Le gros nécrotératoplasme extraterrestre [4/4]

Túpac & Micaela, Pérou
(Chants d’utopie, XXXII)
Brice Bonfanti

paru dans lundimatin#345, le 27 juin 2022

Voilà quelques années que les chants d’utopie de Brice Bonfanti, ses personnages et leurs horizons, nous baladent à travers le monde et les époques. Dans la continuité des trois premiers cycles parus chez Sens & Tonka, nous publions ces 32e chants : Le gros nécrotératoplasme extraterrestre. Divisés en 8 parties, illustrées par MajorMinuit, ils se racontent sur 4 publications [1].

VII

Tombé d’âges récents de fin du monde horriblement fixe du temps qui meurt et ment,
le gros nécrotératoplasme extraterrestre avait un âge calculable, et néanmoins processionnel, et notamment processionnaire : c’est bien là le problème, c’est là cause des maux, cause causée, effet, et qui ne fait que son petit effet,
derrière nous, jardiniers doux, à l’âge incalculable, aussi ancien et nouveau-né que l’origine et néanplus instantanés, soit événementiels, notamment éternels : c’est bien ici le Bien en Cause, Cause des biens.

L’armée sans armes se soulève de témoins de la Présence, l’armée sans armes de présents,
l’armée d’enfants de haute enfance libre d’armes.
C’est une armée, ça n’est pas une armée, car elle est désarmée. C’est une désarmée.
Et c’est une kyrielle.
La kyrielle s’avance
qui décharge une charge infinie de présence d’amour en silence (de Présence d’Amour en Silence, trois majuscules).
Au triste reste, au rachitique, funeste reste, du gros monstre de mort depuis la mort de son cœur mort :
Tu n’entameras pas notre joie, qui elle, kyrielle, entamera toutes tes peurs, légions.
Tu pourras mal nous crever l’œil, couper l’oreille, arracher l’ongle, couper la main, empaler par l’urètre sur deux trapus pals, électrifier verge ou vagin,
la kyrielle d’enfance en présence s’en fout, s’en ensemence, s’en contrefout et s’en surfout, contrensemence et surensemence, s’en hyperfout d’hypersemence (s’en outrefout d’outresemence) :
la kyrielle ne souffre d’aucune torture, et s’avance d’amour en silence (et d’Amour en Silence, deux majuscules)
qui retourne l’état à l’arrêt en mouvance, sa racaille en enfants du bercail, et la mort en Amor.
Le seul bercail est la Présence. Le seul bercail est l’Utopie. Et l’Utopie, c’est la Présence.
Terminés perte et gain, et gain et perte, boucle vicieuse en perte et gain et perte en gain et gain à perte :
les enfants peuvent perdre ou gagner, ou gainer ou perter, ça n’est que pour un temps : les enfants sont hors temps.
Voici l’armée sans armes des enfants, la désarmée de la Présence, la kyrielle d’enfants de présence, la désarmée d’enfants présents, qui met la fin au temps, ET C’EST ENFIN LA FIN DU TEMPS.
Voici venue, hors temps, la fin du temps qu’est maintenant : la fin, le but du temps c’est de cesser pour laisser place au seul moment qu’est le présent de la présence : l’éternité.

Il ne reste plus rien du gros monstre de mort.

La foule en houle
entre en contact,
dans le contact
d’un papier fin,
feuille arrachée d’un cahier plein, plein de paroles véridiques – chose impossible.
Le cahier, impossible, avait un seul silence
de vérité.
La page sans parole
arrachée,
la foule en houle des vivants entre en contact par son dedans.

VIII

Le jardin est à qui le jardine ; et qui le ruine
en est chassé.
La terre, à qui la féconde embellie ; et l’enlaidit, stérile,
évacué.

La bombe de présence nucléaire bombardée sur toute ville, pôle à police, et mégalomaniacopole,
nuclée les bombardés, hier sans noyaux, souvivants, nucléés jardiniers bien vivants, maintenant.

L’effondrement, ce sont les civilisations. L’effondrement des civilisations, c’est l’harmonie : ténèbres de l’état et de ses villes, immobiles, et lumière de toutes Communes mobiles : la sylvillisation.

Nous faisons de la Terre un jardin planétaire, de Commune en Commune mobile, sylvillisée. Jardiniers amphibies ! cueillons, chassons, pêchons, pastoralons et cultivons.
Toute sylville est un jardin, où trente-six jardiniers vivent, vivants jardinent. Toutes couvrent la Terre, enfin entière, qui a trouvé son vrai visage : Jardin, le vrai visage de la Terre.
Jardin fait de jardins, de jardins faits de jardins : un jardin de jardins de jardins – d’enfants : jardin fractal, mais : si d’essence la même à chaque étage, d’existence plurielle au même étage : de lieu en lieu, la terre une diffère, nul jardin même à l’autre, et de plus en plus autre, au loin.
Tout jardinier est un jardin : jardin, du jardinier le vrai visage.

Ça ouvre, ça œuvre, et ça ouvre et ça œuvre et ça acte, ça opère et ça acte, acte œuvrier, acte ouvrant et ouvreur et ouvré, acte ouvrier, acte opérant, ça ouvre en acte, ça œuvre en acte, et ça ouvre et ça œuvre et ça acte, acte ouvreur et ouvrant, acte opérant, opératoire et premier acte d’opéra, œuvre commune, comme un ouvroir. Ça n’attend pas, ça n’agit pas, ça s’agit par magie, ça vit en soi, ça outrevit vers plus que soi.

Comme nous les vivants,
après n’avoir que dit, je paradis
le paradis ayant d’abord bien espéré le paradire,
certain de lui que j’espérais,
l’enclos clos et si clos
comme un point
qu’il est ouvert à l’infini.
Nous tous paradisons,
avant de nous ensilencer dans ce qui
ne peut être ni dit, ni paradit à la bonne heure
– seulement parolé dans un souffle d’inspir ou d’expir :
c’est le même respir, et le même respir
salue et sauve le meilleur.

Le malheur des uns
fait le malheur des autres.
Et le bonheur des uns des autres.
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