Des mois qu’on pensait écrire, composer, chanter, enregistrer, cette chanson. Oser surtout. Oser faire une bombe musicale. Pour dégoupiller et s’égosiller ! Faire un air populaire pour être repris partout. Sur toutes les lèvres. Sur tous les rêves. Un air pour déplaire, surtout. Un hymne pour embrasser (et embraser !) le joli mois de mai qui va arriver... Ceci n’est pas une chanson. Ou alors une chanson désagréable à l’oseille. Pas un énième truc de commémoration des cinquante ans de Mai 68, bourré de nostalgie et de photos jaunies. C’est un appel à réitération. À éxagération. À dégager Macron. Pour commencer... Ceci n’est pas (seulement) fait pour être regardé. C’est fait pour ouvrir les yeux. Fermer les écrans. Participer à leur chute. La précipiter. Ça nous a pris d’un coup. En urgence. Mais sans précipitation. Il fallait que tout soit terminé pour le 1er Mai. Il fallait qu’on puisse savourer. Des mois qu’on y pensait, quelques jours pour s’y atteler. Et ce fut fait ! Fait sur l’instant. C’est pas pro. Mais ça peut se propager. Si vous le voulez...
Collectif Phœnix
Site du Nouveau Jour J : http://www.nouveaujourj.fr/
LES FILS DE L’INTÉRIM
si les millions de solitaires
si les futurs chômeurs de Ford
si les sans dents prêts à mordre
si les salariés dignes d’hier
aujourd’hui font désordre
s’il faut des millions loin derrière
la virgule du chiffre d’affaires
en trois quatre ou cinq huit
pour qu’une poignée profite
des profits qui débordent
si c’est le monde à l’envers
si les nantis tirent sur la corde
des exploités des chemins de fer
premiers de corvée boucs-émissaires
privilégiés de la discorde
chantons le chant du cygne
et l’espoir du phenix
la cendre des usines
d’où renaitra l’éclipse
si y a mère qui digère
sa faim de carrière à Carrefour
si y a mon père qui Goodyear
pour des Titan, pour des vautours
des fainéants d’actionnaires
s’ils nous sèment, on les enterre
on r’pousse en bouquets de nerfs
si nos échos s’accordent
si on éclos dans la horde
si on s’engraine de révolte
si les p’tites mains ne forment qu’un
qu’un poing levé comme un seul homme
si nous ne sommes plus tes larbins
si les divisés s’additionnent
si ta chute est notre envol
chantons le chant du cygne
et l’espoir du phenix
la cendre des usines
d’où renaitra l’éclipse
s’ils nous résignent et qu’on s’oppose
à leur vie flexible, avenir morose
si on refuse leur temps partiel
on s’extrémise, les terrorise
on est juste humains bordel !
et si on subit s’ubérise
si à la chaine on saque on saque
on se déchaine, déchire des chemises
on se manifeste sauvage
on se paie des géants en otage
si on se jette, si on se je t’aime
si on se molotov des cocktails
si on se remai soixante-huit
si on se suite logique
on s’idéale, des fois on gagne
chantons le chant du cygne
et l’espoir du phenix
la cendre des usines
d’où renaitra l’éclipse
s’ils nous esclaves, on se libère
on attaque en zone à défendre
s’ils nous méprisent, on les méandre
si on est légions, on d’vient légende
s’ils avancent en marche arrière
s’ils s’encravatent et se payent
des costards sur notre cauchemard
leur cynisme, leur humour noir
de luttes en conquête sociales
on l’repeint en bleu de travail
si on s’Lidl ou on s’immole
on se bouquet final ou on slalome
sous une nuit d’encre entre Amazon
dans son ventre qui nous avale
et les rimes des étoiles
chantons le chant du cygne
et l’espoir du phenix
la cendre des usines
d’où renaitra l’éclipse
sur le champ de vos ruines
nos horizons se bâtissent
votre épilogue dessine
le chant de notre prémisse
entends-tu les petits fils
des crassiers des terrils
les fils de l’intérim
à l’aube des cimes