Poème depuis la plage - Justin Delareux

comme une rencontre fortuite

paru dans lundimatin#156, le 10 septembre 2018

il fait beau,
on est bien ici,
le fort de Brégançon brûle,
les premières poutres tombent,

on enlève nos chaussures,
en arrivant sur le sable,
on se regarde,
il fait beau,

les flammes dansent et s’élèvent,
sur les restes du toit,
du fort de Brégançon,

pendant que le jouet de Brigitte explose,
les chiens débutent à mordre leurs maîtres,
nous nous mouillons le haut du dos,
on dit que c’est le thermomètre du corps,

il fait beau,
on se baigne,
on n’a pas de travail,
séquestré dans ce monde,

les pins prennent le vent,
on enlève nos chaussures avant,

les bateaux prennent l’eau,
et l’équipage en lots,

quais des orfèvres la chaussée penche,
la diction est sourde,
c’est une scène sans texte,
sur les restes du toit,

on rentre,
dans le tas : au boulot,
on sort de l’eau et on s’essuie,

on laisse tomber,
on laisse tomber ce qu’on a,

et la chaussée s’engouffre dans la seine avec le quai,
plus de mille uniformes à l’eau ;
qu’on achève les autres.

on a trop soufflé sur les bougies
au château de Chambord,
les rideaux se répandent comme les cris,
le gâteau est définitivement cuit

il fait beau,
ça doit rire,
faut dire qu’on s’amuse ici,
qu’on fait de beaux poèmes

les pieds dans le sable,
on a retrouvé le président-directeur général,
mort depuis quarante jours

on se déshabille l’un à l’autre,
l’Élisée brûle aussi,
on se prend sur un rocher.

des organes en putréfaction,
décors les nouveaux murs de Chambord,
oui, petits nous construisions des châteaux,
pour le plaisir de les détruire,

et le vent et la chute,
nous sentons venir,

notre inhospitalité toute ouvrière,
froideur historique du travailleur,
en sommes,
tout ce qui pour vous caractérise,
notre manque de caractère.

sur la plage,
on se matte,
les internets sont coupés.

j’ai brisé ton crâne contre l’écran
que tu tiens pour main,
et nous rions.
nous faisons les poches à ceux qui passent,
on se maintient.

on roule un pli,
loin de tout on extrait
l’ ivresse de la matière
que l’on transforme.

fusillade au palais bourbon !
on se fait un apéro.
le petit fini sa glace,
retourne un fourgon,

on à perdu nos papiers
on a arrêté de voter

c’est de notre faute,
s’il ne reste plus grand chose
des poutres et des tapis
du porc de Brégançon.

la piscine était infestée
de gardes du corps ne sachant nager,

se débattant les uns des autres ;
le poids du calibre fait couler,
des trois pièces gonflés d’air,
puis d’eau,

l’eau rentre dans la montre et dans la bouche,
toute une vie à épargner.

c’est notre comédie,

il fait beau,
on se caresse,
on se lèche,

on compte le nombre de bulles 
qui remontent à la surface,

les restes des poutres feront de bons fusains,

le magasin est ouvert,
prêt de la plage,
on met nos chaussures,

il était fermé,
mais nous l’avons ouvert,

on menace de mort,
on fait de beaux poèmes,

on incite à l’émeute,
des ressources humaines,
préfectures carnages,
des exercices de vacances,

on fini notre assiette,

on cherche
à faire chanter le néant
dans lequel on est pris.
Néant fomenté,
triste chanson d’aujourd’hui,

on foule, on trou,
pelouse, parterres
parvis, places, squares, parcs,
marches, promontoires, toboggans ;
quelques glissements,

on foule à moitié nue,
la connerie des aménagements présents,

un gars casse à la masse,
là bas l’horodateur,
comme pour couvrir,
ou annuler le temps.

les heures peuvent se rallonger,
lors ce que les premières briques partent,

on est sur un rocher,
au milieu de l’eau,

lors ce que les premiers blindés s’envolent,
au bruit du souffle qui les aident,

c’est la panique pour vous,
on a les pieds dans l’eau,
pépère,

on ne s’absente pas longtemps,
on ne revient jamais,

les restes calcinés du fort de B.,
sont transférés au palais de T.

la route se fait,
on a les cheveux gras,
on a peu dormis,

le palais est réquisitionné,
dans la foulée,
les portes sont accrochées aux murs,
on s’expose.

on est bien là,
il fait beau,
on va faire simple.

l’eau coule sous les ponts,
la marée-chaussée restante s’affole,

on remplit le bidon d’huile,
le petit bidon,
dans le réservoir,
on accélère,

il fait beau c’est l’été,
on hiberne,

arrangé de tenir notre petit pied à terre,
à l’autre bout du monde et des doigts,

les journées passent,
on fini ce qu’il reste,
on fini le bout et,
on arrête,

la rentrée n’a pas eu lieu,
on a tous vaqué,

l’été on se chauffe le cul,
on sniff le calcin,

on patiente l’empire tomber,
on se reluque,

attirés par l’air libre,
quant tout cloisonne autour,
empêche ici,
étouffe partout où ça échappe,

on est ça,

on écrit,
on conjure,
la rencontre fortuite,
d’un parpaing sur un gradé.

un petite carte pour toi,
sur les prospectives que je mène,

tu sais,
souvent je vois avant,

je t’embrasse,
pépère

_

Justin Delareux

bévue d’été sans corrections,
août 2018

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