La Plaine : appel à une « manif de masse(s) » le samedi 24 novembre.

Le mur de la Plaine doit tomber. Le mur de la Plaine tombera.

paru dans lundimatin#166, le 21 novembre 2018

Depuis plus d’un mois, Marseille est le terrain d’une bataille acharnée contre le projet de rénovation de la Plaine. Le 20 octobre dernier, nous relayions un appel national à venir défendre la place. 3000 personnes ont manifesté et accompagné la construction d’une structure en bois, le « gourbi 8 », apporté en cadeau à la Plaine de la part de la Zad de Notre-Dames-des-Landes. Depuis, le Gourbi s’est fait détruire, la place a été murée, les travaux ont bel et bien commencé. Mais Marseille est une ville d’acharnés : tous les jours, des gens sont venus perturber le chantier jusqu’à faire tomber le mur qui le protégeait le soir du 4 novembre. Après l’effondrement des trois immeubles à Noailles le 5 novembre, la colère est montée d’un ton et le chantier de la Plaine apparaît d’autant plus inutile. Mercredi dernier, 10 000 personnes ont défilé lors de la marche de la colère qui s’est terminée par un déferlement de violences policières alors que la manifestation était aux portes de la mairie. Voici un nouvel appel à une manifestation nationale le samedi 24 novembre qui prévoit de s’en prendre à la politique de la ville et au désormais fameux « Mur » de la Plaine.

Appel aux masses contre le Mur de la Honte et le chantier de la Plaine.
Déambulation festive offensive et masquée au départ de la sinistre Mairie de Marseille, Vieux Port, samedi 24 novembre, 16h.

On en rêvait, le quartier l’a fait, la Soleam l’a tué

Déjà plus d’un mois. Plus d’un mois que les camions de la Soleam, protégés par des lignes de CRS, ont débarqué sur la plus grande place de Marseille, la Plaine. Plus d’un mois, le 11 octobre dernier, que Gérard Chenoz (adjoint au maire et président de la Soleam) et ses amis bétonneurs tentent d’en finir avec la contestation d’un quartier, opposé à leur projet dit « de requalification ». Sans concertation, ce projet indigne, démesuré et ne répondant en rien aux priorités des habitant-e-s maintes fois exprimées, n’a jamais eu d’autre objectif que d’accélérer la gentrification du quartier... C’est-à-dire effacer les plus pauvres et laisser place aux populations aisées en faisant exploser le prix du mètre carré, remplacer ses commerces à bas prix par de grandes enseignes, et son marché populaire par des étals à touristes. Une véritable « montée en gamme » pour anéantir le « vivant ».

Gentrification partout ! Soleam Dégage !

La mairie a tablé sur la lassitude des uns et la résignation des autres... une stratégie d’abandon de la place et de l’usure des habitants. Elle a tant vanté les charmes du quartier exotique auprès des investisseurs et des touristes friqués, que dans les maquettes des promoteurs, les quadras branchés du Marseille connecté et apaisé annonçaient déjà le monde radieux. Et puis, plus rien. La contestation a révélé dans toute son horreur le visage municipal : brutal, violent, autoritaire et méprisant.

Plus d’un mois donc. De matraquages, d’arrestations, de procès, d’intimidations, et une volonté unique : faire table rase. Créer la sidération par la violence, avec ses rangées de CRS mobilisés à chaque journée d’opération. Empêcher tout retour en arrière par la coupe mortifère de 40 des 115 arbres de la place, la destruction des grilles et des espaces de vie, les blocs de béton et la fermeture complète des accès à la place. Sans aucune information pour les des habitant-e-s et commerçant-e-s.

Depuis un mois, pourtant, l’arrogance de l’élite politique marseillaise bute sur le quartier, son inventivité. La colère s’est ancrée : les palissades ont volé, d’autres ont brûlé, le mistral s’est mis à déplacé les blocs de béton, entre-temps recouverts de messages et de peintures aux couleurs du quartier. La créativité a repris ses droits : libéré de ses grillages, le cœur de la place s’est converti en espace de discussion et d’assemblée permanente, avec toujours plus de nouveaux venus, comme lors de la grande manifestation populaire du samedi 20 octobre. Réunissant plusieurs milliers de personnes, elle s’est conclue par la construction du Gourbi n°8, structure offerte par la Zad de Notre Dame des Landes, et détruite sous haute protection policière quelques jours plus tard.

droit de reponse from primitivi on Vimeo.

par primitivi

D’anciens kiosques à sandwiches ont été réouverts, un terrain de foot aménagé, des jardinières construites. Des équipes de ménage auto-organisées, elles, sillonnaient la place, redonnant à la place son atmosphère populaire, vivante, festive, entremêlée. Là où ils ont détruit, le quartier a reconstruit. Ne sachant plus que faire, les camions et outils de chantier ont même plié bagage un temps.

Le Mur de la Honte

C’en était trop pour les bétonneurs et leurs élus : lors d’une conférence de presse où le mensonge concurrençait le mépris, réduisant les opposants à des ados en mal d’aventure amoureuse, l’infâme Gérard Chenoz annonçait l’édification d’un gigantesque mur pour « sécuriser » le chantier.

Son chantier. Un demi-million d’euros ou presque, 2,50 mètres de haut et mille tonnes de béton. Un vrai mur de Berlin et presque un aveu de défaite devant l’impossibilité à poursuivre les travaux sans ce mur de la honte.

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Le mistral a bien continué de souffler depuis. Des pans entiers du mur sont tombés et les actions continuent de ralentir un chantier, de plus en plus inutile et coûteux.

Mais la vie, les allées et venues, les discussions sont désormais impossibles autour du Mur. Et le quartier va mourir à petit feu. Les arbres sont à nouveau arrachés mais ils ne produisent plus qu’un bruit de massacre à la tronçonneuse. Invisible.

Coup de vent from primitivi on Vimeo.

Des Millions pour une place et un Mur. Pas une thune pour les habitants de Noailles

La honte résonne d’autant plus amèrement devant la colère provoquée par l’effondrement des immeubles de Noailles, les morts, les bâtiments détruits, les centaines d’évacué.e.s, de déplacé.e.s, et le mépris de la mairie comme les jeux qui s’accélèrent en haut-lieu pour en finir avec cet autre quartier historique de Marseille.

Le mur de la Plaine et les morts de Noailles, si différents, forment les deux facettes d’une même logique vorace et mortifère, menées par les mêmes rapaces.

Façonner un centre-ville aseptisé, franchisé et nettoyé de ses pauvres, de ses immigrés, en édifiant des murs et en laissant les autres s’effrondrer. Et tuer. L’effondrement n’a rien d’une négligence : résultats d’une stratégie de pourrissement cynique et mûrement réfléchie, les morts de Noailles sont déjà ouvertement utilisés, au pied des décombres, pour ’dégager tout le secteur’ comme l’a dit lui-même le maire Jean-Claude Gaudin. Vouées à leur seul profit, à leurs villes contre nos vies, et à leurs murs contre nos quartiers, ces logiques ont assez duré. Plus que jamais, à la plaine, ce chantier, c’est non.

Le mur de la Plaine doit tomber.

Le mur de la Plaine tombera.

P.-S.

Appel aux masses pour un bal masqué contre le Mur
Samedi 24 novembre 16h.
Hôtel de ville (ou mairie renversée)

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