Machine de guerre et subjectivation politique : quel devenir-révolutionnaire de l’émeute ?

« L’émeute ne fait pas consensus... Et pourtant des fois ça pète. »

paru dans lundimatin#181, le 4 mars 2019

L’émeute ne fait pas consensus. C’est le moins que l’on puisse dire. L’émeute est par sa nature même une division, une rupture dans un ordre social établi. Justement, cet ordre social, « démocratique » comme il est appelé semble être celui idéal du consensus. Ou plutôt du moindre mal. Le « pire des système à l’exception de tous les autres ». En quelques sortes, la forme la plus évoluée de l’État, dans sa fonction de domination.

Et pourtant.. Et pourtant des fois ça pète. Les flammes envahissent les rues, les vitrines volent en éclats, les puissants se terrent dans leurs palais et les bourgeois tremblent.

Comment la légitimité d’un système qui la veille encore assurait son pouvoir sans fléchir peut il se retrouver face à la colère de la rue. Quelles barrières ont donc été franchies, quelle soupape n’a pas fonctionné ? Car c’est bien sur un système de soupapes que fonctionne l’État. Une gestion des fluides sous pression qui viennent autant faire avancer sa machine que la dérégler ou l’anéantir.

Qu’est ce qui se joue pour que, d’un coup, le consensus ne prenne plus. Que la fatalité ne pèse plus sur les esprits ?

Et après ? L’émeute n’est qu’un moment. Aucun révolutionnaire ne soutiendra jamais qu’elle est une fin en soi. L’émeute c’est cet événement qui vient déplacer les lignes, bouleverser l’immuable apparent. L’émeute polarise, elle force à prendre position (les barricades n’ont que deux cotés) mais elle vient également rompre l’histoire. Elle fait irruption dans la « causalité historique » [1] non pas pour en inverser le sens mais simplement l’anéantir. Elle est une négation pure, une pure extériorité. Une machine de guerre qui a été forcée de prendre pour objet la guerre.

Mais comment en arrive-t-on à l’émeute ? Comment le consensus se transforme-t-il en négation ? Et qu’en sort il ? Que pouvons nous, nous révolutionnaires, faire advenir d’une force brute de destruction ? Quelle est sa forme ?

Nous tenterons d’appréhender quel peut être le trajet d’une subjectivation politique qui se déploierait d’un refus initial, d’un débordement pour aller, via un processus de subjectivation collective, à l’élaboration d’un devenir-révolutionnaire, et la mise en place d’un nouvel ordre social, qui ne soit ni l’ordre institué de la forme État ni un « désordre ». Tout simplement un nouvel ordre.

« Ce qui est nié par la révolution ce n’est pas l’ordre en général mais cet ordre en particulier » [2]

Le refus de l’assujettissement

« Le signifiant règne sur toutes les scènes de ménage comme sur tous les appareils d’État » [3]

Nous l’avons vu l’émeute se fonde sur une négation, le refus d’un ordre imposé. Mais, des prémisses d’un « non » à une pratique émeutière, il peut y avoir un monde.

Pour commencer, quel est justement cet ordre qui s’impose à nous ? Et quels moyens a-t-il à sa disposition pour nous soumettre ?

L’État revendique rarement directement sa domination. Ne sommes nous pas des citoyens libres dans une démocratie ? Nous votons, ou en tous cas, nous avons le droit de le faire. Nous bénéficions de certaines libertés individuelles et collectives (presse, culte...). Et pourtant, pouvons nous dire aujourd’hui que nous sommes réellement libres ? N’oublions pas que la légitimité d’un discours est toujours nécessaire à la domination. Même le IIIe Reich se fondait sur un discours, et pour le dire avec Arendt, il n’y a a pas de totalitarisme sans consentement.

Les premières pistes de cet asservissement qui ne dit pas son nom sont à chercher dans le langage. C’est là une arme puissante dans les mains de l’État qui effectue avec brio un sur-codage constant de ce qui pourrait lui échapper. Les codes fonde les empires, du « code civil » au « code noir ». Ces codes sont un héritage guerrier et nous ne devrions jamais oublier « le sang qui a séché dans les codes » [4]. Ce sur-codage impérial trouve son accomplissement dans la Novlangue d’Orwell où « La guerre, c’est la paix. La liberté, c’est l’esclavage. L’ignorance, c’est la force. » [5]. Ce sur-codage, flagrant ici trouve des exemples dans notre monde ; si jusque dans les années 70-80, les prolétaires étaient entendus comme des exploité.e.s, aujourd’hui, les mêmes sont devenus des défavorisé.e.s. Le glissement sémantique est habile car si la situation sociale réelle reste la même, les premier.e.s concerné.e.s ne peuvent plus se percevoir de la même manière. Il est évident que si un.e exploité.e induit un exploiteur dont les intérêts s’opposent nécessairement, un.e défavorisé.e n’est plus que le jouet du sort ou de sa propre incapacité [6].

C’est dans cette perception de soi que nous voulons voir le premier mécanisme contre lequel se dresse l’émeutier.e. Cette subjectivation n’est plus qu’un assujettissement. Nous sommes pris dans un régime de signe qui fait des nous des « sujets d’énoncé, c’est à dire [des] sujets pris dans des énoncés conformes à la réalité dominante » [7]. Et cette réalité dominante c’est l’ordre social de l’État et tout son jeu entre normes et contrôle. L’État se lance donc dans la « production d’individus en série » [8].

Mais, évidemment, tout ça ne colle pas toujours. Ça fuit de partout même. Eh oui, car ce qu’il faut capter c’est le désir. Et le désir ne se laisse pas rabattre si facilement sur une forme cristallisée. Il y a toujours une tension entre le désir et les cases où on veut l’enfermer. C’est là que l’on peut remarquer les plus grandes prouesses de l’État, dans sa capacité quasi-infinie à s’adapter et se ressaisir de presque tout ce qui viendrait le perturber. Mais il y a toujours un presque. Un espace qui, déjà, devrait se cartographier comme un espace lisse, ou rhizomatique. Nous aimons y voir un terreau ou une forme larvaire de lignes de fuite en devenir, en virtualité qui ne demandent qu’à s’actualiser.

Et justement, si nous parvenons à collectiviser ces embryons de lignes de fuite, à les faire entrer en résonance au sein du champ social, par des rencontres, des discussions ou des pratiques quelles qu’elles soient, nous pourrons peut être infléchir le cours de cet assujettissement. Tout commencera nécessairement par un refus, un surplus, « un excès de danger, d’information ou d’émotion » [9]. C’est ça qui se joue dans l’émeute.

Intéressons nous au devenir de cet agencement devenu collectif qui n’est encore qu’un refus à plusieurs. Quel est donc le sens de cette « négation conjointe de l’échange et de la logique marchande » ? [10] C’est bien la négation d’une logique qui est à l’œuvre, celle du capital et de l’État. Ce refus de l’échange se retrouve également dans cette négation brute qui vient prendre la place de banales revendications. En effet, l’émeute « n’est pas une revendication mais une guerre civile » [11] , le refus de laisser à l’État la possibilité de s’adapter encore et de se réapproprier la colère. Toute lutte qui revendique doit se considérer comme perdue d’avance car elle risque ainsi de perdre sa force par l’assimilation de ses revendications en une identité. Et ainsi, sa capture dans une forme ou une autre du fonctionnement de l’État.

Ce qui se passe au moment de l’émeute c’est la création d’un trou noir, une béance absolument irréductible entre un ordre dominant qui impose sa logique dans les corps et les rapports sociaux et un tout autre qui n’existe encore qu’en se déclarant de fait, extérieur à cette logique. Ce dernier est une page blanche, vierge et pourtant débordante. L’émeute à ce stade n’existe que d’être en trop plein sans pouvoir encore se dire. Ce sont ses actes qui la définissent. Mais les actes ne sont ils pas un langage ? « Une vitrine brisée c’est fondamentalement une forme de communication » [12]. L’émeute ne doit pas être comprise comme une tentative de prendre le pouvoir. Elle est au contraire la force qui amène des sujets dépossédés à reprendre du pouvoir ; sur eux, sur leur vie, et sur les rapports qui les lient. C’est l’assomption d’un « pouvoir-faire ».

Quand les désirs se libèrent, que pour une fois les assignation à un rôle tombent et que les assujettissement à la production laissent la place à une expérimentation de subjectivité libre, l’émeute devient une fête. C’est la mise en jeu des corps, dans toute leur hétérogénéité.

C’est une forme de lutte « directement accessible » [13] qui ne nécessite aucun discours préalable.C’est pour cela que l’exemple actuel des Gilets Jaunes nous semble d’une grande pertinence. Pour la première fois, des gens qui n’ont jamais milité d’une quelconque façon que ce soit au cours de leur vie, se retrouvent à expérimenter des formes de luttes chères aux franges les plus radicales des milieux militants. Tout ça sans qu’aucune consigne ne leur ait été donné, sans qu’aucun leader n’ai été désigné, qu’aucune responsabilité élective,n’ait été accordée à personne. Ce qui est expérimenté sur les ronds points ou dans certaines rues parisiennes peu habituées à ce genre de déferlement, c’est une prise de contact avec l’im/médiat. Les désirs se confrontent enfin au réel, sans médiation ni représentation. Une rupture de la fatalité qui n’était finalement qu’un épouvantail. Des gens se rencontrent, échangent et surtout apprennent à créer de nouveaux rapports sociaux et de nouveaux rapports avec eux même. Une multitude se crée et l’émancipation des désirs tend déjà vers une émancipation de ces nouveaux sujets.

Subjectivation et organisation rhizomatique

« Expérimente au lieu de signifier et d’interpréter ! » [14]

Pour les tenants de l’ordre social, « se livrer à l’émeute reviendrait à échouer à être sujet » [15], nous allons voir que c’est tout l’inverse. Très clairement, c’est ce que l’on retrouve par la tenue d’assemblée générale post-émeute où une nouvelle parole peut enfin advenir et où les problèmes sont réfléchis collectivement pour en dégager des portées nouvelles qui cette fois sont l’œuvre de celleux qui y sont confronté.e.s. C’est tout un nouveau pan de la parole qui se trouve mis au jour dans l’émeute. Qu’on pense à l’inventivité des slogans ou des tags qui fleurissent sur les murs pour comprendre l’impact de ce nouveau discours. Le désir trouve enfin la place de se déployer dans un langage, bien plus léger dans des rues enflammées que sur un divan austère de psychanalyste bourgeois. Il y a une poésie de l’émeute comme il y a une « pédagogie des barricades » [16].

Mais au delà de pratiques discursives, l’agir a bien une place prédominante dans ce processus. Le faire et le dire ne s’oppose plus. Dire c’est agir et faire c’est communiquer. Le sens apparaît selon les conditions de ses effets. Langage et pratique se retrouvent dans la matérialité pour créer ensemble un nouveau régime de sens.

Faire une émeute c’est déjà faire sécession. Justement, il y a dans l’émeute une valeur toute particulière du geste. Les situationnistes avaient déjà cette idée en parlant de créer des situations. Et également, dans leur conception du spectacle, qui définit comme spectateur celui qui est mis à l’écart du geste, du faire. Le spectacle se fonde sur la passivité et dans l’émeute, on rompt avec cette passivité. Le simple fait d’y être, « d’en être », est déjà un acte en soit. Le refus qui en est à l’origine est performatif. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à se référer aux sanctions encourues en cas de simple participation à un « attroupement violent ». Du point de vue de l’État en tous cas, il n’y a pas d’équivoque ; être dans l’émeute, c’est faire l’émeute. Et ce geste, déployé dans l’émeute prend valeur d’événement. « La politique est la sphère de la gestualité absolue, intégrale des Hommes » [17].

Mais avant tout cela, l’émeute est un jeu. Un jeu des lignes de fuite, un jeu des corps. Elle se joue à plusieurs et deux camps s’affrontent. Et comme c’est le propre du jeu, elle bouleverse les rôles établis. Ici, chacun peut choisir le sien. En cela, elle forme déjà une subjectivation ; se choisir un rôle c’est commencer à se former en tant que sujet. C’est décider de la place que l’on veut occuper et de la façon dont on veut se rapporter aux autres. Nous rejoignons ici les analyses de Gigi Roggero quand il nous dit que la subjectivation politique du prolétaire ne se fait certainement pas par la place qu’il occupe effectivement dans les rapports de production mais dans celle que lui même choisit ou non de prendre dans l’antagonisme au capital [18]. En participant à la révolte, l’émeutier se place de lui même dans ce rapport d’antagonisme. L’émeute vient trancher et diviser et ce faisant elle crée une deuxième « part ». Elle n’est plus assimilable, elle existe en soi.

Dire qu’elle existe en soi, cela veut il dire que l’on peut l’appréhender comme une unité en tant que telle ? Est ce que l’émeute viendrait reforme un bloc molaire, majoritaire ?

Non, l’émeute est et restera une minorité. La minorité ce n’est pas nécessairement le corollaire d’une majorité. La minorité peut même occuper la majorité de l’espace social. Elle se définit avant tout par une indénombrabilité. Peu importe de compter ses participants, ce qui compte c’est de faire masse, faire nombre, sans précision. Dans le rapport de force qu’est l’émeute, le combien ne compte que peu. Ce qu’il faut, c’est être plus. Plus que la force qui s’oppose à nous. C’est un rapport plus qu’un décompte. L’émeute n’est pas une cohorte, un régiment ou une compagnie. Elle n’avance pas avec un chef, ou un commissaire à sa tête. Elle est rhizomatique. Ce qui compte en son sein c’est la jonction de ses membres. L’émeute vient renverser la république du contrat en formant une alliance, une meute. Elle peut être divisée et rester complète puisqu’on ne peut la compter. Ce qui compte c’est qu’elle ait lieu, qu’elle existe. La question du nombre de cortège se partageant Paris ces derniers samedis n’a pas de sens. Paris brûle, l’émeute se fait. On peut même concevoir que de Paris à la Province, ce ne soit qu’une seule belle et grande émeute. Quelle importance cela peut il faire ? L’émeute ne se compte pas, elle se vit. L’émeute se répand ou se propage mais elle ne joue que sur l’espace. L’émeute est une cartographie de la ville, une cartographie pratique et empirique. Son objectif, on le voit clairement dans les pratiques concrètes, est de tenir des zones (souvent temporaires [19]). Son action débouche sur des occupations, des blocages de zones, voire des ZAD. Toujours de l’espace.

Un dernier point nous semble intéressant à soulever, qui a déjà eu les honneurs de ce site, c’est le rapport au visage, à la visagéité. Nous serons brefs pour ne pas vous lasser.

Le visage, chez G. Agamben, prend une place particulière dans la conception de la subjectivation, il est « comme le corps du centre de signifiance » [20]. Hors, si dans les émeutes, pour des raisons pratiques, les participants se masquent le visage, on peut aussi voir cette disparition du visage comme un transfert de la signifiance non plus dans un regard ou une mimique mais dans l’acte, le geste-événement qui est le seul à réellement faire sens. Mises de coté évidemment les considérations sécuritaires qu’impliquent de se masquer le visage il faut également noter la tendance à adopter un vêtement unique pour tous les participants (K-way noir, gilet jaune...) . Ce ne sont plus des sujets individués qui avancent en groupe mais bien une masse, un sujet collectif qui se meut tel une machine de guerre.

Guerre civile, stratégie et tactique

« L’ordre social est avant tout un ordre de bataille » [21]

C. Schmitt définit la notion de politique comme une polarisation du social, une division indépassable entre deux groupes qui se forment l’un par rapport à l’autre et qui prendront les noms d’amis et d’ennemis. Ce partage est selon lui ce qui fonde en dernière instance le politique. Cette distinction spécifique apparaît lorsque sont mis en jeu des intérêts absolument opposés, au point que « l’altérité de l’autre représente la négation de sa propre forme d’existence » [22]. On voit bien ici que l’opposition est irréductible et que la survie d’un groupe ne peut se penser que par la destruction ou la mise en cage de son antagoniste. Cet exemple est particulièrement marquant dans le cas de la lutte des classes ou le bourgeois ne vit que par l’exploitation des prolétaires quand ces derniers ne peuvent vivre (qui n’est pas la même chose que survivre) que par la destruction de la classe bourgeoise et ainsi l’abolition du rapport de classe.

Pour Schmitt encore une fois, la résolution extrême et inévitable de ce rapport d’hostis, c’est la guerre. Les thèses de Schmitt lie inexorablement l’État et la guerre via le concept de politique.La guerre est le moteur de l’État, elle est ce sur quoi se fonde sa domination. C’est à la fois sa raison d’être et son outil de prédilection. En assumant ce partage et en en prenant acte, l’émeute vient mettre en défaut la cohérence proclamée de l’État et ainsi réactualise la guerre qui avait été masquée par les discours du pouvoir.

Si « la machine de guerre n’a pas pour objet premier la guerre » [23] on voit bien comment en s’opposant à l’État qui survit de et par la guerre, elle n’a plus le choix de sa modalité d’action. C’est l’État qui impose la guerre à tou.te.s celleux qui se confrontent à lui.

Nous nous intéresserons ici à une autre modalité de l’organisation, non plus en fonction de l’articulation interne de l’émeute mais dans son rapport à son extérieur, donc à son ennemi. Ces considérations devront prendre en compte les deux moments de la guerre soit la stratégie qui se fixe des buts à long terme et un objectif à atteindre, des cibles à détruire et la tactique qui est une mise en place et un adaptation des pratiques concrètes à un moment donné et en fonction d’un rapport de force, d’une situation.

Pour aborder la question des cibles de l’émeute nous nous appuierons fortement sur l’ouvrage de J. Clover, L’émeute prime – La nouvelle ère des soulèvements. Il s’intéresse en particulier au sens qu’elles prennent en les comparant à une autre modalité de lutte des classes qui est la grève. La pertinence de sa thèse est de faire s’appuyer la mise en place de ces différentes pratiques sur le support de la structure économique. En effet, si la grève est une lutte sur les prix des salaires, l’émeute est une lutte autour du prix des denrées. Il faut rappeler que les pillages à l’œuvre dans les émeutes sont également à prendre comme un contrôle du prix, sauf qu’ici le prix est ramené à zéro, « la société de l’abondance trouve sa réponse naturelle dans le pillage » [24].

Il forme ainsi deux pôles qui sont celui de la production et celui de la circulation. C’est dans ce second pôle que l’émeute prend vie et c’est donc majoritairement sur celui ci qui nous étendrons notre réflexion. Dans un premier temps, il est intéressant de noter comment ces pôles sont avant tout des lieux, des topos. En effet, la grève se déploie sur le lieu de l’usine, le lieu de la production donc quand l’émeute s’étend dans la sphère de la circulation, beaucoup plus diffuse mais qui s’illustre dans les blocages d’axes routiers, de rond-points, de centres commerciaux, de dépôts de marchandises en tous genres (même si le pétrole, du fait de son importance capitale dans l’économie, a une place de choix dans ces blocages). On a là une émeute qui, en se réappropriant les voies de circulation (qu’elles soient celles des marchandises, des capitaux ou des humains), agit en premier lieu sur les flux. Il est aussi notable que ces points de blocage, pour être réellement efficaces conservent une dimension nomade, afin que les nœuds puissent être déplacés, renouvelés... toujours imprévisibles. La raison de ce topos centré sur la circulation et le prix des denrées est évidemment relatif à la population qui mène l’émeute et à sa conjoncture économique. Si la grève est l’arme majeure des travailleurs salariés, l’émeute, elle, est souvent l’œuvre d’individus exclus du salariat. C’est là que l’on retrouve les classes les plus précarisées, l’armée de réserve du salariat dont parle K. Marx mais également les étudiants, classe évidemment à mettre à part mais elle aussi exclue, temporairement du salariat en tant que mode premier de subjectivation politique. L’émeute est ainsi le marqueur net d’une sortie de l’âge de l’industrialisation et du lieu souvent sacralisé de l’usine. Elle est le signe d’un accroissement quantitatif d’une population confrontée « au problème de la consommation sans accès au salaire » [25]. L’émeute s’attaque à la ville, aux marchés, aux axes et à la police.

Nous avons vu dans quel champ particulier l’émeute prenait sa place et quelles étaient ces cibles naturelles, nous allons nous intéresser aux tactiques employées. J. Clover parle pour définir l’émeute en termes pratiques de « l’attaque spontanée de la vie quotidienne et le rejet de tout programme étatiste. » [26] Il en liste les actions parmi lesquelles : « pillage, contrôle de l’espace, érosion du pouvoir de la police, rendre une zone inhospitalière pour des intrus et destruction de la propriété privée » [27]. Il va de soi que ces pratiques ont toutes un rapport avec une forme ou une autre de violence même si celle ci n’est pas un marqueur adapté pour définir l’émeute. En effet, cette utilisation de la violence n’est qu’une adaptation pratique au support social où elle se déploie. Faut il encore rappeler la prégnance de la violence symbolique pour toutes les classes les plus opprimées, que ça soit au travail, dans la rue, dans les institutions ou au sein même des rapports intimes ? La violence de l’État et du capital est omniprésente et y répondre implique nécessairement d’en faire également usage. Nous rappellerons simplement que « Le Spectacle appelle ’’violence’’ tout ce qu’il entend traiter par la force » [28].

La révolte, dans toutes ses modalités est une question de collectif. Comme nous l’avons déjà dit, le processus révolutionnaire doit amener à une conception radicalement commune de la pratique. C’est vrai en ce qui concerne les actes à proprement parler qui de toutes façons ne peuvent pas s’envisager pratiquement hors d’une foule mais également de l’organisation. Qu’il nous soit permis de revenir sur le nécessaire a-centrement organisationnel de l’émeute. On ne peut pas concevoir une émeute qui aurait besoin « d’un général pour que des Hommes arrivent à l’État feu » [29].

Mais tout ce que nous avons vu peut il suffire ? Il est évident que non. En effet, on ne peut pas imaginer une émeute qui ne contiennent pas en germe son propre dépassement. L’émeute n’est en dernière instance qu’un préalable, un affrontement inévitable, du fait de la nature même de l’État C’est un point de passage nécessaire, un lieu de bascule, un moment où la tension se résout à son paroxysme dans l’abolition de ce qui vient lui faire entrave.

Face à nous, l’État et sa police

« Tout le monde déteste la police » [30]

Avant de proposer les résolutions que pourraient apporter un horizon post-révolutionnaire, il nous faut aborder et surmonter un obstacle de poids. Nous avons jusqu’ici tenter de théoriser les mécanismes de l’émeute que se soit sur le plan d’une subjectivation politique ou en terme d’objectifs de guerre. Mais après avoir avec C. Schmitt posé la division politique primordiale entre ami et ennemi, il nous faut bien traiter de cet ennemi et de ce qu’il est en essence autant qu’en pratique.

Avant tout, la police est la face visible de l’État. C’est son bras armé autant que son apparence la plus quotidienne. Qui n’y a jamais été confronté ? Que ce soit dans le cadre d’une participation à des activités « délictueuses » ou par le simple quadrillage de l’espace public. C’est sans doute cette omniprésence qui fait se cristalliser autour de cette institution autant de colère. Sa fonction de surveillance, le striage quasi panoptique qu’elle effectue, en association aujourd’hui avec des méthodes techniques telles que la vidéo ou l’utilisation des métadonnées en ce qui concerne le monde cyber, la rend absolument inévitable. Inévitable pas dans le sens où elle serait nécessaire mais dans le sens où on ne peut plus l’éviter, on ne peut plus s’en échapper.

Interrogeons nous sur le rôle de la police, sa fonction. On nous dit souvent qu’elle est là pour « protéger et servir ». Soit. Mais alors, posons cette question : protéger quoi et servir qui ?

Il apparaît aujourd’hui sans contradiction possible que la police est avant tout un organe de normation et de contrôle au service du pouvoir et d’un ordre social bien déterminé. En tant qu’appareil de répression de l’État, c’est une composante de l’émeute dans le sens où c’est la police qui détermine le plus souvent les modalités de confrontation matérielles de l’émeute. Elle en est une actualisation concrète.

Si l’émeute cherche à exercer sa force de tension sur les axes de la sphère de la circulation, la police elle, est une institution de voirie [31]. En effet, dans son acceptation la plus quotidienne, l’action de la police s’étend en premier lieu sur l’espace public, c’est à dire la rue. Elle est là pour faire fonctionner les flux et également pour les contrôler. C’est la police qui détermine quels sont les éléments qui peuvent ou non emprunter ces flux. Le cas de la police aux frontières et de la gestion des populations exilées est à ce sujet tout à fait marquant. Le parallèle avec une gestion (post-)coloniale des « surnuméraires (exclus du salariat) qui sont traités à tout moment comme une émeute » [32] nous rappelle que dans la gestion des troubles dans les territoires non-métropolitains de l’empire colonial, c’était comme dans le cas de l’émeute, un ennemi intérieur qu’il s’agissait de réduire. Et que c’est dans la théorie née de la gestion de ces troubles (la guerre révolutionnaire) que se trouve certainement la genèse du maintien de l’ordre actuel.

Ce qui transpire en premier de ces analyse, et c’est ce que M. Rigouste a étudié en détail, c’est que la police est « une production rationnelle, structurée par des rapports de force économiques, politiques et sociaux » [33]. La violence policière n’est jamais une « bavure », une erreur d’appréciation ou une dérive personnelle. Cette violence fait partie intégrante du fonctionnement « normal » de la police. C’est donc sur cette considération que l’émeute se place pour y répondre. Encore une fois, tout participant à une simple manifestation en France ces dernières années n’a pu que ressentir la tension qui émane du corps policier alors même que la manifestation se déroule sans « débordements ». C’est la plupart du temps, si ce n’est tout le temps, le comportement de la police qui initie les actes de « violence » des manifestants et c’est ainsi très souvent la police qui a donné son ton émeutier à une manifestation. Dans sa logique la plus matérielle, la police est une réelle fraction de l’émeute. Elle en fait partie au même titre que les émeutiers dans ce rapport fondamentalement dualiste qu’est tout affrontement. La police est ici l’ennemi schmittien qui prend corps.

G. Agamben appuie particulièrement sur le lien étroit entre police et état d’exception. Or, c’est justement dans le cas de cet état d’exception, que l’État dépasse les prérogatives accordées par le « peuple » dans l’établissement de son pouvoir. Mais c’est toujours l’État qui fixe les limites de sa propre légitimité, et c’est bien souvent contre cette fausse légitimité que viennent se cristalliser les émeutes. Qu’on pense à se sujet aux émeutes dites « de banlieues » qui ne manquent pas d’éclater chaque fois qu’un meurtre commis par la police et adoubé par la justice (qui n’est là au final que pour ça) ne se cache même plus sous le vernis déjà bien terni du droit.

Mais justement, intéressons nous à l’État. Si la police est là pour donner et prendre les coups à sa place, c’est bien lui qui est à la manœuvre. Si l’économie aujourd’hui, en se financiarisant est devenue immatérielle (dans son contenu, pas dans ses effets) et qu’avoir un impact sur elle semble de plus en plus compliqué, l’État, au contraire, n’a jamais été aussi proche de nous. Les mesures étatiques nous touchent de manière frontale, directe. L’État se fait l’allié de l’économie. Il apparaît ainsi comme le légitimateur de la violence symbolique de l’économie de marché poussée à son paroxysme que nous connaissons aujourd’hui.

Comment concevoir le chantage salarial sans la peur de la prison ? Travail et prison, salaire et amende sont indissociablement liés comme deux faces d’une même pièces. La police, la justice qui la légitime, l’État qui contrôle ces deux là, ne sont orientés que vers une défense de la propriété privée. On répond là à la question que nous nous posions au début de cette partie. Protéger quoi, la propriété privée et l’ordre social inégalitaire qui en est le corollaire et servir qui, les possédants, les bénéficiaires de cet ordre social.

C’est contre tout cela que l’émeute vient faire sécession. Mais si nous avons maintenant clairement en tête ce qu’il nous faut détruire, qu’allons nous bâtir sur les ruines du vieux monde ?

La Commune comme horizon, un dépassement nécessaire

Nous l’avons déjà évoqué, l’émeute n’est qu’un moment d’un processus. Il est impensable, d’un point de vue théorique comme pratique de la considérer comme une fin en soi. Cela paraît évident mais force est de constater que bien souvent les pratiques mises en œuvre échouent justement à effectuer le dépassement nécessaire de ce moment émeutier. Ce que nous tentons ici ne doit être pris que comme une interrogation à continuer, des tentatives ou des pistes à réfléchir qui, encore une fois, ne pourront s’actualiser (ou non) que selon un contexte donné et après des élaborations collectives, des expérimentations, et certainement un grand nombre d’erreurs.

Ce qui se joue ici, c’est avant tout de créer une nouvelle façon de faire du politique. Pour nous, ces nouvelles pratiques politiques ne peuvent s’envisager qu’en dehors de toute forme-État.

Nous voulons appeler ce que pourrait être cette nouvelle forme « Commune ». Il s’agit pour nous en premier lieu de la faire exister en la nommant. « Tout ce qui a un nom existe » [34]. En lui donnant ainsi un nom nous nous autorisons à la considérer. Sur ce nom nous greffons évidemment un souvenir, celui de ce qui aurait pu être une révolution sociale, et que la IIIe république a avorté dans le sang. Nous savons que ce rappel des événements de 1871 fait partie de tout un imaginaire fantasmé, collectivement partagé dans les milieux proches de l’anarchisme. Mais ce qui nous intéresse dans cette « révolution manquée », c’est justement qu’elle n’ait pas été menée à son terme. En ce sens, « une part cruciale de la mystique de la Commune réside dans la pureté virginale de cet utopisme qui n’a pas été mis en œuvre » [35]. C’est justement cette non réalisation du projet révolutionnaire qui en fait pour nous un vocable encore chargé d’espoir, pas encore marqué du sceau de la défaite. Mais dans le terme de « commune » nous retrouvons aussi un rapport au spatial. La commune en effet, même dans son utilisation habituelle renvoie à une dimension locale. Appliquée à une forme d’organisation sociale elle brise le rapport que nous avons usuellement qui nous fait considérer le « peuple » dans une dimension nationale, ou au moins se référant à l’échelle d’un pays. Une organisation du type que nous aimerions voir se développer ne peut se concevoir à l’échelle des pays que nous connaissons. Nous affirmons la nécessité d’une organisation strictement horizontale, où la représentation ne signifie pas une prise du pouvoir de la part du représentant et où les problèmes soient réglés par celleux qui les vivent. « A chacun son groupuscule ! Dans chaque usine, chaque rue, chaque école. Enfin le rêve des comités de base » [36]. La commune doit être une nouvelle modalité du rapport social. Mais ce que nous nommons ici Commune n’est qu’une ébauche, l’idée de quelque chose à créer et nous ne pouvons savoir de quoi elle sera faite. L’exemple des soviets nous semble intéressant, comme celui des conseils en Allemagne. Concernant les soviets, il est intéressant de remarquer que cette création institutionnelle fut l’une des première sur laquelle le gouvernement bolchévik est revenu. En effet, leur fonctionnement essentiel remet en question l’existence de l’État. Il situe le pouvoir non plus dans un appareil délimité et dissocié du corps social mais justement en le réinjectant directement au cœur de cet espace, permettant à chacun.e de s’en saisir. En cela il est évident que le parti bolchévik et l’URSS ne sont pas, dès le début et dès Lénine, un organe vraiment révolutionnaire mais une réactualisation d’une forme de pouvoir d’État vers une autre.

Si nous avons vu que la guerre civile n’avait qu’un temps, la machine de guerre elle garde sa place, même une fois l’État aboli. Car en un certain sens, la révolution ne s’arrête jamais. L’abolition de l’État ne signe en rien la fin de ce processus. La contre-révolution est partout, et peut être en premier lieu dans nos têtes, y compris dans celles des révolutionnaires. Une révolution des rapports strictement économiques et politiques à laquelle ne viendrait pas se joindre une révolution de la pensée ne peut que mal tourner. Les insurrections peuvent mener à la Commune comme au fascisme. Nous avons baigné dans le monde de la domination et il est clair que nous ne la détruirons pas totalement sans s’attaquer à ses mécanismes qui s’actionnent jusqu’au plus profond de nous mêmes.

La machine de guerre doit donc survivre à la révolution et se réaliser pleinement en n’ayant plus la guerre comme objet. Une machine de mutation qui serait un moteur de transformations sociales, l’antagonisme initial ayant été résolu. Cela offrirait enfin l’occasion de découvrir et de recréer de nouveaux rapports sociaux, de nouvelles façons de vivre et d’expérimenter le vécu. Il s’agirait de peupler collectivement la page blanche qui avait été ouverte en premier lieu dans le refus initial. Les marxistes considèrent la révolution comme la fin de l’histoire, nous y voyons nous avec G. Agamben la fin du sujet dans sa conception individuelle pour la naissance d’une conscience collective.

Tout ceci semble bien abstrait. Et ça l’est. Il nous est difficile de penser ce que serait un monde social réellement libre quand notre seule expérience est celle de la domination. Même pour celleux qui ont eu l’opportunité de connaître des conceptions différentes de rapports sociaux, que se soit en communauté ou autre, les rapports de pouvoir les plus insidieux sont durs à mettre à bas. C’est là tout le travail de la machine de guerre ; toujours muter, toujours changer.

Conclusion

La question que nous voulons nous poser pour conclure cet essai est celle du « comment faire » ? Comment faire à l’heure où le capitalisme nous prend à la gorge et où jamais les forces vives du prolétariat n’ont semblées si éclatées. Nous aimerions voir dans les événements actuels des gilets jaunes un espoir de renversement mais la trop longue liste de nos défaites nous donne un regard pessimiste. Nous sommes convaincus mais démoralisés. La vraie question à nous poser serait sans doute comment ne pas perdre espoir et continuer à nourrir nos luttes d’une réelle joie révolutionnaire ? Quelle articulation nouvelle trouver pour enfin sortir de ces « années d’hiver » qui n’en finissent pas. Les pistes théoriques que nous avons choisi d’aborder dans le présent article bien que nous semblant pertinentes nous apparaissent bien faibles comparées à la puissance hégémonique du capital. Sortir de son emprise nécessitera bien plus que quelques nuits d’émeute. Nous avons choisi de centrer notre propos sur cette facette de l’affrontement mais il est maintenant évident que ces élaborations révolutionnaires de nouvelle subjectivité passeront par de multiples chemins. Nous ne pouvons pas nier l’importance de l’art, de la pensée, de l’écriture et même de l’amour dans ces constructions révolutionnaires. L’amour entre les individus, sorti d’une conception duelle du couple traditionnel, l’amour au sein d’une communauté. L’amour en tant que l’envie de créer à plusieurs. C’est dans l’âtre des regroupements que naîtront les foyers de futurs incendies.

C’est en tous cas ce que nous voulons croire. Et que ces recherches théoriques ne prennent jamais la place de la lutte. Car s’il faut savoir où l’on va, il ne faut jamais que le but se substitue à au cheminement. C’est par la lutte et la confrontation concrète que nous ferons advenir les possibilités effectives de nos victoires. Préparer la révolution de son bureau, nourri.e exclusivement des exemples de la théorie ou de l’histoire ne porte jamais ses fruits. Nous fondons tout espoir d’anéantissement du vieux monde sur la pratique, la théorie n’est qu’un « en plus », une béquille parfois nécessaire mais qui ne doit jamais nous encombrer. Mais nous gardons espoir, nous n’avons pas le choix car « dans chaque renoncement quotidien, la réaction ne prépare que notre mort totale. » [37]

J.

[1GUATTARI Félix, Psychanalyse et transversalité, Maspero, 1974

[2Lundi Matin – n°171 décembre 2018 – Le spectre du chaos, https://lundi.am/Le-spectre-du-chaos

[3DELEUZE Gilles & GUATTARI Félix, Mille plateaux, capitalisme et schizophrénie, Minuit, 1980

[4FOUCAULT Michel, Il faut défendre la société, cours au Collège de France 1976, Seuil, 1997

[5ORWELL Georges, 1984, Gallimard, 1950 (pour la traduction française de AUDIBERTI Amélie)

[6LEPAGE Franck, Inculture(s) 1, conférence gesticulée, 2007 (https://www.youtube.com/watch?v=9MCU7ALAq0Q)

[7DELEUZE G. & GUATTARI F., op. cit.

[8GUATTARI F., op. cit.

[9CLOVER Joshua, L’émeute prime, la nouvelle ère des soulèvements, Entremonde, 2018

[10VANEIGEM Raoul, Traité de savoir vivre à l’usage des jeunes générations, Gallimard, 1967

[11CLOVER J., op. cit.

[12Ibid.

[13Ibid.

[14DELEUZE G & GUATTARI F., op. cit .

[15CLOVER J, op. cit.

[16VANEIGEM R., op. cit.

[17AGAMBEN Giorgio, Moyens sans fin, notes sur la politique, Rivages, 1995

[19cf : BEY Hakim, TAZ, zone autonome temporaire, Éditions de l’Éclat, 1997

[20DELEUZE G. & GUATTARI F., op.cit.

[21FOUCAULT Michel, Il faut défendre la société, cours au Collège de France 1976, Seuil, 1997

[22SCHMITT Carl, Notion de politique suivi de La théorie du partisan, Flammarion, 2009

[23DELEUZE G. & GUATTARI F., op. cit.

[24ibid.

[25CLOVER J., op. cit.

[26ibid.

[27ibid.

[28TIQQUN, La théorie du Bloom, La Fabrique, 2004

[29DELEUZE G. & GUATTARI F., op. cit.

[30Le cortège de tête, Ni loi, ni travail, 2016

[31DELEUZE G. & GATTARI F., op. cit.

[32CLOVER J, op. cit.

[33RIGOUSTE M. op. cit.

[34Proverbe Basque

[35THOMBS R., Paris, bivouac des révolutions. La commune de 1871, 2014, Libertalia, cité par REEVE C. in Le socialisme sauvage, essai sur l’auto-organisation et la démocratie directe dans les luttes de 1789 à nous jours, l’Echappée, 2018

[36GUATTARI F., op. cit.

[37Ibid.

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