Chère Françoise Nyssen

« En parcourant le catalogue des éditions Actes Sud, nous avons cru à votre engagement pour une agriculture différente, respectueuse des hommes et de la nature... »

paru dans lundimatin#143, le 23 avril 2018

Chère Françoise,

Depuis le 9 avril 2018 et le début de l’évacuation militaire de la ZAD de Notre Dame des Landes, votre silence est assourdissant.

En parcourant le catalogue des éditions Actes Sud, nous avons cru à votre engagement pour une agriculture différente, respectueuse des hommes et de la nature, cette agriculture que de nombreuses personnes évacuées depuis le 9 avril cherchaient à faire vivre sur la ZAD.

En découvrant le projet de l’école Domaine du possible, nous avons cru à votre sensibilité pour une architecture sobre en énergie, versatile et expérimentale, cette architecture dont les cabanes de la ZAD sont une illustration parfaite, fruit de l’ingéniosité nécessaire à une occupation toujours menacée par un projet d’aéroport inutile.

En lisant le programme de l’école Domaine du possible, nous avons cru à votre volonté de placer la coopération et le souci des communs au-dessus de l’individualisme destructeur, que réclame à coup de matraques la préfète Nicole Klein à ceux qui cherchent à prolonger leurs projets collectifs sur la ZAD.

En ne disant mot, pendant ces longues journées de répression, vous nous faites douter de tous les espoirs que vos initiatives culturelles et pédagogiques ont fait naître. Ici à Arles, près de deux cents habitantes et habitants, vos voisines et voisins, ont signé un appel en soutient à cet autre domaine des possibles que les gendarmes engagés sur la ZAD sont en train de liquider dans un déploiement de violences inouï. Nous souhaitons vous faire lire cet appel car nous croyons que vous y retrouverez les valeurs communes que vous avez vous-mêmes contribué à semer dans le pays d’Arles. Nous espérons qu’elles vous donneront l’envie et le courage d’œuvrer à un retour rapide à la paix à Notre-Dame-des-Landes afin que ce lieu déjà devenu emblématique des nouvelles luttes sociales et écologiques puisse donner naissance à de véritables alternatives.

Nous sommes disponibles pour échanger avec vous sur cette question et plus largement sur les nouvelles formes de vie, d’agriculture et de rapports humains qui s’esquissent à travers cette lutte.

Comité arlésien de soutien à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes
Pour nous joindre : lestempssontbure at riseup.org

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Appel arlésien en solidarité avec les ZADs

Nous, habitantes et habitants, militantes et militants, agricultrices et agriculteurs, travailleuses et travailleurs, dilettantes, étudiantes, étudiants, parents, enfants du pays d’Arles, nous remercions celles et ceux qui luttent pour défendre la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, nous leur adressons un salut solidaire et nous leur témoignons notre indéfectible soutien.
Par leurs actions, leur courage, leur ténacité, ils ont empêché au bénéfice de tous la mise en œuvre d’un projet absurde et mortifère, destructeur de nature et de terres agricoles, qui représente l’exacte contradiction du monde sobre et convivial que nous souhaitons faire vivre dès à présent et transmettre aux générations à venir.

Mais au-delà de ce legs déjà inestimable, par leur créativité, leur intelligence politique, sociale et pratique, leur engagement artistique et culturel, les occupantes et les occupants de la ZAD nous ouvrent la voie sur des façons radicalement nouvelles d’habiter le monde. Leur résistance c’est aussi la nôtre. Leurs espoirs et leurs actes sont des fenêtres qui s’ouvrent à toutes et à tous. En saccageant la ferme des 100 noms et plusieurs autres lieux de vie, de travail et d’échange de la ZAD, c’est tout un champ des possibles à la fois désirables et nécessaires que le gouvernement détruit.

Le vieux monde se cabre et se défend. Il a pour ça le pouvoir, l’argent et les armes. Mais les mondes nouveaux résistent, se ramifient, s’étendent. Ils ont pour eux la solidarité, la créativité et la joie. Il n’y a même pas à choisir son camp, les puissants se moquent bien de ce que l’on pense de leur violence. Il faut choisir son campement, pour qu’à Notre-Dame-des-Landes, à Bure, dans les forêts de Roybon, sur les places des villes et dans les jardins publics, dans les écoles, dans les têtes et dans les cœurs, fleurissent des milliers de cabanes sauvages.

Nous appelons à la fin des expulsions et au retrait des forces policières de la ZAD pour que l’extraordinaire énergie accumulée dans la lutte puisse, maintenant que le spectre de l’aéroport est passé, s’épanouir pleinement et montrer à toutes et à tous les audaces et les alternatives dont elle est porteuse. Ce n’est pas en deux mois de concertations biaisées ni par la violence policière et sous la menace de blindés et de pelleteuses que les nouvelles formes de vie et de communs dont nous avons tant besoin pourront s’épanouir. Pour nous, la ZAD n’est pas une zone de non-droit. Elle est un lieu d’espoir, de création et donc de pleine légitimité.

Comité arlésien de soutien à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes
+ près de 200 signatures à retrouver et augmenter sur https://appel-arlesien-solidarite.frama.site

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