Le nom

[Poésie]
Oûtis

paru dans lundimatin#385, le 31 mai 2023

Il y a plus urgent que de politiser l’Oulipo, mais on s’amuse comme on peut.
Voici un poème qui s’impose entre autres contraintes habituelles (métrique, syntaxe, sens) de faire apparaître ACAB, vingt-quatre fois sans jamais l’écrire directement (16 fois phonétiquement dans le cœur du vers, 4 fois verticalement par l’initiale des vers, 4 fois verticalement à la fin des vers par les rimes qui correspondent aux phonèmes des lettres A, C, A, B).

Ah m’accable l’oubli de ce nom scélérat !
Ce roi qu’abattirent les chiens par lui dressés.
Au cloaque abstrus ma mémoire le versa,
Baal, lui sont très liés, Moab et Macchabées.

Avec eux sûrement ma traque aboutira.
Ces syllabes « ab », « ac », aboutées, inversées,
Afin de voir des sons le vrac aboli là,
Brouillard et couac absurde aussitôt résorbés.

Alors viendra en frac, habit noir, blanc éclat,
Celui que le ressac a bu le trépassé,
Amiral que Moby en un flac abaissa,
Blanche claque aberrante est la queue retombée.

Abîmé dans l’opaque abject par Jéhovah
Captif d’un lac abstrait qu’il sillonne, lassé.
À dire enfin « Achab », je parviens, il sera,
Bien proscrit quoiqu’absous par ce mot radoubé.

Oûtis

Photo : Bernard Chevallier

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