Bravons l’état d’urgence, retrouvons-nous le 29 novembre place de la République

#bravonsletatdurgence

Eric Hazan - Serge Quadruppani - Ivan Segré - paru dans lundimatin#37, le 28 novembre 2015

Suite à notre éditorial de lundi dans lequel nous interrogions la possibilité de braver l’état d’urgence, notre rédaction s’est entretenue avec certains de ses contributeurs habituels. De cette réflexion est ressorti un appel, paru d’abord sur le site de Liberation, et que nous publions à notre tour, avec une liste de signataires mise à jour.

À noter que l’appel peut être signé par tout un chacun sur le site de pétition en ligne Change.org. Ce mercredi midi, il était déjà cosigné par plus de 1000 personnes.

BRAVONS L’ETAT D’URGENCE, RETROUVONS-NOUS LE 29 NOVEMBRE PLACE DE LA REPUBLIQUE..

Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour comprendre que l’état d’urgence décrété pour trois mois n’allait pas se limiter à protéger la population française contre de nouveaux attentats.
Ce week-end, une grande partie de la ville de Sens (Yonne) a été soumise à un couvre-feu, sans rapport clair avec les attentats. C’est la perquisition d’un appartement – dont les locataires n’auraient finalement pas été inquiétés – qui a justifié cette punition collective. Parmi les 1072 perquisitions nocturnes diligentées hors de tout cadre judiciaire par les préfets, moins d’une sur dix a abouti à une garde-à-vue. À Nice, c’est une fillette de six ans qui a été blessée lors d’une opération de police : les policiers intervenus en pleine nuit avaient enfoncé la mauvaise porte. Dimanche en Loire-Atlantique, c’est une caravane de 200 vélos accompagnée de 5 tracteurs qui a été bloquée par les forces de l’ordre : il s’agissait de dissuader les cyclistes de rejoindre Paris pour la COP21.
Pendant ce temps, le gouvernement reprend sans scrupules des mesures promues hier encore par l’extrême droite. Les journaux nous l’assurent : les sondages confirment l’adhésion massive des Français à cet état d’exception sans precedent depuis cinquante ans.
C’est une victoire pour daesh que d’être parvenu, avec moins d’une dizaine d’hommes, à faire sombrer l’État dans ses pires réflexes réactionnaires. C’est une victoire pour daesh que d’avoir provoqué la mise sous tutelle sécuritaire de la population tout entière.
Le dimanche 29 novembre, une gigantesque manifestation était prévue dans les rues de Paris pour faire pression sur les gouvernants mondiaux, à qui personne ne faisait confiance pour trouver une solution au réchauffement climatique. Des centaines de milliers de personnes étaient attendues de toute l’Europe. Manuel Valls, certainement lucide sur le caractère dérisoire des accords qui sortiront de la COP21, craignait beaucoup cette manifestation ; il a donc decide de l’interdire. Le prétexte : la foule risquerait d’être la cible d’un attentat – M. Valls jouerait-il avec le feu en laissant les Français risquer leur vie en faisant leurs courses de Noël ? Les moyens : ceux qui voudraient manifester encourent 6 mois de prison. M. Valls va-t-il nous mettre en prison pour nous protéger des attentats ?
La proposition que nous faisons, nous savons que dans les circonstances actuelles nous aurons du mal à la faire entendre. Depuis dix jours, les écrans ressassent la gloire des “valeurs” françaises. Nous prenons cela au pied de la lettre. S’il existe quelque chose comme une valeur française, c’est d’avoir refusé depuis au moins deux siècles de laisser la rue à l’armée ou à la police. La mobilisation à l’occasion de la COP21 est un enjeu primordial et nous n’acceptons pas que le gouvernement manipule la peur pour nous interdire de manifester.

Dimanche 29 novembre, nous appelons à braver l’état d’urgence et à nous retrouver à 14h sur la place de la République.

Pierre Alféri, romancier, poète et essayiste
Ludivine Bantigny, historienne
Thierry Bourcy, romancier
François Cusset, professeur de civilisation américaine
Gérard Delteil, écrivain
Pascal Dessaint, écrivain
Joss Dray, auteure-photographe
Cedric Durand, Économiste
Caryl Ferey, écrivain
Jacques Fradin, Mathématicien, chercheur en économie
François Gèze, Éditeur
Christophe Granger, Historien
Naira Guénif, Sociologue
Eric Hazan, éditeur
Hugues Jallon, éditeur
La parisienne libérée, chanteuse
Jérome Leroy, romancier
Laurent Lévy, Essayiste
Frédéric Lordon, Directeur de recherche au CNRS
Seloua Luste Boulbina, Philosophe
Joelle Marelli, philosophe, écrivain, directrice de programme au Collège
international de philosophie.
Annie Ohayon, ingénieure
Alain Parrau, enseignant Paris 7
Willy Pelletier, sociologue
Serge Quadruppani, écrivain
Nathalie Quintane, Poétesse
Jean-Jacques Reboux, romancier, éditeur
Olivier Roueff, chercheur
Jean-jacques Rue, programmateur de cinéma et journaliste
Julien Salingue, Docteur en Science politique
Ivan Segré, Philosophe
Yannis Youlountas, écrivain, cinéaste

Eric Hazan est écrivain et éditeur français. Il a fondé les éditions La Fabrique
Serge Quadruppani en attendant que la fureur prolétarienne balaie le vieux monde, publie des textes d'humeur, de voyages et de combat, autour de ses activités d'auteur et traducteur sur https://quadruppani.blogspot.fr/
Ivan Segré est philosophe et talmudiste
lundimatin c'est tous les lundi matin, et si vous le voulez,
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