y en a partout. Quant aux chiens, leurs histoires sont tout autant empreintes de violence. Les combats de chiens sont affaire locale, souvent organisés par et pour les délinquants. Des aboiements peu joyeux de chiens et de chiots se font entendre dans certains quartiers, des élevages pêle-mêle et des dressages à la dure.
Quand j’observe les makis affamés, je nous vois nous humains, en situation de stress ou d’angoisse, avec des comportements qui sont ceux de la survie. J’ai observé un maki adulte s’asseoir sur un petit pour qu’il ne puisse attraper de la nourriture, un autre qui prenait une datte dans chaque main et en avait coincé une autre sous une patte arrière. Il m’appartient de bien répartir la nourriture pour éviter les tensions, mais avec les attaques directes des moustiques, il faut faire vite - ils piquent à travers les vêtements et le chikungunya sévit en ce moment. Dans ces situations de stress alimentaire, il y a encore des attitudes surprenantes, des makis qui n’empêchent pas un congénère d’approcher, il y a toujours un comportement qui ne suit pas celui du groupe, toujours un sursaut ou un écart, toujours ce quelque chose qui trace une autre voie.
Je découvre à Mayotte le stress lié au manque d’eau potable ou tout simplement d’eau pour une toilette, pour les toilettes, parce qu’aller sur la plage faire ses besoins n’est pas aisé quand on habite en quartier urbain. Et quand je vois des personnes avec des jerricans venir chercher de l’eau de mer souillée dans le port, je me demande quel sera son usage.
Le lagon de Mayotte peu profond subit de plein fouet le réchauffement climatique et le quatrième blanchissement mondial des coraux. Pas besoin d’être un spécialiste pour réaliser que plus de deux-tiers des coraux sont morts. Reste quelques patates de corail un peu colorées, des poissons multicolores y trouvent refuge, des nurseries aussi, un oursin, une ophiure, tiens, quelques poissons chasseurs entre deux eaux. La silhouette d’une tortue plus au loin, mais les herbiers dont elle se nourrit repoussent peu. L’eau est bien trop chaude et polluée. Les pêcheurs de lagon désertent, de rares lamparos au loin. Mais le braconnage des tortues sévit toujours. Il faudrait embarquer et quitter le lagon pour retrouver une vie aquatique plus vivace et abondante.
Un projet de base navale, cette histoire d’aéroport, et la technopole de Dembéni qui a vu le jour en novembre dernier : « futur hub de l’innovation » pour « offrir un accompagnement sur mesure aux porteurs de projets et aux chefs d’entreprises, notamment en matière d’expertise financière, de soutien à la croissance et de recherche et développement ». Des bâtiments pour accueillir des start-up... mais un site non accessible pour les bus, un projet qui a coûté officiellement 16 millions d’euros. Que Chido soit ou non passé par là, n’y avait-il pas d’autres priorités ? Le traitement des eaux usées, la récupération des eaux de pluie, l’eau potable, l’agriculture locale, la gestion des déchets de quantité effroyable, les pollutions multiples, le plus concret du quotidien en somme, des projets pour la jeunesse, de l’imaginaire, des respirations. Et les relations avec les Comores, îles voisines aux multiples ressources, le Canal du Mozambique ? C’est quoi la stratégie, le projet pour Mayotte ?
Le retour dans l’hexagone me fait lâcher l’âpreté de l’existence dans ce département. Je pleure simplement de joie lorsque la nuit je déambule dans le port de Douarnenez, entends le silence, le ressac de la mer et le chant d’un merle. Les pleurs, c’est mon corps qui me dit merci ; une pause de la chaleur continue accablante, du bruit perpétuel, les sirènes incessantes des véhicules de la police et des pompiers en trombe que l’on croise plusieurs fois sur un seul trajet. Mais Hakim, Claude, Nassibia... les makis et les baobabs. Des rencontres et des consciences qui s’élargissent. Nous sommes liés par ce qui fait le vivant, des liens qui n’ont pas de frontières, même pas celles de l’apparence. Des rencontres et des mémoires qui font les formes du monde. Tiens, une tourterelle à la fenêtre dans le vent frais du printemps ; dans une semaine repartir là-bas.