Creuser un petit trou - Naïm Aït-Sidhoum

« Mais utopie c’est quand même un mot intimidant. »

paru dans lundimatin#194, le 4 juin 2019

Quel rapport y a-t-il entre un rond-point et une ville nouvelle ? Entre un petit trou et de grandes tours de béton ? Entre un relais de Gilets jaunes et un garage tchétchène improvisé ? C’est en creusant la question de l’utopie que Naïm Aït-Sidhoum nous répond.

Cet hiver, je passais en voiture sur une route nationale.

Le long de celle-ci, ou bien plutôt, au niveau d’un rond point, il y avait une architecture précaire, faite de tasseaux de bois de récupération et de panneaux peints. Il y avait aussi deux personnes, avec des gilets jaunes de sécurité. Une troisième personne, sans costume, était là, sa voiture était garée à une dizaine de mètres. C’était un visiteur.

Et en observant les positions des corps des deux gilets jaunes, on comprenait qu’ils étaient, en quelque sorte, les habitants de ce lieu.

Je suis passé par là, et cette scène, je l’ai vue à peine quelques secondes. Je ne sais pas de quoi ces gens parlaient. Mais peu importe finalement le sens des mots que ces trois personnages échangeaient. Ce qui m’est resté, c’est la situation : le visiteur face à ces deux personnes, seulement deux personnes, qui, on le devine, se relaient. Peut-être deux heures plus tard, auraient-elles été remplacées par deux autres personnes ? Ou bien, l’une des deux personnes serait partie, et aurait été remplacée par une autre.

Sur le rond-point.

Une forme d’espace, à propos de laquelle les architectes, les urbanistes, les paysagistes se posent des questions sans trouver de réponse. Des experts qui se creusent la tête sans savoir qu’en dire, et voilà que, sans théorie préalable, des gens montrent comment faire.
Et ce qu’ils montrent : c’est non seulement qu’on peut occuper les ronds-points, mais aussi, et surtout, qu’on peut les occuper en se relayant, un par un, deux par deux. Ces gens, ce qu’ils faisaient là, au bord de la route, c’est un peu comme entretenir un feu, un petit feu. Ils montraient qu’un espace public, comme on dit, ce n’est pas forcément la grand-place avec le monde réuni, la « co-présence », l’agora ou que sais-je. Cela marche aussi si l’on est tout juste deux, et qu’on se relaie. On est moins nombreux, beaucoup moins que sur une place publique, ou dans la rue pendant une manifestation, mais on dure, beaucoup plus longtemps.

Voilà pour moi, l’exemple de ce que je dis être : un petit trou.

Mais pourquoi ce mot : trou ? D’ailleurs, vous noterez que j’ai à la place employé le mot « feu » pour décrire la situation du rond-point. Alors pourquoi le trou et pas autre chose ?

Pourquoi l’occupation du rond-point, ce léger tumulus circulaire, peut-elle être considérée, comme l’équivalent d’un trou creusé ?

Et bien :

C’est parce qu’ils suspendent la fonction du rond-point, qu’ils vident une petite portion d’espace de cette fonction, et qu’ils font durer cette béance dans le temps, que ces gilets jaunes creusent un trou. Qu’ils percent le temps.

Et ce qu’ils mettent dans cette ouverture, ce avec quoi ils la remplissent, c’est leur affaire à eux. Car depuis l’extérieur (c’est-à-dire comme moi : spectateur de cette scène depuis l’intérieur d’une voiture) c’est bien un trou que l’on voit.

Voilà donc un premier exemple.

Car cette chose que je remarque, ce petit trou, il en existe partout. Et je voulais y penser, pour réfléchir à ce qu’est - selon moi - un geste d’urbanisme. Et c’est cette réflexion que je voudrais vous confier ici.

Je voudrais le faire en vous parlant d’un endroit ; justement exemplaire de ce qu’est un geste d’urbanisme. Mais je ne peux pas vous montrer d’images de ce lieu. Par contre, je pense qu’en le décrivant, vous pourrez l’imaginer, vous-même.

Voilà. C’est un grand espace, où vivent 15000 habitants. Ces 15000 habitants sont répartis en cercle. L’espace dont je vous parle a un plan rectangulaire, mais il a un fonctionnement circulaire.
Au bord, sur le tour, on trouve des bâtiments, longs, hauts et en béton. C’est là que logent les gens. Et au centre : un grand parc. Avec des collines artificielles, des arbres et même un lac.

À la périphérie il y a une muraille, et au centre un parc.

Pour faire les bâtiments, on a creusé dans le sol. Et comme ils sont très hauts, on a creusé profond. On a fait un sillon, comme un geste antique, un sillon dans le sol, pour délimiter l’intérieur de l’extérieur.
Et la terre, qui en est sortie, on l’a ramenée vers le centre, pour faire les collines du parc. Avec cette terre on a fait des petits tumulus verts.
Ce parc vert avec ses tumulus et ses arbres ressemble au paradis. Et ce lieu, on a commencé à le construire dans les années 1960. Plus précisément en 1968. À la limite d’une ville, dans sa banlieue. Cela aurait pu avoir lieu dans une région ou une autre. Cela s’est passé en France.

Quand on l’a imaginé et bâti, c’était dans l’intention de faire quelque chose qui dépasse, transgresse, ou réorganise le clivage des classes sociales. On a mis à l’intérieur du sillon : des cadres, des ouvriers, des vieux, des jeunes, des Français et des étrangers. On a fait une architecture neuve, des équipements neufs, des écoles expérimentales, et même une télévision de quartier. On a tout mis.

La décision de faire ce quartier a été prise par le maire de la ville. Quand il a été élu, en 1965, 3 ans avant que l’on ne commence la construction du lieu, il a proposé comme d’ordre de sa politique : l’autogestion. Et à partir de ce mot, il a proposé à ses plus proche administrés d’imaginer et de construire cet espace.
Mais ce mot d’autogestion, il n’avait pas le même sens que dans d’autres lieux, au même moment, dans des communautés, autonomes, souvent rurales qui s’inventaient alors. Autogestion, dans cette ville, socialiste, dans les années 1960, ça voulait dire : la commune, donc l’État, avec son argent, va faire une grande machine que les gens vont gérer eux-mêmes. On a pas pensé que les gens pouvaient faire leur propre machine pour ensuite la gérer eux-mêmes. On a préféré faire une belle machine, un peu luxueuse avec les moyens de l’État. On en a même fait un slogan : « changer la ville pour changer la vie ». Et l’on a donné un nom à ce lieu : la ville neuve.

Enfin, en l’imaginant et en le bâtissant, on a dit de ce lieu que c’était une utopie. Et aujourd’hui, quand vous en entendez parler, on vous dit : « au début c’était l’utopie, et après ça a mal tourné ». Ou bien : « aujourd’hui c’est une banlieue, une cité, une zone à problèmes, comme il y en a tant en France. Mais au début, voyez-vous, c’était vraiment l’utopie. »

Mais utopie c’est quand même un mot intimidant.

Et d’ailleurs si on s’attache à la définition de ce mot, on se demande pourquoi l’utiliser pour la ville neuve. Car u-topie cela veut dire littéralement : sans lieu, ce qui n’a pas de lieu. Et pourtant, ce dont je vous parle a bien une situation géographique précise, c’est un lieu, un ensemble, des bâtiments, un parc et des gens.

Mais alors, comment faire avec cet oxymore, dire d’un lieu qu’il est une utopie ?

J’ai l’impression que face à ce paradoxe, on en vient souvent à enlever ce mot de notre vocabulaire. Ou bien, à l’employer avec une connotation négative, ou même moqueuse. Mais peut-être, a-t-on du mot utopie, une conception inadéquate, fourvoyée. Peut-être voit-on ce mot utopie rattaché à l’idéal, l’idéalement immobile, l’idéalement harmonieux, pacifique, ensoleillé, courtois. Donc impossible. Peut-être associe-t-on les mots utopique et statique.

Alors que tout est mouvement. À commencer par cet ensemble urbain.
Déjà parce qu’il a eu un avant et un après.
Eh oui. Il y a une ville neuve d’avant sa matérialisation. Tel qu’elle a été pensée et dessinée avant d’être construite. Des pensées et des dessins, qui font partie du lieu, bien qu’ils diffèrent de sa forme bâtie.
Et que dire aussi de l’horizon. De ce qu’il y a à atteindre. Du « pas là encore », d’un avenir de la situation.

Alors, si l’on tient compte de ces deux petites remarques, très bêtes au fond, on déconstruit simplement quelques dualités trop connues :
Comme par exemple la séparation entre l’idée qui serait d’un côté et la réalisation de l’autre, avec entre les deux, un hiatus, un raté, une non-rencontre. Et donc d’un côté ceux qui pensent et conçoivent, et de l’autre ceux qui bâtissent de leurs mains. Les uns qui ont rêvé d’un lieu, les autres qui l’on réalisé matériellement et finalement habité. Et faire donc des seconds les responsables du raté. Autrement dit, faire des ouvriers, nous y reviendrons, la cause de la formule que l’on emploie pour parler de la ville neuve : l’utopie a mal tourné.

Mais alors, en partant de ces remarques, qui sont simples, on devrait pouvoir changer de définition du mot utopie.

On dirait du mot utopie qu’il désigne, plutôt qu’une idée, un mouvement. Un trajet. Plutôt qu’une idée utopique, un mouvement ou un trajet utopique. Un trajet en pensée et en matérialité. Des trajets qui se prolongent. Et qui donc se transforment.

Et si je reviens maintenant à mon exemple, de ma ville neuve. C’est alors deux mouvements que j’identifie :

Tout d’abord un premier mouvement de mélange. Qui consiste à rassembler et mélanger les classes sociales et les âges en un même lieu. C’est le projet, de la gauche réformiste, institutionnelle, de ces années 60, de mélanger pour faire disparaître les classes sociales. De les fondre dans un même corps. De désidentifier la classe ouvrière, d’en faire autre chose.

Et puis un deuxième mouvement : la clôture, ou l’autarcie. Fermer ce lieu en pensant que le reste de la société prendrait ce quartier comme modèle. Que la ville neuve, serait l’avant-garde, et que le reste de la ville, et du pays, et du monde, se transformerait à son image.
Et, le sens de ces deux mouvements, dans le temps, s’est transformé. Pour le dire autrement : les choses ne se sont pas passées pas comme prévu.

Premièrement : le mélange n’a pas tenu dans son sens initial (c’est-à-dire le mélange des classes : ouvriers et cadres). Les cadres sont partis, assez vite. Au fond, ils n’avaient pas vraiment envie de côtoyer les ouvriers. Ils avaient les moyens d’aller ailleurs, de vivre d’autres expériences, de trouver une meilleure place au soleil. Alors ils ont pris la tangente, ils ont glissé vers d’autres lieux.
Les ouvriers eux, sont restés, à demeure. Ils n’avaient pas le choix. Non seulement ils n’avaient pas été de ceux qui avaient eu la chance de concevoir et programmer ce quartier (ça a été le rôle de certains cadres), alors qu’ils avaient construit ce lieu de leurs mains (ouvriers du bâtiment). Et puis ils n’avaient, pour la plupart, pas eu le choix d’y vivre. Et voilà que désormais, ils ne pouvaient pas en partir.
On croyait que le mélange « villeneuvois » initial aurait permis de dépasser le clivage des classes sociales, mais en réalité, faute d’attention, on a doublé la peine des moins privilégiés. On les a enfermés dans ce paradis. Ce paradis qui devenait, faute de moyens pour l’entretenir, une ruine.
Mais, de nouveaux ouvriers sont arrivés, de divers horizons. De divers pays. D’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine. Et le mélange des classes est devenu le mélange des populations du monde.

Et la ville neuve est devenue une ville ouverte.

Et dans cette transformation, le geste de clôture initial a changé de sens lui aussi : le quartier n’était plus un endroit modèle, plus du tout. Mais plutôt une île pour des gens de passage. Un port, pour le passage des gens du monde.
Et donc on dit et on répète que l’utopie a mal tourné, que c’était mieux avant. Pourtant, que la ville neuve devienne un port, une ville ouverte, peut-être est-ce une chance finalement. Car on s’est débarrassé, des plus favorisés, qui étaient aussi les concepteurs de cette ville neuve. Eux qui avaient planifié ce quartier, savaient d’avance comment y vivre. Ils avaient pensé l’adéquation de cet espace à son utilisation. Ils avaient, inconsciemment souvent, refermé les possibles du lieu.
On a donc laissé la machine en ruine, et se faisant on a ouvert, sans le savoir, des possibilités sur son emploi. Ça a cassé des certitudes, un principe d’harmonie, pour ouvrir sur un principe moins confortable, mais certainement plus vivant, d’ajustement.

Mais cet ajustement, on ne le laisse même pas se faire.

Ainsi, voici l’exemple d’un grand stationnement qui fait la limite au sud du quartier entre son dedans et son dehors. Dans cet espace, fonctionnel, il y a des immigrés tchétchènes, qui gardent deux ou trois places pour eux. Et sur ces places ils improvisent un garage. Ils réparent, bricolent et embellissent des voitures.
Remettre du travail dans ce lieu, ça n’est pas rien. Car le travail des mains, au fond, on a voulu l’exclure de cet enclos, on a voulu enlever le rapport au travail ouvrier et artisan, et le remplacer par le travail social.
On a pris, certains enfants de prolétaires, et on en a fait des travailleurs sociaux. On les a embauchés dans les équipements, on les a mis éducateurs ou veilleurs de nuit. Quelque part, on en a fait des surveillants, du bon ordre social des lieux.
Donc, ces Tchétchènes, qui inventent un garage sur trois places de parking en se les appropriant sauvagement. Eux aussi ils creusent un petit trou. Qui me fait penser, de loin en loin, mais irrésistiblement, aux gens qui se relaient sur les ronds-points.
Mais le bailleur social lui, l’organisme qui gère les logements dans lequel les gens vivent, ça ne lui convient pas. Il demande aux voisins, aux gens qui habitent autour, de les renseigner sur l’activité, selon eux illégale, de ces Tchétchènes.
Il préférerait que ce parking reste un parking. Et c’est tout.
Et voilà comment on referme un petit trou : la semaine dernière, la police municipale est venue sur cette aire de stationnement, pour interdire les Tchétchènes de « mésemployer » cet espace.

Il y a aussi un père de famille kurde, qui avait repéré des plates bandes sur le toit d’un autre parking, à l’ouest du quartier cette fois-ci. Des plates-bandes décoratives, avec des buissons mal entretenus, des plates-bandes en ruines elles aussi. Et cet immigré, qui vient d’une région rurale, a décidé de s’approprier ce minuscule endroit dont personne ne veut. Il en a fait son jardin. Un jardin pour faire des légumes. Pour manger. Et se faisant, il a entraîné toute une communauté de jardiniers, des familles immigrées, qui avaient besoin de manger elles aussi.
Et c’est un autre type de travail qui revient sur cette plate-bande. Paysan cette fois. Le travail de la terre.
Et ce travail revient là, où la commune et l’État avaient en premier lieu asséché une plaine autrefois rurale. Là où ils avaient drainé un terrain et foutu des paysans dehors pour loger des ouvriers à la place : tracer un sillon, un cercle, au centre y mettre un parc, et enlever le travail de toute une zone… Rappelez-vous. On le voit sur certaines images des années 1970. On voit des parcelles agricoles, au pied des premiers immeubles de la ville neuve, et des paysans, qui expliquent, qu’ils vont devoir partir.

C’est donc le retour, d’une activité antérieure, mais en toute discrétion, proposé par un immigré kurde : retrouver l’usage de la terre, sur les ruines d’une infrastructure.
Et puis, là aussi, le pouvoir, municipal, s’interpose. Avec plus de bienveillance, en apparence, que dans le cas des Tchétchènes.
La commune aime que les gens jardinent, mais pas n’importe où. Alors elle propose un terrain dédié à cette communauté, plus loin, au centre du quartier, au coeur du parc, dans un endroit plus approprié selon eux. La commune y construit un enclos, avec des barrières, des panneaux de signalisation, un mode d’emploi, une bonne manière d’utiliser le lieu. Elle appelle cet enclos un « jardin partagé ». Et elle fait ça dans un lieu ouvert, au regard de tous. Bien loin des quelques plates bandes secrètes sur le toit d’un parking.

Et le parking, quant à lui, a été détruit. On a mis des arbres à la place, et, à la demande de la police, une route, pour entrer plus facilement dans le quartier.

Ces deux exemples sont la pour dire, comment des petits trous se créent, ici et ailleurs. Et ces exemples nous disent comment ces petits trous, et bien on essaie en permanence de les refermer. D’un geste bienveillant, horizontal comme on dit, on referme quelque chose.

Mais reprenons le mouvement d’ensemble :

Un quartier clos et mélangé change de destination. C’était une ville neuve. C’est maintenant une ville ouverte.
C’était une ville pour le dépassement des classes sociales. Une machine mise au point par les classes supérieures, pour vivre mieux, avec les classes pauvres. Mais ceux-là mêmes qui ont conçu cette machine l’ont massivement abandonné. Et les autres, entre eux désormais, ont trouvé comme la faire fonctionner autrement… Malgré les tentatives répétées de les en empêcher.

Et voilà, l’histoire universelle de l’urbanisme. Quelle que soit la nature du pouvoir, qu’il soit réactionnaire ou progressiste. Et voilà cette histoire, qui se répète, de la même manière : en banlieue et en Loire-Atlantique, place de la République et sur les ronds-points de France et ailleurs.

Et puis il faut conclure.

Et conclure ici se fera sous la forme d’une interrogation : comment faire ? Comment faire en sorte que là où des trous se creusent, ils ne soient pas refermés ?

Pour ce qui concerne cet exemple de la ville neuve, c’est peut-être d’abord en prenant au sérieux la transformation des lieux, en ne se disant pas « c’était mieux avant » … ou encore « l’utopie a mal tourné ». En faisant confiance à ce qu’il y a là, aux habitants, à leurs corps, leurs voix, leurs mots. Peut-être surtout à ceux qui ne sont pas là depuis le début, qui sont arrivés là, par nécessité.
En gardant en tête que la ville neuve en s’ouvrant, en devenant un port de passage pour des populations de tous les continents, a déplacé son origine et son histoire. Son histoire et sa géographie.
Car nous ne pouvons plus dire aujourd’hui : cette ville neuve, elle vient de l’invention d’un socialisme municipal dans les années 60. Ou bien encore : c’est le fruit des politiques nationales de reconstruction, des trente glorieuses.
Mais nous devons dire : ce quartier particulier, il vient aussi des conflits que la France mène en dehors de ses frontières, de l’immigration, il vient d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine. Des empires coloniaux et de guerres d’indépendance. Il vient du commerce triangulaire et de l’esclavage. 1441 est son autre date d’origine.

Et puis, plus généralement, peut-être faut-il, se mettre soi aussi à creuser un trou. Quelque part. Comme les Tchétchènes on fait du parking un garage. Ou le père de famille kurde d’une plate-bande un jardin. Prendre exemple sur eux.

Creuser un trou, plutôt qu’aider à refermer ceux qui sont là. Calquer des gestes de travail qui n’existent pas encore, sur les gestes de travail existant chez ceux qui creusent. Imiter ceux qui inventent ces gestes qui leur sont propres, qui ne sont pas imposés par une puissance supérieure : commune ou État.
Et pour creuser suffisamment, peut-être le faire à deux. Deux pour pouvoir se relayer. Pour que l’un puisse partir, un jour ou deux, ou plus longtemps. Et qu’il reste toujours quelqu’un d’autre, sur place, pour maintenir dans le temps ce petit trou qui est creusé.

Naïm Aït-Sidhoum

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