Beaucoup de bruit pour tout

À nos fans - Par Les intermittents du désordre

paru dans lundimatin#151, le 25 juin 2018

« Les Intermittent.es du désordre surgissent de la moiteur silencieuse des salles comme le black bloc sort des foules : pour questionner la parole et le silence, l’ombre et la lumière. »

Fiers de leurs succès et suite à leur communiqué de la semaine passée, les Intermittent.es du Désordre accèdent à la notoriété et publient, à l’approche des festivités traditionnelles du théâtre en chemise blanche et panamas, leur édito d’été.

Retour sur les temps forts d’un début de saison prometteur et projection des perspectives avignonnaises.

Nous tenons d’abord à remercier nos familles et nos fans.

Tout cela est une blague, disons-le nous.

Nos interventions ne visent pas des personnes mais un système. Vincent Macaigne est un capot qu’il faut soulever pour déconstruire une machine. Il nous semble moins essentiel de s’attarder sur comment ce capot a résisté plutôt que de réfléchir à ce qu’il cache.

Nous ne sommes pas des nouveaux critiques. La violence de notre charge n’est pas de l’ordre du jugement sur une œuvre ou un artiste. Elle sert une mise en perspective de notre société dans sa relation au spectacle. Elle est relative au milieu des mille autres violences symboliques et invisibles qui fondent le spectacle.

Après trois pièces, notre ligne artistique est claire, nos engagements sont actés, notre situation financière est en crise, ne manque que le lancement de notre saison prochaine et nous deviendrons peut-être un théâtre public.

Dans L’Odéon commémore comme un mort ou L’Esprit de Mairde, notre première Pièce pour Pièces créée le 25 mai au Théâtre de l’Odéon, nous invitions le réel dans un théâtre pour rappeler à son directeur Stéphane Braunschweig qu’il avait pris part aux répressions printanières d’un État célébrant le cinquantenaire d’une révolte, comme le cri joyeux de la jeunesse au milieu de la violence du monde.

Dans Coucou Stéphane, créée et non-représentée pour la première fois à la Comédie Française le 8 juin, nous faisions planer une présence dans la salle poussiéreuse où nous brillions par notre absence, pour nous joindre à la lutte de tous les invisibles, grévistes parmi les grévistes, comme l’écho silencieux de notre parole du 25 mai, et comme une blague.

Dans Vincent range ta chambre, pièce chorégraphique créée le 12 juin au Théâtre de la Colline, nous proposions la douceur en réponse à la violence, l’évacuation ratée d’un théâtre en regard de l’évacuation réussie d’un campement, pour faire du bruit, le bruit creux des tweets et des polémiques qui mettent en lumière l’appétence d’un système à se nourrir de ce qu’il combat, à détruire ce qu’il a créé. Dans la salle, ce soir-là, un journaliste du magazine Vice, invité par nous, assistait au spectacle en se frottant les mains, comme une petite blague de plus.

Pour le moment, notre part de zbeul est remplie. Reste à faire vivre la lutte, où qu’elle soit et sous toutes ses formes, à Bure comme en Avignon dans une société qui, sous couvert de questionnements, d’études de gestes artistiques tend toujours à la récupération de ce qui lui échappe.

Les questions sont lancées.

Peut-on interrompre ? Oui.

Faut-il interrompre ? Oui

Pourquoi interrompre ? Oui.

Il n’y a rien à dire de plus. Rire.

Nous sommes une fenêtre ouverte. Ceux et celles d’entre vous qui nous lisent, nous croiseront peut-être en Avignon, temple des marchands théâtreux et de l’hypocrisie d’un monde qui se contemple. Il vous suffira, pour nous voir, de vous lever et de passer, de notre part, le bonjour à ce cher Olivier.

Nous sommes irrécupérables.

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