Quand grand-mère est morte il a fallu recouvrir tous les miroirs de la pièce où elle était et tous les miroirs de la maison dans laquelle elle était et il a fallu couvrir son corps avec un drap sur le lit dans lequel elle était et il fallait sortir certains objets et il a fallu ranger certains objets et il fallait préparer l’eau et il fallait sortir de la pièce parce que l’âge l’exigeait. C’est comme ça.
Quand grand père est mort à l’hôpital il fallait sortir et il fallait sortir de l’hôpital et. Prendre le bus. C’est tout. Ça peut être comme ça aussi.
Quand le chien du père de mon père est mort il a fallu mettre de l’eau dans une grande bassine et mettre de l’essence parfumée dans l’eau de la bassine et il fallait retirer le collier en cuir du chien et il a fallu laver le corps du chien et brosser les poils du corps du chien et le père de mon père et la mère de mon père ont demandé à mon père de commencer l’histoire et la mère de mon père a fait le récit de son histoire avec lui et le voisin le plus à gauche du jardin a fait le récit de son histoire avec le chien et le père de mon père a à son tour fait l’histoire et le corps du chien était maintenant un corps des récits et des histoire puis. Nous avons murmuré chacun son nom à son oreille puis rendu son nom à la terre puis fait un an de silence.
Jamais son nom ne fut prononcé durant ce temps. Une année.
Quand le hamster du voisin du dessous est mort ses parents ont pris un sac en plastique, ils ont ouvert le sac et ils ont mis le hamster et ils ont jeté le sac en plastique dans la poubelle.
Quand le poisson rouge de mon copain de classe est mort ses parents l’ont jeté aux ordures. Ils sont partis à Jardiland. Ils ont acheté le même. Ils lui ont donné le même nom. Ils ont dit qu’il était revenu.
Quand l’insecte que mes chaussures ont écrasé quand cela a été découvert par les autres élèves. Ils ont dit. Que c’était de la cruauté que c’était le fait d’un barbare et que celui qui avait fait cela finirait sur le plateau de BFM TV.
Quand l’incendie a ravagé Notre Dame quand les flammes ravageaient la forêt quand le treizième siècle et le dix-neuvième siècle partaient en fumée quand tout disparaissait quand tout disparaissait et le discours du président avec. Ils ont dit. Que c’était là un grand malheur que c’était un grand malheur à pleurer et que cela serait reconstruit. Ils ont dit. L’argent sera donné et l’argent fut donné. Il y a beaucoup d’argent. C’est comme ça.
Quand la cousine de la grand-mère de ma voisine de classe est venue, quand, elle s’est rendu au supermarché, quand, elle a vu la viande par quantité quand elle a vu que l’on prenait sans demander que l’on prenait sans remercier que l’on prenait sans rendre à la terre ce que l’on avait pris, elle s’est affolée de la triste destinée des hommes d’ici. Car de là où elle vient, d’un monde, d’un espace qui coexiste avec le nôtre car de cet endroit-là pour chaque chose prise à la nature il faut lui demander la permission et remercier et remercier en offrant une vie à ce qu’on a pris à la vie.
Quand il y a un miroir dans une pièce, on s’approche on souffle l’air chaud et humide et les doigts font des traces et les traces sont des signes et il faut faire alors la même chose avec les fenêtres des bus, les vitres du RER et il faut faire la même chose avec les vitrines des magasins, le miroir de l’ascenseur.
Quand il te course demande-toi si tu as un corps et demande-toi si il a un corps.
Qu’est-ce que tu as appris ? Qu’est-ce que tu as compris ? Qu’est-ce que tu as cherché ? Car tout est aussi mystérieux qu’avant, c’est bien aussi comme ça. Peut-être je ne sais pas car il y a des justes traités selon la conduite des méchants et des méchants traités selon la conduite des justes.
