Cauchemars et facéties #10

Je n’ai jamais entendu parler de ça...

Cauchemardos - paru dans lundimatin#40, le 14 décembre 2015

Lacrymogène

Le 4 décembre dernier, pendant qu’un représentant de Bouygues (!) immobilier venait se faire remettre un prix au Grand palais dans le cadre de la Cop 21 (il aura d’ailleurs cette phrase magnifique : « C’est bien que les grandes sociétés financent le changement climatique, non ? »), des manifestants ont (une nouvelle fois) subi une répression musclée.

QUOI ??

Les policiers et gendarmes auraient-ils des pulsions extrémistes ? C’est ce que semble révéler une étude menée par Paris-Luttes. Lors du premier tour des élections régionales, à Grenoble, le Front National a récolté 15,7% des suffrages. Le bureau de vote 4072 fait exception : 38,56% en faveur du FN. Des personnes très diverses votent dans le bureau 4072. Entre autres les membres de l’escadron de gendarmes mobiles 24/5...

Dans le bureau de vote de Versailles-Satory, c’est plus clair. Il « présente la particularité de ne compter que des gendarmes et des membres de familles de gendarmes sur ses listes électorales ». Or, le Front National a récolté... 61,85% des suffrages (alors que le FN a récolté 15,95% des suffrages dans toute la ville).

Cette étude nous a rappelé (simple association d’idées) qu’en 2012, les votes des policiers grecs aux élections législatives avaient largement favorisé le parti néonazi Aube Dorée.

Banalisation

L’état d’urgence (et surtout ce qui va en rester) est peut-être moins un balayage du droit qu’un décapsulage des têtes policières. Permettons-nous d’être plus clair : le « j’ai le droit, c’est l’état d’urgence » si souvent entendu lors des perquisitions administratives, est devenu le point de départ de toute intervention policière. Quand il décidera de la fin de l’état d’urgence (pardon, de sa « sortie progressive »), le gouvernement prévoit-il un lavage des cerveaux policiers ?

« Je n’ai pas entendu parler de ça »

Manuel Valls a assuré mercredi que l’interdiction des accès à Internet via des Wifi publics n’était « pas une piste envisagée » par le gouvernement, en écartant également une interdiction de l’outil d’anonymisation sur Internet TOR.

« Internet est une liberté, est un moyen extraordinaire de communiquer entre les gens, c’est un plus pour l’économie », a souligné M. Valls, tout en soulignant qu’il était « aussi un moyen pour les terroristes de communiquer et de diffuser leur idéologie totalitaire ».

Jean-Jacques Bourdin ne l’a pas questionné en revanche sur la troisième piste envisagée, qui serait l’obligation de fournir aux services les clés de chiffrement des messageries, donc d’interdire les messageries indéchiffrables.

Sécurité


Coding Right diffuse (notamment au Brésil) « Safer nudes », « un guide sexy pour la sécurité digitale ». L’idée est de diffuser des conseils pour partager ses photos (ici un peu "osées", vous l’aurez compris, mais ces conseils valent pour tout type de photo) en limitant les risques qu’elles soient interceptées (par des maîtres-chanteurs, des exs revanchards, ou des services de sécurité).

Les conseils sont plutôt basiques, mais c’est un point de départ :

1. Prenez autant de photos que vous voulez, porno ou non, c’est votre vie.

2. Si vous partagez vos images avec quelqu’un en qui vous n’avez pas complètement confiance, anonymisez-les. Faites attention à votre visage, vos tatouages (très courants au Brésil), vos taches de naissance, etc.

3. Utiliser un « canal sécurisé » : jamais de SMS, de iMessages, WhatsApp, Telegram, Facebook (« pour l’amour de Dieu »), Tinder, Happn, tout ce qui montrera votre numéro de téléphone et permet de télécharger les images transmises. Coding Right conseille plutôt Confide et Wickr qui permettent d’envoyer des messages cryptés qui s’autodétruisent (attention à ne pas lier vos comptes à Facebook). Les captures d’écran sont aussi plus dures à faire que sur Snapchat (qui a besoin de votre 06 ou 07 et garde les images en ligne vingt-quatre heures).

4. Le gouvernement et les grandes entreprises « pourront toujours voir votre sexe s’ils le veulent ». Mais en cryptant vos informations, en utilisant Bitmask ou OpenVpN, cela devient plus difficile. Evitez aussi les wi-fi publics où les données sont plus facilement subtilisables.

5. Quand vous décidez d’effacer les preuves de votre vie sexuelle, n’oubliez pas de les supprimer partout, votre téléphone faisant souvent des sauvegardes. Coding Right estime que CC cleaner est une bonne solution. Mieux, encore, si vous souhaitez les garder, l’idéal est d’installer sur son ordi un logiciel de chiffrement.

Blocus lycéen à Rouen

Le 10 décembre, malgré l’état d’urgence, et contre le FN.

Lycéens contre le FN à Rouen from Nina Punchline on Vimeo.

A l’inverse


A la suite de la manifestation contre l’état d’urgence du 4 décembre, dont nous vous avions parlé la semaine dernière, un manifestant est passé en procès. Le récit des policiers frise le délire (« post-traumatique », il va sans dire).

« Bon, on sort des bâtons de défense et on charge. C’est un déluge de coups qui tombent de partout, les collègues crient mais je ne lâche pas, je tiens bon. Je dis à mon collègue « Cédric, j’en peux plus ».

« Pendant l’interpellation, on continue de prendre des coups, un homme en noir vient me donner un coup de poing et repart ». Le flic ose même : « en 20 ans de BAC, je n’avais jamais vu une telle violence ! ». R. est emmené sans ménagement.

« on reprend une salve de coups, je dis au chauffeur de foncer. La situation est toujours aussi violente autour de nous. Alors là oui, je me suis emporté, je plaque [R.] contre la banquette. Effectivement j’ai proféré des insultes, ta gueule, enculé, tout ça. S’il y a aussi eu des menaces de mort, c’est parce que j’ai cru qu’on allait tous mourir dans ce déferlement de violence. »

Dur, dur :

« j’en ai toujours des courbatures »

Selon Indymedia, qui publie ce compte-rendu :

il s’agit de faire oublier que les flics de Johanna Rolland ont écrasé un homme menotté, en soulignant quand même que ce SDF « ennuie régulièrement les habitants ». Quid de la police qui a accéléré dans la foule ? « C’était un geste technique pour protéger les policiers. »

R. a été condamné à 6 mois de prison avec sursis, ainsi qu’au versement de 500 euros de dommages et intérêts aux trois policiers qui l’ont interpellé.

Pour finir

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