War tape - Dialogue dans la civilisation

Par le rabbin Charles Atlan (de Jérusalem)

paru dans lundimatin#42, le 4 janvier 2016

Dans une livraison de « lundimatin » (7 décembre 2015), Serge Quadruppani a proposé une interprétation de la guerre menée par l’administration Bush fils en Irak :

« Car ce n’est pas seulement chez l’EI que l’imaginaire de l’apocalypse joue un rôle déterminant. Le sionisme chrétien, doctrine de multiples églises protestantes américaines (40 millions de fidèles), incarné sur le plan médiatique par des télévangélistes vedettes, a joué un rôle déterminant, à travers l’influence des néoconservateurs sur le gouvernement Bush dans l’irrationnelle [4] intervention américaine en Irak, qui fut le creuset de la naissance de Daesh. »

En note [4], il explique : « On veut dire étrangère à la rationalité instrumentale occidentale et même à sa raison économique ». La seconde intervention américaine en Irak, celle de l’administration Bush fils, serait donc, à suivre l’auteur, « étrangère à la rationalité instrumentale occidentale et même à sa raison économique ».

Je soutiens pour ma part le contraire, à savoir que la seconde intervention en Irak s’inscrit pour l’essentiel dans la continuité de la première et qu’il n’y a donc, à ce sujet, rien de bien nouveau sous le soleil, quelle que soit par ailleurs l’imagination des experts en « communication » qui, depuis les télévangélistes américains jusqu’à BHL ou Madonna, peaufinent le narratif de la raison économique. Et je suis en mesure d’en apporter les preuves matérielles.

Il se trouve en effet qu’un de mes cousins, aujourd’hui à la retraite, a travaillé pour le Mossad. Lors d’un échange informel, il m’a laissé entendre qu’on pouvait se procurer l’enregistrement audio d’une réunion ultrasecrète des plus hauts dirigeants politiques et militaires de l’administration Bush fils, précisément au sujet de l’intervention en Irak. Voyant mon intérêt éveillé, il m’a donné une adresse, qui m’a conduit chez un arabe du souk de la vieille ville. L’arabe, qui apparemment était en affaire avec mon cousin, m’a d’abord interrogé sur mes motivations, je les lui ai exposées et alors il m’a fait une offre : deux cassettes, la première à prix plein, la seconde à moitié prix, le tout payé en cash.

Je lui ai demandé de quoi il était question dans l’autre cassette, et il m’a répondu qu’il s’agissait d’une autre réunion ultrasecrète des plus hauts dirigeants politiques et militaires US, mais cette fois de l’administration Bush père lors de la première guerre du golfe, immédiatement après l’écrasement des armées de Saddam Hussein. Nous avons marchandé autour d’un verre de thé, puis nous nous sommes mis d’accord et j’ai acheté les deux cassettes, qui sont donc aujourd’hui en ma possession. Or en écoutant les deux enregistrements, on arrive à des conclusions bien différentes de celles de Quadruppani, puisqu’il n’y est pas question, semble-t-il, d’autre chose que de la rationalité instrumentale occidentale et de sa raison économique. Voici une transcription littérale, aussi fidèle que possible, du contenu de ces deux cassettes. Jugez plutôt :
Enregistrement n°1 (Réunion ultrasecrète de l’administration Bush père) :

« What about the motherfucker now ? – Let’s finish the job and shoot him. The game is over – Take it easy man, we need Saddam. – Are you joking ? - He means business. Saddam is still useful to us – So fucking true, with this guy Iraqis must keep quiet and obey. – But we hate this motherfucker ! – This is incorrect, man. There’s nothing personal. - Okay boys, Saddam will take care of business. Now switch on TV, the game’s begun – What game ? – Red Bulls. – You like soccer ? I can’t believe it ! – Mama’s spaghetti with meat sauce and soccer, all that he loves. – Jesus Christ ! What a Jew loves, tell me ? – Take it easy, Macaroni. – Kiss my ass, motherfucker. – What is soccer ? - Forget it man ».

Enregistrement n°2 (Réunion ultrasecrète de l’administration Bush fils) :
« This motherfucker is not useful anymore. – So fucking true, we’ll take care of business. – It will be called : "war on terror and for democracy, freedom and so on". – No way men, nobody would believe your story. – What do you know about movies ? Nothing ! So do your job and that’s it - A seven year old boy would not believe it ! Jesus Christ ! T’is really ball shit ! – Come on nigger, you’re so pessimistic. Do you believe in God ? – What’s that got to do with the price of tea in China ? – If you believe in God, the seven year old boy will believe our story. - That makes sense. – Ball shit ! You’re fucking crazy – Relax man, life is great, take a sniff and feel good. Look, the day is coming, and sooner than you think, these French froggies who are causing you trouble, you’ll see them kiss your ass on TV, I swear ».

L’arabe du souk m’avait parlé en outre d’un mystérieux « bonus » si je prenais les deux cassettes. Et en effet, dans le paquet qu’il m’a remis se trouvait le texte d’une version française de ces deux enregistrements, avec pour en-tête « Quai d’Orsay : Ultraconfidentiel ». Voici son contenu :
Enregistrement n°1 :

« Que décide-t-on au sujet du président Saddam Hussein ? Faut-il conduire les armées de la coalition jusqu’à Bagdad ou bien maintenir le dictateur ? – Nous pourrions profiter de l’occasion pour l’arrêter et le juger. – Ce serait bien imprudent : ces dictateurs arabes ont fait leur preuve, ils savent stabiliser les populations. - En outre, nous sommes mandatés par l’ONU et notre mission s’arrête à la libération du Koweït. – C’est entendu, Saddam Hussein poursuivra son œuvre de stabilisation. - Et pour y apporter notre contribution, nous imposerons un blocus économique à l’Irak. – Au risque d’entraîner la mort de centaines de milliers d’irakiens ? – Oui, car on se donne les moyens de sa politique. »w

Enregistrement n°2 :

« Nous devons libérer le peuple irakien de la dictature de ce terroriste sanguinaire. – Mais nous avions pourtant convenu de le maintenir au pouvoir, aussi pourquoi changer notre fusil d’épaule ? – C’est qu’il y a eu un petit changement. – Quel est-il ? – On s’est rendu compte que soutenir, mordicus, les régimes autoritaires, en croyant qu’ils sont les meilleurs moyens de stabilisation des populations, c’était une erreur. – Aujourd’hui, du reste, les irakiens en ont marre. - Et la grandeur des Etats-Unis d’Amérique, c’est de ne pas rester sur les positions d’il y a dix ans. – Je crains fort que ce petit changement, Messieurs, soit une grossière erreur tactique. – Ne soyez pas trop conservateur, cher ami. – Allez-y donc, traitez-moi de réactionnaire ! – Eh bien oui, parfaitement, vous êtes réactionnaire. Car voyez-vous, le monde ne s’est pas arrêté il y a dix ans. Le monde est différent aujourd’hui. Et aujourd’hui notre devoir c’est de prendre en compte les aspirations du peuple irakien à la démocratie et à la liberté. Et c’est donc ce que nous allons faire. – En bombardant une seconde fois l’Irak ? – Oui, car on se donne les moyens de sa politique. »

Certains lecteurs pourraient douter de l’authenticité de ces documents, et de ma bonne foi. Qu’ils écrivent donc à « undimatin » et pour la modique somme de 400$ (hors frais d’envoi) ils recevront sous trois jours les deux cassettes assorties du bonus « Quai d’Orsay : ultraconfidentiel ». En attendant, je vous donne un avant-goût de la qualité audio de mes cassettes par le biais de la vidéo ci-jointe, dont vous écouterez les premières minutes. C’est une sorte d’échantillon gratuit, pour vous faire une idée. Et croyez-moi, en termes de High Fidelity, vous ne trouverez pas mieux. Cliquez ici :

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