Pourquoi écrire des poèmes ?

L E S T R O I S C R A N E S Partie 1
jérôme avraham benarroch

paru dans lundimatin#98, le 28 mars 2017

Dans Le règne et la gloire, Giogio Agamben écrit que « la poésie est précisément cette opération linguistique qui rend inopérante la langue – ou, selon les termes de Spinoza, le point où la langue, qui a désactivé ses fonctions communicatives et informationnelles, repose en elle-même, contemple sa puissance de dire et s’ouvre, de cette manière, à un nouvel usage possible » (Homo Sacer. L’intégrale, Seuil, p. 641).
Plus loin, il conclut : « Ce que la poésie accomplit par la puissance de dire, la politique et la philosophie doivent l’accomplir par la puissance d’agir. En suspendant les opérations économiques et biologiques, elles montrent ce que peut le corps humain, elles l’ouvrent à un nouvel usage possible » (Ibid.).
De ce nouvel usage possible, les poèmes de J. A. Benarroch, à ce jour inédits, nous paraissent explorer, frayer une voie, à distance de l’expérimentation purement formelle d’une part, du néo-classicisme d’autre part.
Les poèmes qui suivent sont extrait d’un recueil intitulé Les trois crânes.

L E S T R O I S C R A N E S 2016 Partie 1
— jérôme avraham benarroch

je suis la plus vieille, que je sois brave de gagner la rive si je dois brusquement me noyer en larmes par où attenter à ses lèvres bec et os compris

S’il se dérobe de cet effort pour jamais égaré la seule aubaine légitime et leur destinée ; de l’atome de lui sembler particulière à tout l’avenir éclos notre barcasse la fortune d’un calme qui lui est échue à la reproduire la revivre merveilleusement mêlée d’accroître à nouveau la totalité du fond de toi

son eau herbeuse la dessication des berges et du fond la plus désirable de le requérir de cendres, de quantité, de ton crâne sous ma couronne une seconde fois tout à travers ce premier abord de lui dire oui chaque fois à travers cet élément terrestre les plissements terrestres, les plissements les plissements terrestres et alpins

il y eut suffisamment d’eau atteinte pour respirer les buissons plusieurs mois, à la date fixée l’eau était née ces galeries de bois traversé en elle entre les armoises

ou de l’aubier ou de terre dans l’apparition brusque observée duquel tu es née la montagne la montagne la plus accentuée à atteindre

quatre cent mille, un demi million, à nouveau s’ajoute ses quatre nageoires à un nombre fixe comme les pièces osseuses sapides venant à nous et pour mourir de la masse vivante vertigineuse tout entière

Les seaux d’eau les colliers l’enfant seuls sous cette tente dès ce moment

au soleil orange le fruit immobile
humide ou sec la faction de coquillages
amande de mer
tellines
pour la bouche les cheveux à extraire les yeux
oisillon battant des ailes etc
hibou des dunes et toi
palombe

de routes, de voies de nappes au sein du jour le mot de never, das habe ich nicht gedacht, qui doit nous retenir celle de l’oiseau le sous-marin qui à l’accentuation d’un bord par une précision déconcertante Le « ne pas », un « jamais » de tout temps qui est de cette existence, comme temps brusque et vivable, à foisonner depuis deux pivots concentriques comme condition libre de la même immensité fondamentale temps catégorique fondée sur elle, le plus opaque, le plus fixe, le plus considérable affranchi entre le volant et l’enfoui irrespirable ciel découverte vivante en toi

du matin au soir j’avais aussi fini par découvrir dans ma colère une petite ligature, de la plus rare, fini par découvrir au seuil de ma colère au seuil de la masse vivante agrandie l’amour inexpérimenté de notre mère assise et terrestre plus qu’un esprit le fil de sa colère face au lavis d’aucun phénomène d’un ordre à part nomade par leur nouveauté quelque chose d’un type nouveau d’un ordre à part une série d’autres faits une éclosion systématique de sa porcelaine si ma force contre laquelle se dresse la colère avait eu se source de cet astre par cette ampleur de s’ajouter à toi

Au réveil cette enveloppe arboricole qui est ici le nom du système d’attendre d’elle

avaient été, avaient été transportés, ou flottés là, à l’ultime longitude commune pour conduire leur existence en ce lieu par une rivière un torrent, des animaux qu’on nous trouve associés

de l’eau, ni aucune autre unité sévère, à cette source semblable à essence fixe de ravisseur le ravisseur le ciel hyalin opalescent hypertrophique

Fouillis des ronces des chèvrefeuilles jusqu’aux rayons principaux il l’enlaçait endormie une seule fonction plus indolore son visage soulevé les orbites soulevées vers le large le visage distinct et tendre l’expression blanche et voisine du désespoir mais courbe et radiante comme l’horizon

la broussaille les trois rivières sœurs par dispersion le buisson de bifurcation inouïe les unes aux autres de ramification de tendreté de direction commune en tous sens mais qui demande toute une faune fugitive à se partager probablement en un crime à quelqu’un très fortement isolé d’aimer qui nous sépare à la pointe venteuse inexpliquée de la lignée favorable

qu’il vienne que quelqu’un qui en coûte à mon cœur achevez de l’en guérir ou je la ramènerai qu’il vienne en vérité qu’il en coûte à ton cœur cette femme de ton cœur jusqu’à ce qu’il m’entende de votre amour Madame et je vous prie toujours

à grande aubaine à cette écaille une petite unité subrécente exclusive et de courtes lamelles, leurs écailles prolifèrent accompagnés de leur géant

tout meurtri qu’il paraisse encore de foules accumulées des phases antérieures sur la ligne commune de propagation le front d’avancée le bourgeonnement de bifurcation qui se courbe un type de faîte presqu’immédiate comme une série de flèches sur cette ligne d’un trait critique, d’une discontinuité critique un front d’avancée d’un végétal qui ne se détachent pas la tête, quelque conscience de leur ampleur, qui se substituent les une aux autres en série de rameaux voisins comme un rayon blanche se réfracte en apparaissant une pulvérisation de ce genre sur tout ce qui l’entoure de nageurs insectivores carnivores à ce qui t’entoure de poussée fondémentale

le bec les pattes leurs enroulements sous des yeux vivante de survivants la cupule son ordre de grandeur juvénile autour de nous où devient le centre cette branche où se fixent à leur tour ce qui ne se détache plus de tous becs de toutes les couleurs d’un faisceau d’une complexité inouïe : l’œil en demi-fruit sec à répéter toucan, et toi, huppe bleue

quel heureux destin n’en peut être effacée
on te nomme et ce nom aux débris ingénieux
d’une faune ancienne
sans figure et sans bruit les rassemble à la vie

d’invasion à aider toutes sortes de dents, leur place, leur répétition toutes sortes d’ongulés, les nervures, tes arcades, les oreilles, les boucles, une série de ruisseaux par un orage cette foule que le temps nécessaire était, y avait, ses prolongements sans interruption pour ne plus jamais revenir en arrivant à lui

ce poussée aux antipodes je le répète rien ne l’oppose, aux antipodes, le blanc d’en bas initial à se représenter le cas secondaire des étoiles, se représenter, de nous représenter la chance, la chance impénétrable à te demander cette superficie cette superficie instantanément irrésistible certains vieux graviers deux ou trois éclats à l’une de tes extrémités remarquable en quelque parcelle de ce monde remarquablement primitive en un même gisement de lumière blanche une industrie remarquablement primitive

dans la mesure exactement où elle n’est pas suffisamment affranchie de ce qui le partage à laquelle tout de la vie l’irrespirable à son comble de complexité entre le mesurable et le continu ni sens ni relais comme condition à propos de ce qui se polarise ou se répète les pierres sans aller bien loin les mouvements millénaires et de plus en plus ce qui se répète leur limite impérieuse à se confondre il n’y en a qu’une si voisine et innombrable en d’aussi dangereux rivages Le sentiment qu’il ne faudra aucune autre possibilité, au total, par la commande des organes littéralement fondative au total, pour un schème de leur ampleur lorsqu’est ébranlée de toi la fonction du tout est ébranlée du dedans et dehors obligatoirement comme un monopole l’orée l’ignorance convergente de l’antique demeure en un buisson de ce genre

il nous est toujours possible que l’essence soit conçue sans la rencontrer elle-même ou bien, ce qui revient au même, d’y intercaler l’essence d’une incessante série torrentielle, assujettie, d’où aura bourgeonné d’impondérables forces pour de nouvelles fouilles plus favorables une sorte d’attrait parmi les blocs de gisements des hauts lointains ce qui revient au même une brèche de ce type qu’un point obscur demeurerait obscur très usée mais très brusque probablement silicieuse on ne va guère songer à s’en débarrasser leur bloc de rayons jusqu’à l’innombrable où ton regard nous plonge son intégralité quantitative vers laquelle nous fendons les unes dans les autres

Des baies noires lui amena-t-il comme une jeune sœur le lucane d’un sauvetage perdu d’où il put la rejoindre saurien, corbeau, châtaigne, atteignirent le lac étaient en chemin vers l’enceinte à bras ouverts nos casemates dans les fontes du silence le bief, les sulfures, le sein fragile de toute cette griffure d’or vers toi

chez les oiseaux l’homme de te déshabiller un homme qui n’aurait jamais connu aucun animal le plus observable et déroutant d’apparaître nous n’arrivons jamais à observer la loi qui demande la couleur ou la forme de ces feuilles d’une chute libre qu’il a commandé envahie et gagnée plus qu’au dernier instant de nos instants

l’enroulement à un point de hasard celle-ci leurs alevins leurs ébats d’un talus à l’écart inobservable intérieur les torrents plusieurs vallées plusieurs aires d’eau froide le franchissement l’eau froide de cette tendresse la demande prolifère

si s’abattre un mélèze sous les nuages par nos crânes incomplets à grands yeux et elle aussi d’écailles menues à grands yeux, à nageoires de sa grandeur pensante les rivières herbeuses de tout désir ton regard comme une discontinuité majeure de ses douleurs l’assimilation première de se réfléchir de l’autre moitié de l’origine

en cette rivière de mille alevins sur les herbes poussés à ce cône de convergence ou à une certaine pression du fond se vaporisent changent d’état très inétendue une femme couchée tel que le langage le pose au lieu où ces points critiques dans les mouvements au lieu dit immobile de son cadavre se laissent deviner leurs nageoires et leurs yeux actuels d’un processus majeur de mutation un consentement tropical vertigineux partout où ils pourront aller d’irréversible

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